La fête du sport, ou l’occasion de décompresser. Pour tous le monde. Que ce soit les professeurs, les étudiants –toutes années confondu- ou les membres du personnel, tous le monde avait été libéré pour cette coutume made in Japan. Et Dean n’avait pas hésité à assister aux différentes épreuves. D’un côté parce qu’en tant qu’infirmier il pourra sans doute être assez utilie dans certains cas, d’un autre côté pour assouvir sa soif de nouveauté et sa curiosité. Car oui, il n’avait jamais assisté à un tel évènement. Hamura, le lycée dans lequel il avait travaillé avant, n’était pas assez accès sur la coutume japonaise pour organiser un tel évènement, ce qui était fort dommage. La fête du sport avant quand même beaucoup plus d’avantages que de désavantages : d’un côté, elle réveillait l’esprit de compétition et l’envie de se donner à fond et de se dépasser, au près des élèves, révélant ainsi leur caractère ... que la plupart cachait en cours. D’un autre côté, bouger et faire du sport était bon pour la santé.

Ainsi, Dean se trouvait dans le rang des supporters autour du terrain d'athlétisme. Il était debout depuis 7h30, avait assisté à la cérémonie d’ouverture. Ensuite il s’était baladé sur le campus, regardant un match de basket et s’intéressant pour le base-ball. Notre infirmier était resté plus longtemps dans le dojo pour observer les Kyudojin. Mais maintenant, il était sur le terrain d’Athlétisme, bien décider à ne pas perdre une seule miette de la course de relais.

Alors qu’il était adossé à la barrière en face de la ligne d’arrivée et se disant que tous les sportifs avaient de la chance avec le temps –assez frais mais ensoleillé – il observait les jeunes qui se mettaient en place et … son regard tomba sur Kimihiro, le « sale gosse » de 3ème année. L’étonnement de le voir là, portant les couleurs de sa classe, se dissipa en moins d’une seconde après que Dean se soit rappelé que le jeune homme faisait parti du club d’athlétisme et qu’il était, en général, très sportif. Leurs regards se croisèrent très furtivement, mais notre infirmier avait un doute si Kimihiro l’avait reconnu. Enfin, soit.

Restant tranquillement sur place, notre jeune homme observa avec une certaine tension comment les athlètes se mirent en place puis les encouragea aussi fort que les autres supporters. Pour le principe, Dean encouragea tous les coureurs, mais son esprit voulait, évidement, que la 3-A gagne la course. Kimihiro était le dernier à partir et, s’il était stressé –son équipe avait prit pas mal de retard lors du passage de l’avant dernier relais- il ne se le fit pas remarquer. Concentré comme pas possible, il démarra en trombe dès lors que sa main se referma sur le relais. La rage de gagner se lisait sur son visage et son envie de devancer les autres se réalisa ! Lors de la première ligne droite, sa remonté fut fulgurante, de telle manière à ce qu’il finit la course avec presque une seconde d’avance sur le deuxième.

Le public –Dean y comprit- explosa dans un tonnerre d’applaudissement et de cris de joie. Kimihiro, qui avait sans doute tout donné, s’était écroulé sur l’herbe du stade, hors d’haleine et reprenait son souffle. Très rapidement, son équipe était rassemblée autour de lui, sautant et hurlant de joie, ainsi que quelques professeurs et supporters.

Un sourire radieux sur le visage, Dean hésita à aller le rejoindre mais abandonna finalement l’idée, préférant attendre que la joie tombe un peu. De toute manière, il préférait parler et féliciter Kimihiro lorsqu’il sera seul. Ainsi donc, se mettant un peu à l’écart, notre infirmier s’adossa au mur et attendit.

Une bonne dizaine de minutes passèrent –Dean observait les passants avec un certain amusement- avant qu’il ne vit le héro de la course, sac épaulé, sortir des vestiaires. Un sourire bordait ses lèvres, ce qui rassura quelque peu notre infirmier car il n’avait aucune envie de parler à un sale gosse de mauvaise humeur. Sans bougé de son observatoire, Dean attendit qu’Eiji passe devant lui pour prendre la parole.

« Très jolie course, Kimihiro-kun » déclara-t-il en souriant. Pour une fois, il n’avait pas oublié le suffixe qui était de coutume au Japon « j’ai très rarement vu une telle remonté … sauf aux jeux olympiques » Décroisant ses bras, notre infirmier se poussa du mur et s’avança vers Eiji « La course de vitesse n’est pas donné à tout le monde » Dean hochant la tête en signe de respect « bravo »

Tout au long de sa prise de parole, notre infirmier avait bien fait attention d’adopter une attitude et un ton sincère, sachant pertinemment que Kimihiro était du genre à voir le mal partout. Même dans les plus sincères des paroles …

La lassitude qui suivait une course intense était digne des euphories provoquées par les plus douces drogues. Appuyé contre le carrelage froid des douches pendant que l'eau brulante fouettait sa peau avec vigueur, le jeune homme savourait encore le plaisir d'une course bien menée, dont la victoire ne faisait que rajouter encore au plaisir. Jusqu'à la dernière minute, il n'avait même pas été sur de participer au relais des troisièmes années. La majorité des membres des clubs sportifs ne s'étaient pas mis en avant pour les compétitions inter-classes, histoire de laisser leur chance aux autres élèves qui s'étaient entrainés durement depuis la rentrée.
Quand la dernière de l'équipe de la 3-A était arrivée blanche comme un linge, la main crispée sur le ventre et incapable de faire plus de quelques pas sans tomber sur le côté en grognant de douleur, il avait été clair que le remplaçant allait devoir faire son office.

Levé tôt pour pouvoir faire son jogging matinal avec son chien comme à son habitude, il avait jusque là observé plus que participé aux épreuves – il serait déjà présent pour gérer les initiations au kendo l'après-midi, si bien que sa matinée était plutôt libre – et avait enfilé sa tenue en 4ème vitesse pour aller sur le terrain d'athlé en tant que coureur cette fois.
La course de sprint n'était pas sa spécialité, plus habitué qu'il était aux longues distances, mais ses adversaires n'étaient pas non plus des sportifs surentrainés de haut niveau, lui laissant toutes ses chances, d'autant plus que le hasard du remplacement le laissait partir en dernière position.
Quelques minutes plus tard, Eiji s'écroulait dans l'herbe au milieu des hourras et accolades des autres membres de son équipes, heureux comme des rois de la performance qui leur faisait gagner le relais des troisièmes années. Un large sourire sur le visage, l'athlète ne pouvait qu'apprécier les acclamations comme le plaisir de la course : courir face à d'autres en compétition ajoutait toujours un petit quelque chose de décisif qui le poussait à se donner à fond.

La douche était l'auguste récompense après la compétition, après quelques trop rapides minutes à son gout – ils étaient nombreux à vouloir se doucher, si bien qu'il ne pouvait pas y rester autant de temps qu'il aurait aimé – Eiji renfilait son uniforme scolaire et récupérait son sac pour le déposer dans le dojo avant de participer à la suite des évènements. Chemise hors du pantalon et remontée sur ses coudes, cravate oubliée, son uniforme était difficilement reconnaissable en cet instant, mais personne ne lui en voudrait : hormis ceux qui tenaient les stands et qui avait une allure impeccable, les élèves avaient souvent une allure plus décontractée quand ils ne gardaient pas l'uniforme de sport entre chaque épreuve. Vu qu'il allait passer une grande partie de l'après-midi en hakama, il trouvait plus simple de rester en uniforme pendant la pause jusqu'à enfiler sa tenue plus traditionnelle.

Un large sourire s'imposa sur ses lèvres alors que son esprit se concentrait sur le kendo de cet après-midi – y aurait-il du monde, leurs élèves seraient-ils vraiment intéressés et attentifs, dans le bon esprit pour débuter ? - Eiji mit quelques secondes à réaliser que quelqu'un lui adressait la parole, et que ce quelqu'un en question n'était pas un de ses camarades de classe.

" Ah, merci ?" Fut la réponse très intelligente que le jeune homme réussit à balbutier. Il s'inclina en remerciement, son cerveau assimilant tout juste qu'il avait à faire à l'infirmier. "Ce n'est pas si surprenant dans une course avec tant de différences niveaux." expliqua le jeune homme, préférant minimiser sa course. C'était un relais, il n'avait pas été le seul à participer et être comparé à un sportif de si haut niveau était un peu gênant.

" Vous restez là pour féliciter chaque coureur ou être sur que personne ne fait de malaise ensuite ?"

Pour sa part, il les prévoyait plus pendant les épreuves de l'après-midi plus brutales, les incidents et autres catastrophes.

Kimihiro n’était pas très sûr de lui. Du moins, c’était ce qui semblait à Dean. A moins que le jeune homme jouait au modeste ? QUoiqu’il en soit, ce n’était pas comme ça que notre infirmier l’avait gardé en mémoire. Jusqu’à cet instant, le nom Kimihiro évoquait, pour lui, qu’un de froid et hautain, toujours à chercher à se fourrer dans des problèmes sans queue ni tête. Mais peut-être que la course l’avait à ce point fatigué, qu’il en oubliait sa haine contre l’infirmier ? Hm, ce n’était pas exclure. En tout cas, ce n’était pas comme si Dean allait s’en plaindre, ça non.

Affichant un sourire amusé après les dernières paroles du coureur, notre infirmier haussa doucement les épaules et s’arrêta en face de lui

« Je garde mes forces pour les épreuves un peu plus extrêmes de l’après midi. » dit-il avec un certain amusement avant de mettre ses mains dans les poches de son jeans. Reportant son regard sur Kimihiro, il l’interrogea du regard « D’ailleurs, j’ai cru comprendre que tu préfères les course d’endurances, non ? Pourquoi t’être décidé à participer à ce relais ? »

La curiosité de Dean était bien connue … et lui avait déjà souvent été fatale à plus d’une reprise. Enfin bon.

« Je te payes un coup ? » Demanda notre américain avait que l’étudiant ne puisse répondre à sa question initiale.

Eiji avait sans doute déjà vidé une bouteille d’eau, mais peut-être voudrait-il quelque chose de plus rafraichissant ? De toute manière, autour d’une boisson, l’atmosphère était, généralement, plus détendue.

Tiens donc, l'infirmier suivait avec autant d'attention les performances de tous les sportifs du lycée ? Certes, ses préférences n'étaient pas bien dures à connaître, il suffisait de laisser trainer l'oreille durant l'un des entrainements d'athlé.... où il n'avait jamais vu le coin d'un des sourires narquois de l'infirmier. Des taloches allaient être distribuées si Eiji découvrait qui dans l'équipe avait une grande gueule et s'amusait à parler des préférences et des capacités de ses autres camarades. Quelqu'un qui allait régulièrement à l'infirmerie peut-être ?
Le jeune homme haussa les épaules, s’apprêtant à répondre quelque chose d'assez générique quand Onwara reprit, lui proposant de lui offrir un verre comme s'il était un vieux collègue absent depuis quelques temps avec qui il voulait renouer des liens. Soit il était plus fatigué que prévu après la course, soit l'infirmier avait attendu trop de temps en plein soleil – en supposant que le soleil d'octobre pouvait être nocif.

" Vous ne devriez pas plutôt être en train de vous assurer que personne d'autre ne s'est fait mal durant les différentes épreuves ? Si vous offrez à boire à tous les gagnants, vous allez y passer votre paie. "

A sa manière d'enchainer les questions aussi rapidement, Eiji se demanda sur le coup si Onwara s'intéressait réellement à ses réponses, ou s'il les posait par simple politesse ou habitude, un peu comme une consultation à son infirmerie avant de s'intéresser au vif du sujet. D'un autre côté, pourquoi rester avec lui dans ce cas ? Pour prouver au reste du monde qu'il avait réussi à apprivoiser cet élève terrible qui ne s'entendait pas avec lui ? Pour le moment, le jeune homme, trop fatigué pour être vindicatif, faisait preuve d'une certaine patience, voir de passivité, mais il n'avait rien vu qui ne le fasse changer d'opinion quand au comportement général de l'infirmier.
Il imaginait assez bien le soupir et le petit sourire de Jiro, assorti d'un conseil pour s'ouvrir et essayer de voir un peu plus positivement les adultes qui l'entourait, et non de les voir tous comme des potentiels ennemis sur son chemin. Excepté le professeur d'anglais, qui comptait à peine : celui-ci faisait assez juvénile pour passer de manière crédible pour un de ses camarades de classe. Un sourire un peu plus doux s'afficha sur le visage du jeune homme, incompréhensible pour tous ceux qui n'étaient pas dans sa petite tête et ne pouvait suivre le cheminement de ses pensées.
Bien, s'il écoutait ce que la voix mentale de Jiro lui susurrait gentiment à l'oreille...

" J'ai fini par participer parce qu'une des participantes ne pouvait pas courir à cause de ses trucs de fille. J'étais le premier remplaçant."

Son regard se posa sur le terrain derrière eux, encore occupé par certains membres de l'équipe restés sur place et par bon nombre de supporters, amis et familles qui venaient discuter avec les athlètes restés sur place. Le terrain était rarement pris d’assaut par autant de monde et semblait d'un coup bien trop petit pour accueillir autant de personne. Même si la fête était plus que sympathique, le troisième année avait hâte qu'elle se termine pour qu'il récupère son terrain, sans les intrus, et sans ceux qui venaient s'entrainer dans le seul but d'être présentables pour cette journée.

Dean soupira discrètement. Finalement, Kimihiro n’avait pas changé. Il semblait toujours avoir une dent contre lui, pour une raison qui échappait encore et toujours à notre infirmier. Enfin, qu’est-ce qu’il avait pensé ? On ne change pas les sale gosses hein ? Du moins, pas ceux qui étaient autant bornés que Kimihiro. Enfin. Dean hocha la tête, s’apprêtant à répondre quelque chose d’un ton un peu plus sec, lorsqu’il vit apparaître le sourire plus doux qui s’affichait sur les lèvres du troisième année. Ce dernier expliqua par ailleurs le pourquoi du comment il avait participé au relais. Explication qui arracha un petit sourire amusé à notre infirmier. Les filles donnaient toujours cette excuse pour ne pas avoir à participer aux cours de sport. Peut-être que l’athlète était en réalité stressé et apeuré par le fait de concourir en publique ? Enfin, l’esprit féminin était assez complexe et Dean n’avait pas envie d’émettre des hypothèses.

Soit. Pendant que Kimihiro avait parlé, nos deux jeunes gens s’étaient mis en route et étaient maintenant arrivé à un stand de boisson. Ils attendirent quelques instants – temps pendant lequel nombreux furent ceux qui félicitèrent Kimihiro d’une accolade ou d’une tape sur l’épaule- avant que Dean ne puisse commander leur boisson. Il s’acheta un coca – très content que c’était du vrai coca, pas une boisson d’une sous-marque quelconque- et un thé glacé pour l’étudiant. Se tournant vers ce dernier, il lui lança la canette en souriant

« Ce sont tes footing matinaux avec ton chien qui t’entrainent à ce point ? » demanda-t-il en décapsulant sa canette.

Il est vrai que, maintenant qu’il y reposait, Kimihiro avec un chien. Comment s’appelait-il déjà ? Shakira ? Shusaka ? Shiba ? Tant qu’à faire, autant l’avoir appelé Chorizo. Enfin, le nom n’était pas important. Mais Dean avait déjà aperçu Kimihiro qui partait, de bon matin, en direction de la forêt avec le chien à ses trousses – ou plutôt lui aux trousses du chien.

Souriant, Dean prit une gorgé de sa boisson et observa les alentours.

Eiji attrapa la canette au vol, notant que l'infirmier avait eu la décence de lui prendre du thé glacé, et pas un de ces trucs chimiques dont il avait l'air de rafoler. Il voulait bien supporter les boissons enrichies que le prof de sport le forcer parfois à incurgiter en cours d'effort – devait même reconnaitre que ça l'aidait parfois bien à se remettre – mais il n'allait pas pour autant se mettre à boire les sodas hypersucrées qu'adoraient les filles.
L'adolescent ouvrit à son tour la canette et en descendit la moitié en une grande lampée. Il avait déjà descendu une demi-bouteille d'eau dans le vestiaire, mais le gout légèrement sucré du thé était agréable avec l'effort, lui rappelant qu'il commençait à avoir faim. Il avait rendez-vous avec Kantaro et Hugh dans le parc pour la pause déjeuner et avait hate d'y être, pour manger comme pour discuter des derniers évènements.

La suggestion lui fit pousser un léger grognement. Une fois de plus, il n'arrivait pas à être sur si l'infirmier se foutait cordialement de lui ou se tentait juste à l'amour. On lui avait déjà reproché d'être soupe au lait et de trop prendre les choses au 1er degré... Ok, il voulait bien l'entendre, mais ça, il devait le prendre comment alors ?
Le sportif haussa les épaules et but une nouvelle gorgée, plus raisonnable cette fois, avant de parler.

" Non, heureusement, je m'entraîne en plus. La dizaine de kilomètre tous les matins, c'est juste pour nous défouler tous les deux."

Cela pouvait presque sonner ironique, et l'aurait surement été, dans la bouche de n'importe qui d'autre qu'Eiji. Le sportif adorait courir, à tel point que cela en était devenu un besoin viscéral chez lui, comme de pratiquer le kendo. Il ne s'imaginait pas ne pas être assez en forme pour abandonner ses sessions matinales, et l'une de ses grosses preuves d'amour envers Jiro était bien de lui consacrer ses week end sans l'abandonner un instant pour aller courir. De toute façon, sans cet exutoire pour libérer son énergie, il serait rapidement devenu invivable pour la plupart des gens de son entourage.

" Enfin c'est toujours plus que ceux qui participent exceptionnellement aux relais : la plupart s'entrainent juste depuis septembre, forcément ça ne fait pas de miracle."

Le kendoka avait bien conscience de ne pas être tendre et de ne pas faire beaucoup de concession pour ses collègues moins sportifs mais... à chacun sa spécialité. Il ne commentait pas le travail des têtes de classe, promis.

Kimihiro était un sportif. Cela se voit quant à sa manière de marcher, de se tenir et à la remonter fulgurante qu’il venait de faire. De plus, sa passion pour le sport, s’entendait à ses paroles. Tout en buvant son coca, notre jeune homme, ignorant le râle qui provenait de l’étudiant suite à ses paroles, l’écouta parlé. Ainsi donc il courait 10 kilomètres tous les matins ? Juste pour se défouler ? Eh ben. Il courait combien de temps quand il s’entrainait réellement ? 20 kilomètres ? Enfin soit. Après cela, un silence se mit en place, tandis que tous deux étaient perdus dans leurs pensées. Du moins était-ce surement le cas pour Kimihiro.

L’attention de Dean était, elle, portée vers un groupe de jeunes qui se tenait non loin d’eux. Ou plutôt, pour être plus précis, notre infirmier observait l’un d’entre eux. Les yeux légèrement plissés, le regard fixé sur le jeune étudiant, Dean tenta de comprendre ce qui n’allait pas chez lui. Était-ce sa démarche ? Son air qu’affichait son visage ? Bizarre. En tout cas, l’inconnu ne semblait pas dans son assiette. Sans le quitter du regard, notre américain écouta Kimihiro d’une oreille distraite qui critiquait les autres du club d’athlétisme. Soupirant légèrement, Dean secoua la tête et vida sa canette, avant de lancer un regard furtif à l'athlète.

« Pas tout le monde ne peut être aussi bon que … »

Il n’eu pas le loisir de finir sa phrase. Ayant reporté son attention sur l’étudiant qu’il avait observé avant, il remarqua que celui-ci venait de s’écrouler et était maintenant allongé au sol. Sans doute un malaise, mais ça pouvait être bien pire que ça. Alors, après un dernier coup d’œil à Kimihiro, Dean s’élança vers le jeune homme à terre –jetant au passage sa canette dans une poubelle. Après avoir joué des coudes pour se frayer un passage entre les jeunes qui l’entouraient, il s’accroupi à côté de celui qui se révélait être un 2-A –Dean avait lut sa fiche médicale il y a de ça quelques jour, sans pour autant se rappeler de son nom- qui avait participé au relais.

Après avoir vérifié qu’il avait bien été prit d’un malaise et l’avoir mit dans une position adéquate, notre infirmier put observer comment l’étudiant revint à lui et …eu tout juste le temps de faire un bon sur le côté pour ne pas être aspergé par le vomit du malade. Déglutissant et crispant le visage dans une mine de dégout, Dean inspira profondément. Il devait se prendre en main. Même s’il avait horreur de tout ce qui sortait par la bouche des être vivants, l’infirmier qu’il était devait faire la part des choses. Ainsi, après avoir attendu que le jeune homme se soit à peu près remit et qu’il n’avait plus rien à vomir Dean commença à lui poser quelques questions. Très vite, suite aux réponses que lui donnaient l’étudiant et à la vue de la consistance de ce qu’il venait d’expulser par la bouche, il n’y avait pas de doute possible : ce bonhomme était en hypoglycémie et son taux de sucre dans le sang était relativement bas. Ce qu’il lui fallait maintenant et vite, était quelque chose de sucré.

Réfléchissant rapidement, Dean se maudissait d’avoir fini son coca avant et de ne pas avoir ramené son sac dans lequel il avait, systématiquement, une barre de céréale, un peu de chocolat et une bouteille d’eau. Grimaçant, notre infirmier fouilla les poches de son jeans puis les poches de sa veste et senti son cœur s’accélérer légèrement. Ah mais oui ! Il avait presque oublié les sucres qu’il avait prit lors de la dernière fois qu’il avait but un café en ville. Ni une ni deux, il sorti les quatre carrés de sucre encore emballés et obligea le jeune homme à les avaler. Les effets se firent voir assez rapidement. Même pas 5 minutes plus tard, l’étudiant reprit des couleurs et se leva. Après quelques conseils et une obligation d’aller tout de suite mangé de la part de Dean, il parti en direction d’un stand de mangé avec quelques amis.

Prenant une profonde inspiration, notre infirmier se redressa doucement et l’observa partir, s’assurant qu’il n’allait pas faire un détour par je-ne-sais-où. Puis hochant la tête, Dean se détourna, enjamba la flaque de vomit et tomba nez à nez avec Kimihiro. Depuis combien de temps était-il déjà là ? L’avait-il observé depuis le début ? Hm, c’était fort possible. Esquissant un mince sourire, Dean fit un pas sur le côté et s’essuya les mains avec un mouchoir.

« Voilà ce qui arrive quand on mange rien le matin avant de faire un effort. C’est sans doute assez difficile d’avaler quelques chose quand on stresser, mais … voilà le résultat. Le ventre vide mêler au stress de la compétition ça n’a jamais donné quelque chose de bon. » Déclara notre infirmier avant de laisser glisser son regard sur les gens « je me demande combien de gens sont sorti ce matin sans avoir mangé … » reprit-il, plus pour lui-même.

Eiji s'était éloigné de quelques pas pendant le malaise de l'autre garçon, Matsuhita-kun, un de ses kohais qui avait participé au relais, un garçon tout en os et en nervosité, anxieux comme pas possible dès qu'on le mettait devant la possibilité d'une compétition et de l'échec. Comme la plupart de ses camarades, le jeune homme resta en retrait pendant que l'infirmier officiait, bien content de ne pas avoir à agir en ce cas. A part mettre quelques gifles en cas de malaise, il n'était pas vraiment entraîner à régir dans ce genre de cas lui...
Heureusement, la scène finit bien, avec un adolescent qui se relevait, flageolant, aussi assuré sur ses jambes qu'un enfant de 1 an, entouré fort heureusement par ses camarades. Un peu choqué, Eiji chercha du regard l'infirmier, qui, comme toujours semblait détendu, le sourire aux lèvres, juste un peu agacé par la bétise de l'autre garçon qui l'avait interrompu dans sa pause. Mais comment ne pas être agacé par son comportement ? Serait-il resté tout aussi décontracté si le gamin ne s'était pas relevé aussi vite ?

" Et... c'est tout ? Vous ne voulez pas l'accompagner à l'infirmerie ? Je peux vous aider à l'y emmener si ce n'est que ça..."

Même s'il n'était pas dans son club, Eiji se sentait un certain devoir de responsabilité envers tous ses kohais et y répondait du mieux de ses possibilités. Mal à l'aise, le kendoka fixait l'infirmier sans bouger d'un pouce. Il aurait bien aimé se dire que l'apparente décontraction d'Onwara était celle née d'une aisance due à uen maîtrise parfaite de son job mais... à chaque fois qu'il croisait l'homme, c'était surtout son ego surdimensionné qui le marquait, plus que tout autre chose. Et si c'était encore ça le soucis ? Et s'il mettait en danger la vie d'un de ses camarades parce que son arrogance lui donnait l'impression que rien ne pourrait arriver sous sa houlette après une imposition des mains ?
Le regard méfiant, l'adolescent fixait l'infirmier, attendant sa réponse. Et prêt à le laisser sur place si elle ne lui convenait pas.

La réaction de Kimihiro était … bizarre ? Déconcertante ? Oui, voilà. C’était le bon mot. Il avait l’air troublé, énervé et peu sûr de lui. Tout cela en un. Mais pourquoi ? Dean avait beau se triturer les méninges, il ne trouvait pas ce qu’il aurait put faire de mal. Qu’est-ce qui poussait le jeune homme à réagir de la sorte ? Sans toute était-ce l’inquiétude qu’il ressentait pour le jeunot qui venait d’avoir le malaise. Du moins, était-ce ainsi que Dean jugea ses paroles.

Ces dires lui arrachèrent un petit sourire. Ni amusé, ni moqueur, ce sourire avait plutôt quelque chose de tendre. Au son de la voix, du jeune Kimihiro, Dean pouvait très bien reconnaître son inquiétude. Cela le toucha quelque peu, étant donné qu’il aimait bien lorsque les plus âgés se préoccupaient de leurs plus jeunes camarades. D’autant que, avouons-le, cela ne ressemblait pas à Kimihiro de montrer de l’empathie.

« Ne t’inquiète pas, va » lui dit-il de sa voix assurée « Ce qui vient de lui arriver est quelque chose de plus impressionnant que ça ne l’est réellement. Et puis … » D’un coup de tête il désigna l’élève qu’il avait sauvé à l’instant « … avec le bento qu’il vient de s’offrir, il reprendra rapidement des forces » Après avoir observé l’étudiant pendant quelques instants, Dean reporta son attention sur Kimihiro « Et à l’infirmerie je ne pourrais pas m’en occuper d’avantage. D’autant qu’il a l’air d’avoir des camarades pas mal soucieux. »

Effectivement, depuis que notre s’était occupé du 2-A, les camarades de ce derniers ne l’avaient pas lâché d’une semelle.

« Aussi, j’ai pris les précautions nécessaires. Je suis quand même un minimum compétant et pas inconscient au point de le laisser repartir, comme si de rien n’était, si je n’avais pas été sûr et certain qu’il aille bien » reprit-il, toujours sur un ton calme et posé. « Mais … » et il plongea son regard dans celui de Kimihiro, le fixant avec un peu plus d’intensité « Rien ne t’empêche d’aller vérifier par toi-même »

Il ponctua ses dires d’un sourire sincère. Maintenant, Kimihiro n’avait guère le choix. Ou bien il partait vers le 2-A, remettant ainsi la compétence de Dean, dans son domaine, en question. Ou bien il restait et trouvait 100 000 arguments en sa faveur et contre notre infirmier. Ou alors il partait, feignant une quelconque excuse et laissait ainsi Dean dans l’incompréhension la plus totale.

Bizarrement, notre américain ne s’étonnerait guère que Kimihiro choisisse la troisième option.

Le sourire plein de complaisance et le regard moqueur de l'infirmier ne passèrent pas, mais alors pas du tout auprès de l'adolescent. S'il voulait bien faire un effort pour le supporter, accepter ce foutage de gueule ouvert... il ne l'aurait pas non plus accepté d'un prof avec en théorie tout autorité sur lui.
Braqué, le jeune homme se stoppa net, un regard furieux posé sur l'infirmier si sur de lui.
Il avait réessayé, ça n'avait pas mieux marché que les fois précédentes. Il fallait croire qu'ils n'étaient définitivement pas fait pour s'entendre, caractère soupe au lait d'Eiji ou non.

" A ouais, c'est comme ça que vous réglez tous les soucis de l'infirmerie, par imposition des mains ? Vous savez ce que c'est votre soucis ? C'est que vous êtes tellement bouffi par votre propre importance que vous en avez vraiment rien à foutre des gens, c'est à se demander pourquoi vous avez fait un job de ce genre. Pour vous sentir mieux parce que vous sauvez des gens ? En tous cas, vous approchez plus de moi. "

La voix avait été furieuse, mais il avait fait de son possible pour éviter d'être entendu sur toute la surface du lycée. Pour autant, il sentait presque les regards interloqués tournés vers eux de la foule semi-compacte. Parmi ceux-là, nul doute qu'il y avait certain de ses camarades qui reconaissaient son coup de sang pour ce qu'il était. Les autres... il s'en fichait.
D'un geste rageur, Eiji colla la cannette offerte dans la main de Dean avant de faire demi-tour, tête haute et épaules raidies. Si jamais il devait se blesser ou être malade ici, plutôt crever ou ramper jusqu'au médecin le plus proche que se faire soigner par un imbécile qui ne s'intéressait qu'à lui-même. Maintenant, ça, il en était sur.

Inspirant, le jeune homme tenta de se calmer avant d'aller retrouver Hugh et Kantaro dans le parc. Il allait avoir des choses à leur raconter, histoire de retrouver le calme adéquat à sa session de kendo de cet après-midi. Avec un peu de chance, le blondinet réussirait à savoir quoi dire pour lui faire voir les choses sur un point de vu moins tendu.

L’explosion de colère de Kimihiro n’était aucunement justifier. Dean n’avait rien fait ou dit de mal. Il lui avait simplement exposé son point de vu … ce qui ne lui avait pas plus. Kimihiro s’était mit dans une colère noir et jugeait sans doute que de rabaisser l’infirmier devant ses camarades, lui donnait un air viril et rebelle. Un sale gosse. Un VRAI sale gosse. Dean avait fait des efforts, il s’était efforcer à ne pas paraître trop moqueur, avait tenté de l’amadouer après sa course. Rien à faire. Ce sale gosse s’énervait pour un rien et trouvait ça marrant en plus. Mais le pire dans tout cela, était que la colère était un ressentiment qui se transmettait rapidement à l’interlocuteur. D’autant que Kimihiro l’engueulait pour aucune raison valable.

Pendant que l’étudiant lui montrait clairement qu’il avait une dent –ou plutôt toute une mâchoire- contre lui, Dean s’efforça à rester calme. Chose assez difficile, en somme. S’il n’avait pas été l’infirmier –donc une personne adulte qui se devait être responsable- et s’il n’avait pas déjà eu un avertissement à cause de l’autre italien, Dean n’aurait sans doute pas hésité à montrer clairement à Eiji qu’il allait trop loin. Mais là, en publique, avec quelqu’un qui risquait sans doute de courir chez le directeur s’ils en venaient aux mains, notre américain entreprit simplement de garder intact le barrage contre la colère, en lui.

Malheureusement – ou heureusement ?- Eiji se détourna rapidement et laissa Dean derrière lui. Ce dernier le suivit froidement du regard puis se détourna à son tour et marcha d’un pas rapide dans la direction opposé. Ignorant les étudiants qui le regardaient l’air choqué, Dean se fraya un passage entre la masse et se dirigea vers son appartement … où il entreprit de laisser libre cour à sa colère. Heureusement que ses colocataire devaient être parmi les gens dehors, pendant que la fête du sport battait son plein.

Ce sale gosse avait le maudit don de gâcher le jour de fête. Et puis, pour tout dire, Dean n’allait pas en rester là. Ah ça non. Dès que l’occasion se présentera à nouveau, il allait retrouver Kimihiro et lui faire comprendre que ça ne pourra plus continuer ainsi. Peu importe les conséquences que cela pourrait avoir.