Gimme a Bullet (PV Maj'-Elle va me sauter dessus!aaah!)

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Un bruit long et lourd brisa la brume en deux. Ce matin dans la baie de Tokyo, des dizaines de bateaux cargo se croisaient. C'était une longue danse rectiligne de pirogues millénaires, chacune distançant à l'aise un terrain de foot grand format. L'un d'eux, un cargo russe, s'apprêtait à se coller à une partie du port pour décharger pétrole et gaz. Les oiseaux rappelaient à tout le monde qu'on se trouvait dans un port grand comme quatre fois la ville natale d'Erwann. Erwann justement, sortait d'une cabine sur ce cargo. Il y a quelques mois, il avait disparu de la métropole japonaise, pour fuir la culpabilité et les remords. Le capitaine était un vieil ami, enfin plutôt un bon client, mais qui savait faire usage d'amitié. Il y a trois mois, le cargo partait pour Seattle, alors le canadien expatrié avait sauté dedans, sans trop penser à comment il reviendrait.

Et quelques mois avaient suffit à l'ile nippone pour oublier les traces du brun. Il débarquait dans un port encore endormi. Personne à l'horizon. Après avoir remercier le marin, il remonta la jetée pour s'engouffrer dans la zone industrielle portuaire, son sac bleu miteux et déchiré sur le dos. Il avait gardé certaines habitudes : toujours regarder derrière son épaule à chaque coin de rue, toujours garder la première cartouche à blanc... . Mais il avait définitivement stopper d'autres sales habitudes. Il avait arrêter de fumer, totalement. Il avait réduit sa consommation de pilules blanche.

Ruika n'était plus là, disparue, comme lui. Majoren.. la dernière fois c'était dans ce même port. Un regard furtif, un court échange. Avec le japonaise pas trop besoin de parler, tout se devinait, excepté peut-être les sentiments qui les concernaient.

Mais tout ça, il avait fait l'impasse dessus, le temps de retourner sur la terre de ses vieux. Après avoir débarqué à Seattle, il avait traversé le nouveau monde d'est en ouest en marchant, et quelque fois quand même, en autostop. Son retour à Halifax n'avait rien eut d'exceptionnel, personne ne l'attendait vraiment, et les seuls vraiment surpris furent sa mère et ses frangins. Tous ses anciens amis n'étaient plus là, partis loin, chercher un bonheur qui devait ressembler au bonheur que recherchait Erwann il y a presque deux ans. A cela s'ajoutait le fait qu'Alicia (sa sœur à peine plus âgée que lui -environ une minute), étudiait en État-unis, en Arizona. Il avait hésité à y aller, mais deux milles kilomètres de plus dans un pays étranger avec un sac plein de petites pilules blanches et d'une arme de point chargée, c'était le mur assuré.

Puis finalement retour vers l'est, re-traversée du pacifique en bateau et peut-être il serait rentré pour la reprise du travail à l'école.

La ville restait égale à elle même. Violente et ultra-active, jamais endormie, jamais reposée. Chaque rue se ressemblait et Erwann trouvait toujours que les passants étaient tous les mêmes, une armée de clone créés pour agir sur une nature naïve et fragile. Inutile de dire que le canadien se sentait seul être pensant dans tout cet océan de consommation d'oxygène. Une chose qui le ramenait à la réalité ? Le pas cassé de sa démarche habituelle, comme une grosse caisse qui cherche à battre le pouls d'un amoureux. Une destination ? Peut-être. Mis à part le dortoir de Shokuboo, il n'avait pas vraiment de toit où dormir. Et tout ça sans compter que la chambre 39, qui était depuis longtemps désertée, avait due être réinvestie par des élèves inconscient des choses qui s'y sont passées. Ah mon Dieu ! Jeunesse accablante ! Alors... que faire ? Il y avait bien un autre endroit... la planque de Maj'.

Pas besoin de se remémorer les pourquoi des comment de cette planque, les marques lui faisaient encore mal parfois. Mais s'il fallait qu'il y crèche encore, il s'y ferait sans trop de mal. A peine s'était-il demandé par où il devait marcher que le chemin se présenta de lui même. Quelques croisements, quelques barrières et puis la dernières ruelles, la planche de bois, le petit passage et finalement le très vaste et résonnant appartement avec vue sur le centre ville délabré. Sa mémoire était parfaitement réglée. Arrivé devant la dite planche de bois protectrice, il frappa quelques coups avec la crosse du révolver qu'il avait sorti parce que... parce qu'on ne sait jamais.... . De suite il enchaina :

- Quelqu'un ?, dans l'espoir que la douce voix zen et calme de Majoren lui fasse écho.

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Dans la sorte d'appartement où vivait à présent la jeune brune depuis quelques mois, le calme était presque désespérant. C'était peut être ça qui la poussait à sortir plus et à être de moins en moins présente dans son chez elle. Mais ce qui était sûr, c'était qu'elle dormait maintenant. Et elle ne fumait plus ... de cigarettes. Ainsi, rentrant chez elle à six heures du matin, pour les soirées les plus longues, elle pensait parfois à s'écrouler sur le seul lit branlant de son grand chez elle. Elle pensait de plus en plus à chercher un moyen légal de se faire de l'argent pour l'aménager un peu plus, pour le cas où, comme c'était déjà arrivé, elle devrait héberger quelqu'un. D'ailleurs, ce quelqu'un, cela faisait un bon bout de temps qu'elle ne l'avait plus vu, et elle se demandait assez souvent si il allait bien. Elle se fichait de ce qu'il faisait, c'était son histoire, et elle n'aimait pas se fourrer dans les vies des autres, puisqu'elle ne voulait pas qu'on s'amuse à s'immiscer dans la sienne. Ceci dit, en tant que rare ami considéré comme tel dont elle clamait le statut, il était légitime qu'elle pense un peu à lui, vu qu'elle ne l'avait plus vu depuis un certain temps.

La vie chez elle était devenue monotone à vrai dire. C'était toujours le même refrain. Elle sortait aux alentours de six heures, squattait un peu n'importe où et s'occupait comme elle en avait le secret jusqu'à très tard dans la nuit, ou le matin, et dormait, ou pas. Ce jour là, elle avait dormi, très peu tout de même. De quoi subvenir un minimum à son manque. Elle se haïssait de plus en plus. Elle ne savait pas si c'était la solitude, l'ennui où le manque, mais elle s'était remise à la drogue. Elle ne se piquait pas, c'était bien la seule chose mauvais qu'elle n'avait pas faite. Quand elle prenait du recul, elle se trouvait pathétique, et ne souhaitait plus recommencer, mais c'était plus fort qu'elle, et elle détestait au plus haut point ceux qui font des crises de manque devant elle. Mais passons.

A ce moment là de la matinée, il n'était pas très tard, elle était réveillée, et sortait à peine de la douche. Elle s'était vêtue simplement, puisqu'elle ne sortirait pas ce jour là. Ou alors juste de quoi prendre l'air dehors cinq minutes. Elle était assise sur son lit, les genoux pliés, les bras enroulés autour et la tête dans le tout. Elle avait une drôle d'impression, comme si elle sentait que quelqu'un s'approchait, qu'une personne venait dans sa planque. Bien entendu, Majoren tentait de se raisonner, c'était impossible. Comme l'avant veille, elle passerait la journée seule dans son appartement vide, et trouverait, ou pas, quelque chose pour s'occuper. Elle se laverait trois fois, se brosserait les dents un même nombre, rangerait tout, trierait des choses inutiles à trier, comme une petit femme au foyer attendant le retour de son mari qui, pourtant, avait fui avec sa secrétaire. La solitude et l'ennui réveillait parfois un côté maniaque, peut être. Pour être franche, elle n'attendait plus rien, mais cette impression persistait. Et puis, elle l'entendit.

Majoren entendit un bruit, comme si on frappait sur la planche de bois qui servait de porte, en quelques sortes, à l'appartement. Ce n'était pas comme si on frappait avec la main, mais avec un objet. Un flingue ? Etait-ce les flics qui venaient la déloger, ou pire, l'arrêter ? Elle pensait pourtant que depuis plusieurs mois ils avaient abandonné la chose, ne trouvant personne. Il y avait prescription. De toutes façons, ils n'avaient pu avoir aucune description des deux jeunes, même pas les vêtements. Comment avaient-ils fait pour revenir jusqu'à elle ? Elle finirait au trou sans avoir pu voir qui que ce soit ? Mauvaise fin. Elle n'entendit cependant pas la voix qui appelait, celle d'Erwann, évidemment. Elle prit son propre revolver et descendit à la soit disant porte, puis écarta la planche, son revolver pas très loin de sa joue. Et elle le vit, enfin. Elle le reconnut directement, logique. Elle avait attendu de le voir depuis suffisamment longtemps pour croire à un rêve, aussi, elle se marcha sur le pied. Aïe. Elle jeta le revolver qu'elle n'avait pas armé sur le sol, plus loin, et fit signe d'entrer au brun, un air amusé devant son revolver.

- On stresse ?

Elle le tira par le bras pour le faire entrer et, une fois la planche revenue en place, elle fit ni une ni deux, ne lui laissant même pas le temps de parler, bouger ou même respirer, et l'enlaça. C'était une personne bien trop particulière pour qu'elle fasse ses chichis habituels, il y avait longtemps qu'il était passé au dessus de son espèce de conditionnement.

[ Et voilà, fallait bien que j'te saute dessus x)]

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L'endroit était plus ou moins identique à lui même. La ruelle semblait nocturne, même si on était en pleine matinée. Les bruits résonnaient comme si Erwann se trouvait dans une longue galerie d'art. D'ailleurs il se sentait un peu comme un gardien de musée qui avait parlé à un tableau ou une statue : seul et définitivement idiot. C'est vrai qu'en y réfléchissant, il était peu probable que l'appartement -la planque- était resté entre les mains de la brune. Dans une ville tout bougeait à une vitesse ahurissante, tout le monde se brassait. Majoren avait déjà dû foutre le camp pour effacer les traces de son passages. Erwann s'y était fait, s'y était préparé, et il savait que si ça avait été le cas, il aurait pris possession des lieux, si toutefois on ne l'avait pas doublé.

Mais toutes ces pensées et ces soucis de propriété disparurent en un éclair, juste quand le canadien aperçut le visage de son acolyte. Physiquement, elle n'avait pas beaucoup changée, même si quelques traits sur son visage laissaient penser que ses conditions de vie ne favorisait pas une santé parfaite. Ou peut-être était-elle simplement fatiguée, usée par une nuit de cavale à travers les rues, ou par une nuit à renifler des substances poudreuses. En fin de compte, elle était égale à elle même.

Lorsqu'il pénétra entièrement dans la pièce, l'odeur et la pénombre le firent frissonner d'un souvenir frappant, celui de des mêmes personnes, blessés et atrophiés, s'effondrant sur le lit après une nuit dans un endroit tel l'enfer, la chaleur en moins. Erwann trouvait que, contrairement à Majoren, l'appartement avait beaucoup changé. Il y avait déjà plus d'ordre et on sentait comme un souci de propreté -ce qui le surprenait beaucoup de la part de la japonaise. Les étagères, le sol, tout était plus ou moins acceptable. L'air sentait moins l'humidité, mais ça peut-être était-ce uniquement la faute de l'été bouillant qui planait sur la ville. Devant ce spectacle réjouissant, Erwann devina que la brune avait passé beaucoup plus de temps ici que dehors. Il pensa aussi que peut-être elle avait l'intention de se poser de façon nette et précise dans la planque. « Tant mieux », pensa Erwann tout en lâchant un long soupir de soulagement intérieur.

Entre temps, il avait retrouvé la Majoren qu'il avait quitté, quelques mois plus tôt. Il ne fut pas à proprement parlé surpris par le fait qu'elle s'engouffre dans ses bras (un truc qu'ils commençaient à faire à chaque fois qu'ils se voyaient d'ailleurs), mais il fut plus rassuré : oui, en fin de compte il avait peut-être manqué un peu à quelqu'un durant son absence. De plus, il s'était convaincu que si elle ne l'avait pas serré fort, lui l'aurait fait, au risque de laisser sa fierté dans la rue. Car il n'y avait pas de plaisir plus plaisant que de sentir du vivant se presser contre soi, de sentir ce petit cœur qui s'obstinait toujours à battre, et parfois à bouillir pour le plaisir d'une présence. Ah oui, ça, elle lui avait manqué cette petite brune. D'ailleurs il ne manqua pas de lui dire, après tout, il avait évolué en bien pendant sa petite excursion :

- Tu m'a manqué de façon notable tu sais, avoua-t-il en la serrant toujours aussi fort.

Alors qu'il sentait avec grand soulagement le parfum relevé de la chevelure brune de la japonaise, il remit en place la gâchette de son arme dans une position plus sécuritaire. Il ne fallait pas bousculer les habitudes et il fallait garder sa lucidité clairvoyante. Ça serait plutôt con de se tirer une balle dans le pied sans vraiment le vouloir... .

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Si la relation et la situation entre les deux personnes, à savoir Erwann Et Majoren, étaient dans un feuilleton télévisé, la brune aurait trouvé cela répétitif au possible. A chaque fois qu'ils se voyaient, ils finissaient dans les bras l'un de l'autre. Ceci dit, c'était sans doute parce qu'il était toujours là aux moments extrêmes, lors de ses rares moments de faiblesse, et à force, il était carrément devenu la cause de cette faiblesse, bien qu'elle ne la regrette pas. Ce n'était pas seulement la chance et le fait qu'il aie été au bon endroit au bon moment qui fit que le brun était devenu cher à la jeune fille, c'était aussi sa personnalité et sa façon de voir les choses. Sans cela, elle l'aurait envoyer paître comme n'importe quelle personne, le soir où elle lui montra son manque d'amitié et d'affection, dans la chambre 39. D'ailleurs, même si c'était un lieu plein de souvenirs pour la brune, elle ne pensait pas y retourner. Elle se sentait toujours un peu oppressée dans cette salle. Elle aurait préféré que tout se passe dans sa planque ainsi, elle aurait pu avoir plus de souvenirs à se mettre sous la dent lorsqu'elle passait ses journées ici. Mais maintenant, elle ne voyait pas de raison de vouloir se rappeler de quoi que ce soit. Il était là, et c'était cela qui comptait.

La seule chose qui la faisait réfléchir à ce moment là, était de savoir si il était seulement passé la voir, récupérer une ou deux affaires, ou si il comptait vraiment habiter ici pour quelques temps. C'était sans doute égoïste de sa part, mais elle espérait vraiment que la deuxième solution était la vraie. Elle avait tout simplement envie de savoir qu'il était là, même sans lui parler, sans le voir en face véritablement, sans le toucher, juste savoir et sentir sa présence.

- Tu devines bien que toi aussi ... Lacha-t-elle dans un simple soupir court et bref.

En disant cela, elle s'était un peu mise sur la pointe des pieds, car malgré tout, elle était plus petite que lui, et c'était à peine si elle arrivait à caler sa tête sur son épaule. Elle avait fourré sa main dans les cheveux bruns du jeune homme, et fermé les yeux. Ca faisait longtemps, trop longtemps. La dernière fois, elle n'avait pas pu faire cela, au risque de le blesser, physiquement. Ce "gros calin" ne pouvait pas durer des heures alors elle se décida à le laisser respirer. Après tout, si il mourrait étouffé maintenant, elle s'en voudrait toute sa vie. Elle le lâcha donc lorsqu'elle sentit que l'étreinte se faisait moins forte et, glissant toute fine entre ses doigts, elle recula, d'un ou deux pas, et, ses yeux emplis d'un espoir qu'elle ne savait contrôler, elle lui posa la question qui lui parut fatale.

- Tu ... vas rester, ou tu passes juste ?

Ses bras le long du corps, elle se faisait claquer les doigts, ne cillant pour rien au monde. L'appartement était un peu sombre, et la ruelle l'était aussi, ce qui plongeait tout cela dans une ambiance assez étrange, qui la plongea dans une mélancolie qu'elle n'aurait pas soupçonnée. Malgré ce, elle se sentait chez elle dans cette mélancolie. Et la brune ne pouvait s'empêcher d'être un peu tendue en attendant cette réponse.

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Erwann se trouva gêné. C'est vrai que... arriver comme ça de nulle part et s'imposer aurait été très malpoli. Voire même emmerdant. Mais malgré tout, il se sentait particulièrement bien dans cette planque. Il pensait même qu'il s'y sentait chez lui, ce qui était plutôt égoïste vu qu'il ne payait aucunement la taxe d'habitation. Mais après tout, Majoren non plus... . Alors oui pourquoi pas. Pourquoi pas rester quelques jours ou quelques années, peut importe. Si une chambre lui conviendrait au pensionnat, il s'y réfugierait dès que possible. De plus, Maj' avait demandé ça avec tellement d'entrain et d'espoir qu'on aurait pu croire qu'elle aurait préféré la première option, c'est à dire un retour machiavélique à la collocation.

- Euh... si tu m'ouvres les bras comme ça je dis pas non.

Ce n'était pas vraiment une colloque comme ils l'avaient vécu un an et demi plus tôt, cette fois ci, c'était la vraie vie, avec quelques petits soucis et même des gros problèmes. Une chose aussi différait, c'était le rapport entre Majoren et Erwann. Le canadien se rendait bien compte que vivre 24 heures sur 24 avec la japonaise dans l'intimité totale changeait d'une simple cohabitation dans un dortoir humide.

Erwann observa les yeux pétillants de la brune, puis il regarda l'appart avec plus d'admiration pour la décoratrice. Ses yeux se posèrent sur ce qui ressemblait à un sofa quelque peu vieilli, où on aurait qu'une tribu de chat avait élu domicile. Comme pour briser l'émotion active qui planait un peu dans la pièce, et aussi pour faire redescendre un peu tout le monde sur terre, Erwann ironisa, prenant la voix d'un enfant impatient :

- C'est moi qui prend le canapé !

Puis, redevenant un peu plus sérieux, et ramenant son regard vers celui de la brune :

- J'te jure, j'me ferais tout petit.

C'est vrai qu'il se ferait tout petit, et même si pour cela il devait dormir sur une chaise pour bébé. Ce n'était pas un vorace qui bectait tout ce qui passait, loin de là, ce n'était pas non plus un maniaco-hygiénique qui se lavait toutes les heures. Il saurait être silencieux et rentable. Il pouvait se faire facilement l'équivalent de cent dollars par jour en revendant ses petits bonbons blancs. Et surtout, ce n'était pas un aimant à gonzesse, il ne risquait donc pas de transformer l'endroit en garçonnière fumante.

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D'un côté, la brune avait l'impression de revenir quelques temps en arrière, où ils se voyaient assez régulièrement, et où les relations étaient amicales, presque joyeuses, bien que ça ne soit pas évident au premier coup d'oeil, mais d'un autre côté, elle était sûre que cette collocation nouvelle changerait les choses du tout au tout. Même l'appartement avait changé avec le temps, et, bien que de l'extérieur il paraisse aussi délabré et miteux qu'avant, à l'intérieur, il était plutôt vivable. Elle n'avait certes pas repeint les murs, mais elle avait colmaté ce qui pouvait être colmaté. Le toit était moins détruit, et les fuites n'étaient plus, et les odeurs de vieux et de moisi étaient parties aussi. Peut être inconsciemment, elle avait fait cela en avait fait tout cela dans l'espoir du retour ou d'une collocation avec quelqu'un, même si ça n'avait pas été Erwann. Bien qu'elle ne veuille pas se l'admettre et l'avouer à elle même, elle se sentait seule, et s'ennuyait profondément. Peut être que ce n'était pas le besoin de voir des gens, peut être était-ce juste l'envie de trouver quelque chose pour s'occuper.

-Eh, je t'ouvre pas les bras ! ... je te rends juste service parce que t'aurais pas osé me demander.

Évidemment, c'était faux, mais la brune devait garder sa fierté, sinon que deviendrait-elle ? Ça n'était certes pas crédible, mais Erwann savait qu'elle le faisait exprès. Il fallait bien détendre l'atmosphère qui, bien que n'étant pas tendue, n'était pas forcément pour mettre Majoren totalement à l'aise. Elle n'était pas habituée à être généreuse comme ça puisqu'elle l'était uniquement avec les gens qui lui étaient chers... Autrement dit pas grand monde.

- Tu prends ce que tu veux ! Même le lit si ça t'arrange. D'ailleurs, je l'ai changé.

C'était d'ailleurs pour ça qu'elle dormait à présent. Elle avait un beau lit, deux places, 200x200, qui prenait pas mal de place dans la chambre et qui, donc, avait valu le déplacement de quasiment tout ce qui avait dans la pièce avant. Ne cherchons pas par contre où elle avait trouvé les sous. C'était son petit secret à elle. Entre un travail et des choses pas légales et pas catholiques, elle avait réussi à se faire pas mal d'argent en si peu de temps. Lorsqu'elle releva les yeux qui faisaient le tour de la pièce depuis quelques secondes, pendant qu'elle parlait, comme si elle cherchait ses mots, elle vit qu'il était redevenu sérieux, et que le ton qu'il emploierait dans la phrase qui suivrait ne serait pas le même. Qu'il se fasse petit ou pas, elle s'en fichait. Du moment qu'il ne la dénonçait pas ou quoi que ce soit du genre, ça irait. Il pouvait même ramener des filles dans son lit, ou son canapé, il pouvait faire des réunions d'alcooliques anonymes ou quoi que ce soit, elle s'en fichait pas mal. Ce qu'il ne ferait jamais, c'était bien cela qu'elle aurait pu craindre. Elle se dirigea vers le frigo, branché clandestinement sur l'électricité des voisins qui ne s'apercevaient de rien, puisqu'il s'agissait de leur maison secondaire, et l'ouvrit.

- Que tu te fasses petit ou pas, t'es chez toi, tu te doutes bien. C'est comme à la maison, tu fais ce que tu veux, même une soirée de beaufs ça me gêne pas. Tu veux boire quelque chose ?

Majoren n'avait pas beaucoup de choses à boire, juste de la bière, de l'eau, un soda quelconque et ... une bouteille de vodka qu'elle préférait cacher au fond, derrière les rares denrées alimentaires qui restait. Malgré tout, si il voulait trinquer avec elle, pourquoi pas, elle l'accompagnerait.

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Erwann n'en attendait pas moins de Majoren. Bizarrement, dès lors qu'il avait prononcé ses paroles, il se faisait une idée de la réponse, à quelques détails près, que la brune ferait. C'était comme ça, il ne savait trop l'expliquer objectivement. Peut-être il agissait sur les deux une force de télépathie démente qui les liait et qui les empêchait de se cacher certaines choses. Ou peu-être tout simplement se comprenaient-ils plus facilement que les autres, peut-être s'animait-il quelque chose dans leurs regards, au fond de leur yeux et qui transmettait tous les messages possibles et imaginables. Il lâcha son grand sac sur le sol, non loin du lit gigantesque dont Erwann évaluait la place possible à au moins quatre personnes. Le bruit du sac qui tombait nonchalamment serait certainement le signe d'un futur désordre d'adolescent dans la pièce. Sans se tourner vers elle, regardant avec curiosité l'aménagement de l'endroit, il répondit :

- J'viens de passer une longue semaine sur un cargo, j'avoue que j'ai pas très soif.

Ça par contre c'était vrai, il était dégouté de tout ce qui ressemblait de près ou de loin à de l'eau et ça pour quelques temps. C'était le douloureux (très en effet) prix d'un trajet gratuit et totalement secret. Il avait fait un sale temps presque tout le temps. Erwann n'en garderait pas le souvenir touristique d'une croisière s'amuse. Mais bon, il était arrivé à bon port, c'était le principal. Il se trouvait assez chanceux d'ailleurs. Chanceux d'être parti dans le silence le plus total, chanceux d'avoir su garder son identité secrète jusque là, chanceux de ne pas avoir fini au trou ni effacé par la pègre de Tokyo, chanceux d'avoir Maj' au fond.

Le brun s'effondra sur le canapé dans un fracas de cuir et de tissu. Il se sentait quelque peu las et usé, moins frais en tout cas qu'en débarquant ce matin. Peut-être cet appart manquait-il un peu d'aération, de quelques courants d'air refroidissant l'été mais colmatable l'hiver. Erwann sembla soudain très posé et très sérieux. Il songeait à la vie qu'avait vécu Majoren ici entre le temps où il avait disparu et son retour.

- T'as pas eu d'ennuis à cause de... ce qui s'est passé dans la boutique ?

Il parlait un peu pour lui même, il se doutait qu'elle n'avait pas due être atteinte, sinon elle ne serait peut-être pas dans cet état là, et elle n'aurait certainement pas apprécié le fait qu'Erwann foute le camp et la laisse seule ici avec les problèmes qu'ils avaient déclenchés. Mais peut-être avait-elle des renseignements intéressants : pourquoi on leurs avait tiré dessus à vue sans prévenir, et surtout, si ceux qui avaient fait cela savaient à qui s'attaquer, pourquoi les autorités n'avaient pas retrouvé ni Erwann, ni Majoren. La planque était bien cachée certes, mais les âmes, elles, n'étaient pas introuvables... . Erwann était légèrement perturbé, ce n'était pas une affaire réglée.

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La japonaise était un peu étonnée de sa réponse, elle même si elle revenait d'un voyage, elle n'aurait envie que de quelque chose pour se rafraîchir le gosier mais il était assez logique que, s'il avait passé une semaine dans un cargo, oui, c'était normal qu'il n'aie pas envie de voir, de près ou de loin, quelque chose qui soit liquide et qui ressemble à de l"eau. Décidant donc de ne pas risquer d'être dans les vapes toute seule, elle ne prit pas la vodka, et sortit plutôt l'une des deux dernières cannettes de soda qu'il restait. Fermant le frigo d'un petit coup de pied, elle se retourna du même coup, le tout en ouvrant sa cannette, enchaînant avec une longue gorgée. Elle avait très soif, même si l'appartement était encore un peu humide. Peut être l'émotion, elle ne le savait pas, mais sa gorge était sèche. Pendant qu'elle avalait, il lui demanda si elle n'avait pas eu d'ennuis. Pas tellement, elle avait su se faire discrète. Elle entreprit donc de lui expliquer tout ce qu'elle savait et un peu de ce qu'elle avait vécu, même si elle redoutait ce moment depuis qu'elle était arrivée.

- Tout dépend de ce que tu appelles ennuis. Disons que j'ai pu apprendre pourquoi on nous avait tiré dessus. Un gars qui en a après nous, un ami commun je suppose, avait décidé de sauver sa peau en balançant anonymement des informations fausses à la police, comme quoi on était de dangereux criminels récidivistes, enfin tu vois quoi. Ils ne voulaient pas nous laisser nous échapper. J'ai réussi à obtenir la tranquillité pour nous deux, moyennant quelques ... services, durant ton absence. C'était soit ça, soit tu revenais pas vivant. Ceci dit, je pense que ça n'a pas été suffisant, alors je fais quand même gaffe, toujours un peu. Tu devrais faire de même, même si ça fait pas mal de temps que j'ai pas de nouvelles d'eux.

Ce qui n'était pas pour lui déplaire. Régler ses affaires autrement que par la distance ou la bataille était quelque chose qui lui déplaisait fortement. Ce genre de chose, elle ne voulait le faire que si elle le voulait bien mais, après tout, elle l'avait voulu, pour sauver sa peau et celle du brun. Elle alla s'asseoir sur le canapé, et prit une autre longue gorgée de son soda à la pêche avant de poser la cannette presque vide sur le sol. Autant d'habitude elle ne finissait pas une boisson aussi vite, autant là, la soif l'avait vraiment poussée à laisser ses habitudes de côté. Un peu honteuse de sa révélation sans vouloir le montrer, elle ne regarda pas Erwann dans les yeux.

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Erwann, malgré tout ses efforts les plus travaillés, ne pu se retenir. Il lâcha un long soupir de soulagement intérieur, et un très long soupir extérieur. Il ferma les yeux, souffla, et laissa échapper un tout petit « ouf » pour bien assaisonner le soupir. Il était soulagé, et ça se voyait quand même pas mal, que rien ne soit arrivé à la brune durant son absence de part sa faute en partie. Soulagé aussi, que tout ça soit plus ou moins terminé. Pas tout à fait en fait car Erwann s'était juré de choper le vrai responsable et de lui administrer un coup de lame castrateur par inadvertance [=D]. Mais pour l'instant, il fallait s'occuper de sa réinsertion dans la vie de Tokyo, ce qu'il comptait bien faire dès que possible en faisant la tournée des bars où il y avait quelques vieilles connaissances à lui. C'était le meilleur moyen de faire savoir qu'on est de retour, sans pour autant le crier des toits. La rumeur est la meilleure des introductrices.

- C'est bien, dit-il enfin, mais je garde quand même ça près de mon cœur.

Il parlait du flingue. Il l'avait sorti, le tenait bien en main, doigt juste au dessus de la gâchette. Il l'observa longuement, comme s'il tenait le Graal entre ses doigts, faisant tourner son poignée comme une manivelle. Puis visant droit devant lui vers le mur d'en face, fermant un œil tel un vrai sniper, il appuya sur la gâchette. Pas de coup de feu bruyant et malodorant. Juste un « clic » qui rappela à Erwann le désagréable bruit qu'avait fais la nuque du flic lorsque Majoren lui était tombée dessus. Bien sûr que cette arme n'était pas chargée... du moins pas pour l'instant. Les balles qu'il avait était dans la doublure du fond de son sac. Il avait racheté à un clochard au Canada une sangle pour ranger le flingue au frais. Exactement comme n'importe quel poulet aurait faisait. C'était tout de même plus classe et plus pratique que de le glisser dans sa ceinture et de prendre le risque de s'émasculer à chaque fois qu'il dégainerait.

Il rangea son jouet, qui n'en était pas vraiment un. Il posa ses yeux sur sa voisine de canapé. Elle semblait... étrange du moins pas dans son entière assiette. Elle avait toujours fait comme une mine bizarre, c'est ce qui faisait d'elle sa vraie personnalité d'ailleurs. Mais là, Erwann sentait quelque chose d'étranger, même si ça restait tout de même assez discret. Elle ne le regardait pas. Erwann se tourna un peu plus, s'approcha de façon imperceptible, et déposa sa main sur celle de la brune. Il enchaina sur un ton beaucoup plus solennel, pressant sa main un peu plus fort pour que la japonaise donne un signe de réponse et dit :

- T'es... t'es sure que ça va ?

Le canadien savait qu'elle allait mentir. Ou au moins, il savait que tant que son petit doigt lui disait qu'elle mentait, c'est qu'elle mentait. Il n'était pas question de se laisser aller, surtout pour elle -c'est certainement ce qu'elle se disait. Mais le brun savait qu'il pouvait passer au dessus de ça, il l'avait déjà fait.

Invité

[Haha]

Jamais Majoren ne se serait doutée que faire ce qu'elle faisait habituellement pour son propre plaisir de tuer son ennui, pour une fois, pour quelqu'un d'autre lui donnerait cette impression étrange. Mais la tristesse, ni la mélancolie, ni même la colère, juste l'impression que même si ça a servi a quelque chose, même si on ne regrette pas vraiment, on se demande pourquoi on l'a fait. Elle avait "rendu des services" pour sauver sa peau et celle de son ami. Et après ? Elle ne pouvait pas distribuer des coups avec effet boomerang débrayable a tout le monde. Qui plus est, il s'agissait d'une personne assez influente qui avait des amis partout prêts à tout pour le venger, et même elle qui pourtant avait sa réputation et pas mal d'"amis" aussi ne pouvait rien y faire. Jamais elle n'avait imaginé tomber si bas, mais après tout, c'est peut être ça l'amitié, dans un sens, on fait des cadeaux, mais uniquement des cadeaux à sa portée. Certains sauvaient la vie de ses amis par des actes héroïques, elle, elle s'offrait dans l'ombre à de drôles de pratiques. Tandis qu'elle réfléchissait, son esprit était ailleurs, et elle n'entendait plus le bruit des voitures dans la rue, ni des chiens qui aboyaient dans la rue d'à côté. Si le coup de feu était vraiment sorti, elle serait peut être sortie de sa léthargie. Elle ne revint sur Terre que lorsqu'elle sentit la main d'Erwann sur la sienne. Ca n'était certainement pas sa propre main ou celle d'un chat, alors elle en réfléchit pas plus longtemps, et tendit l'oreille. Il lui parlerait sans doute, plutôt que d'attendre que la discussion se fasse, ou que quelque chose, n'importe quoi, arrive.

- En toute franchise, je sais pas. C'est la première fois que je fais ... enfin, que je rends ce genre de service pour autre chose que mon propre amusement. Je te jure, ça fait vraiment bizarre je me sens ... Salope.

Elle aurait pu dire sale, souillée, impure, mais c'était bien loin de la vérité. En plus, elle l'était déjà, ce n'était que maintenant qu'elle s'en rendait compte, alors forcément c'était plus frappant. Qui plus est, elle n'avait pas l'habitude de parler de ses états d'âme, de ce a quoi elle pensait, surtout concernant sa propre personne. Sinon, tout le monde aurait confirmation sur ce qu'ils pensaient, puisqu'elle pensait pareil, mais s'en fichait, habituellement. Elle ne put s'empêcher de saisir la main du brun, sans vraiment s'en rendre compte, comme si c'était un réflexe, puis baissa la tête, comme si elle ne voulait pas le regarder, et en quelques sortes voir ses yeux.

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Erwann réalisa pendant un instant ce qui s'était passé. « Salope ». Un mot, un seul, un ultime mot lui restait bloqué dans la tête, ce mot appelait bien d'autres mots, voire pire, il appelait des idées, des scènes d'imagination dont le brun se serait bien passé, par respect et par pudeur pour la japonaise. C'était sûr pour lui, elle avait beaucoup trop donné durant cet été pour ne recevoir que les miettes. Erwann trouva ça... injuste et totalement dégueulasse de la part des enfoirés qu'elle avait « satisfait ». Ce genre de service là ne devrait jamais être rendu. Majoren n'était déjà plus vraiment la même, peut-être à l'intérieur, il y avait quelque chose de cassé, de coupé voire pire, de déchiré. Erwann ne su quoi dire.. il se sentait coupable, affreusement coupable. S'il n'avait pas été là, rien de tout ça ne serait arrivé. S'il était mort dans ces ruines, elle n'aurait pas dû faire ça. Une rage soudaine lui monta au nez comme une moutarde tournée au soleil. Il sentait que Majoren pressait sa main, mais sentait aussi qu'elle avait certainement besoin de plus que ça. Lui ne bougea pas, mais doucement, lentement, dans un mouvement aussi fluide qu'un baiser, il ramena la brune vers lui. Elle gardait la tête baissée, légèrement recroquevillée. Une fois qu'il eut posé sa tête contre son épaule et entouré ses bras autour de son torse, il la serra plus fort que jamais, frottant sa joue contre les cheveux ébènes de Maj'. Il en était sûr désormais, non, ça n'allait pas si bien que ça. Et ça n'allait pas aller en s'arrangeant. Elle souffrait, et fatalement lui aussi. Erwann regarda le révolver posé sur le sol juste à côté du sofa. Sans quitter des yeux ce fidèle compagnon, il affirma, pour elle, pour lui-même mais aussi pour le monde entier :

- Je vais les déchiqueter.

Que dire d'autre si ce n'est les mots qui s'affichaient nettement dans ses yeux. Peut-être qu'ils étaient forts ou puissants, peut-être qu'ils bavaient de chérir leurs petits enfants. Rien à foutre, s'il le fallait, ils crèveraient devant leurs familles. Une vie gâchée en vaut une, c'était la règle. Les esprits à ce jours étaient apaisés, tout le monde croyait que cette affaire était finie. Par un moyen ou un autre, il règlerait ça à sa façon. C'est à dire pas orthodoxe du tout. Il était tant de remettre une fois de plus les points sur les i, jamais ils ne se laisseraient faire. Jamais. Au coin de l'oreille de la japonaise, Erwann murmura dans un ton de désarrois extrêmement profond :

- Je suis désolé.

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C'était vraiment la chose qu'elle regrettait le plus dans sa réaction. C'était prévisible, mais ça n'empêchait qu'elle le regrettait pas mal. Elle ne voulait pas de ça, des excuses. Ni même une envie de vengeance. Ca ne faisait qu'attiser sa propre culpabilité. Elle s'en voulait d'avoir fait ceci, même si sans ça elle même ne serait plus en vie. Par la même occasion, elle avait pensé à lui, mais si il s'approchait d'eux, il gâcherait tout, et ça aurait servi à rien. Elle ne voulait pas qu'il se sente coupable car si elle l'avait fait, elle le voulait bien. Elle faisait ça habituellement, sans s'en rendre compte, mais ça ne servait à rien, et si pour une fois ça pouvait servir, pourquoi pas ? Même si c'était le seul gars avec qui elle ne risquait pas de faire ce genre de choses, elle l'avait fait quand même, ça n'avait rien changé, il y avait juste ce dégoût d'elle même qui persistait mais qui, à force de temps et d'événements, partirait. Peut être qu'une amitié ou autre, peut être que cela permettrait de passer ce goût amer dans sa bouche qui déformait la saveur de tout ce qu'elle mangeait et buvait. Elle avait beau se laver les dents plus que de raison, ça restait, et régulièrement, elle avait des nausées. La cause n'était certes pas un quelconque enfant, dans ce cas là elle ne serait plus en vie, même si elle ne l'avait pas vérifié, elle était certaine qu'elle ne pouvait porter un tel bâtard. Non c'était plus les nausées lorsqu'un mélange, un genre de cocktail de toutes sortes d'émotions trop fortes viennent dans la gorge. Elle ne risquerait pas de vomir sur le plancher, alors elle se contentait de serrer Erwann dans ses bras sans doute plus que de raison.

Se rendant compte qu'à chaque fois qu'elle le voyait ça finissait ainsi, et ayant l'impression qu'elle profitait presque de lui dans ce sens, et qu'il finirait par se lasser, la brune s'écarta, sans attendre aucune faiblesse dans l'étreinte. Majoren donnait presque l'impression de le rejeter en quelques sortes, sauf que c'était elle même qui se rejetait toute seule. Elle se leva et se dirigea vers son revolver. Tandis que, l'ayant pris et en allant le poser sur le frigo, elle s'adressa au brun.

- Si je l'ai fait c'est parce que j'ai bien voulu le faire. T'as pas à t'excuser, ça sert à rien.

Son ton était presque pressant, limite stressé. Elle n'aurait pu rester calme dans cette situation elle ne savait pas trop pourquoi. Plus les secondes passaient quand elle était proche de lui, au plus elle se sentait stressée, et Majoren ne savait plus trop quoi faire. Elle ne voulait pas le planter là et profiter le plus possible de sa présence, mais essayait le plus possible de le laisser éloigné d'elle, sans trop savoir pourquoi. Alors, sans doute devant les interrogations du brun, elle s'assit sur le sol, avec une expression qui donnait l'impression que c'était son voeu le plus cher, et tenta de faire un sourire, qui était plutôt par alternance, comme quelqu'un qui essaie pour la première fois. Après trois ou quatre tentatives, elle abandonna.

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L'analogie était flagrante. La chambre dans le pensionnat, l'appartement une première fois, puis là une deuxième. C'est vrai que ce genre de situation se produisait souvent. Erwann ne s'en lassait pas, mais en général, les causes de ce genre de situation faisaient tâche. Pourtant cette fois ci, pas de larme et pas de regrets. Lorsqu'elle se dégagea, le brun sentit l'amertume qui habitait Majoren. Peut-être se disait-elle des tas de « tant pis » qui lui suffisaient. Peut-être elle se chargeait de se convaincre qu'elle avait fait le bon choix. En tout cas, rien de tout ça ne suffirait à Erwann. Une corde sensible venait d'être touchée, une bombe A venait d'être larguée, et là, les retombées allait certainement faire mal.

- Tu m'empêcheras pas de lui mettre un pruneau là où j'pense en me faisant croire que tout va bien. Tu pourras pas non plus m'empêcher de culpabiliser, c'est comme ça.

Le canapé lui semblait beaucoup trop profond, beaucoup trop gênant. Il se leva, abandonnant ses idées de repos, et regarda la japonaise, assise sur le sol, qui regardait vers nulle part. Sans rien attendre de sa part, voyant qu'elle agonisait de l'intérieur là juste devant lui, il pris son grand sac, le déposa sur le sofa pour gagner de la hauteur, fouilla à l'intérieur et attrapa un chargeur plein de 9mm. Il regarda un instant l'objet. Si petit dans la forme mais immense dans le fond, un peu comme l'esprit de son amie. Elle ne le méritait pas, même si c'était trop tard, elle ne méritait pas d'en souffrir. Il savait qu'elle n'apprécierait pas cette attitude de grand frère vengeur, mais tant pis, tant pis pour elle, tant pis pour tout.

Il marcha vers le frigo, passant juste à côté de la brune, se saisit du révolver consciencieusement, défiant l'autorité de la propriétaire des lieux, enleva le chargeur vide qui tomba sur le sol comme une pomme trop mûre, et le remplaça. Pour achever le tout, il tira sur le canon un coup sec pour faire monter la première balle dans celui-ci. Il le rangea enfin dans sa veste sans omettre la sécurité.

- Je n'aurais pas de mal à savoir qui il est, à le trouver, à savoir s'il a des personnes qui lui sont chères ou n'importe quoi d'autre. Ça ne te soignera pas, mais ça me fera beaucoup de bien. Je dois aller retrouver quelques vieux amis pour parler affaire, si jamais ça ne va pas, tu connais mon numéro.

Il savait qu'elle pouvait se débrouiller toute seule, mais quelques fois, les migraines pouvaient être insurmontable sans la présence d'un ami. Ce rejet dont elle avait fait preuve, il ne le prenait pas mal. C'était pour lui le signe qu'il ne pouvait rien y faire. Pour le moment. Les choses n'étaient plus vraiment les mêmes. Pour la première fois, Erwann se sentit inutile, le genre de chose qu'il détestait le plus au monde. Sans un bruit, il ouvrit la porte et marcha jusqu'à l'extérieur. Il ne se retourna pas avant d'avoir accédé à la rue, de peur d'en avoir le cœur à l'envers. Une fois de plus, il partait.

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Ce départ était le pire qu'elle avait vécu. Pire que celui qui, elle l'avait pensé, était pour ne pas revenir, pire que son propre départ de sa ville natale, pire encore que celui, étendu dans le temps et l'espace, où elle partait de son enfance et son ignorance pour arriver à l'âge adulte bien trop tôt. On ne pouvait pas dire qu'elle le regardait partir comme une femme voit son mari partir à la guerre, car ça n'avait pas de véritable ressemblance profonde. Il était armé, il se battrait, mais certainement pas dans le même contexte. Elle ne savait pas ce qui lui arriverait, ce qu'il ferait, et c'était surtout ça qui lui faisait mal. Elle voulait le garder, le retenir ici, comme si la distance serait trop douloureuse, mais d'un autre côté, elle ne pouvait agir ainsi car à sa place, elle n'aurait pas fait autrement. Elle, a sa place, aurait frappé, voire même tué la moindre personne sur son chemin. C'est dire l'était dans lequel elle aurait été. C'était le même à présent. Il ne fallait absolument pas qu'elle sorte car sa rancœur mélangée à sa colère, sa culpabilité et sa tristesse tout cela mélangé pour donner une boisson immonde dans sa bouche qui lui donnait envie de vomir tripes et boyaux. Et elle préférait cela que pleurer encore. Elle avait trop fait cela et ne voulait plus se voir les yeux rougis par les larmes dans le miroir brisé de la salle de bain. Elle ne voulait pas a nouveau briser ce miroir qui en avait trop pris par sa faute. Majoren ne voulait pas non plus aller revoir de vieux amis pour chercher ce dont elle avait besoin pour oublier, oublier cette douleur qui la prenait à la taille, au vendre, remontant jusqu'à la gorge. Elle étouffait.

- Je peux pas guérir... Je suis pas malade ...

Ces paroles étaient inutiles, car il était bien parti, disparu au recoin de la ruelle. Voulant se donner une quelconque contenance, la brune se leva et se dirigea vers le frigo. Elle l'ouvrit et attrappa de la nourriture, n'importe laquelle, et mangea, très peu. Ensuite, Majoren retourna s'asseoir surle canapé où elle s'enfonça plus qu'autre chose. Quelques secondes passèrent à peine, et ce à quoi elle s'attendait arriva. Elle se leva rapidement, puis courut jusqu'aux toilettes. A peine eut-elle ouvert la porte qu'elle se retrouva la tête la première dans la cuvette, sa main droite tenant ses cheveux en l'air comme si elle laissait pendre sa tête sous sa chevelure brune et bleue. En même temps que coulait le flot, les larmes l'accompagnaient. C'était bien la première fois qu'elle pleurait autant. C'était incontrôlable, silencieux, et les chutes du Niagara étaient petites joueuses à côté de ce flot ininterrompu de sécrétions lacrymales. Lorsque son calvaire fut enfin terminé, la brune se renversa en arrière, et se retourna sur le ventre en vol. Frappant le sol de ses poings minces paraissant sans force, elle tentait de déverser ainsi sa colère. Ses mouvements courts rapides et saccadés donnaient l'impression de convulsions. Ses bras se rejoignirent sous sa tête et ses deux mains finirent dans ses cheveux tandis qu'elle pleurait. Sa respiration était tellement altérée que les seules fois où l'air entrait dans ses poumons, elle faisait le même bruit qu'un noyé revenant à la vie et dans un sens, elle l'était, juste noyée dans ses larmes.

Après dix minutes, une petite flaque de liquide commençait à mouiller ses cheveux les plus longs qui atteignaient le sol, s'échappant de ses doigts minces. Les tremblements ne s'atténuèrent pas. Une plainte commença à s'élever de son corps et de l'extérieur, devant l'appartement, on pouvait entendre un cri aigu s'élever dans la demeure. Un cri digne des plus beaux films d'horreur.

» [Libre] Manger, ou ne pas manger ... =D

Gimme a Bullet (PV Maj'-Elle va me sauter dessus!aaah!)

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