Octobre. L'automne était sec, les feuilles rouges voletaient et le ciel commençait à s'assombrir en cette fin de journée. Les premières étoiles allaient bientôt apparaître. Déjà, on pouvait distinguer quelques points lumineux à l'horizon, et les élèves finissaient de rentrer chez eux. Le lycée allait bientôt fermer, elle le savait. Mais elle restait.
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Au loin, des bruits de portes qui se ferment, de clé dans des serrures, de pas précipités. Les professeurs et le personnel de l'école partaient. Ils n'avaient plus rien à faire là. Puis le silence. Un silence lourd, oppressant. Un silence qui lui signifiait qu'elle n'avait pas le droit d'être là. Elle le savait. La pièce lui semblait plus noire, plus grande et plus menaçante. Elle n'aimait pas rester seule dans le noir. Son père lui avait dit de briller du plus fort qu'elle pouvait. Mais comment aurait-elle jamais pu briller? Elle n'avait même plus de nom! Elle n'était pas Hoshi, elle n'était pas une étoile! Pourquoi Hoshi était-elle partie? Elle se retrouvait seule, entourée par des gens qui ne demandait qu'à voir une étoile, et qui ne découvrait qu'un gouffre à la place. Et elle au fond du gouffre.
Mais qui faisait attention à elle? Non, ils voulaient Hoshi. Hoshi Hoshi Hoshi... Elle était différente. Mais ils ne voulaient pas l'admettre. Elle regardait sa famille comme des étrangers. Son père, seul, semblait se rapprocher d'elle. Ou du moins il essayait. Il l'écoutait parler, raconter ce qu'elle ressentait, elle qui n'avait plus de souvenir, il ne la jugeait pas quand elle lui disait ne même pas être sûre d'être bien sa fille. Il la regardait avec un sourire et lui conseillait de toujours briller encore plus fort, pour que Hoshi puisse revenir. Briller dans le noir, toujours plus.
Une heure, puis deux passèrent. Sans montre, elle ne pouvait que supposer, mais il lui semblait qu'il était 23h. Elle toucha son étui doucement, se demandant encore si elle avait bien fait. Elle ne voulait pas que quiconque entende son violon. Pas en ce moment. Mais il fallait qu'elle joue. La musique était encore la seule chose dans laquelle elle pouvait se retrouver, petite étoile perdue sans repère. Le morceau était simple à jouer. Mais c'était le seul qu'elle voulait interpréter dans ces moments-là. Son morceau de naissance, "Little Star". Sa grand-mère lui avait dit que la voisine l'avait composé pour sa naissance, dès qu'elle avait appris son prénom.
Elle ouvrit doucement la boîte, sans un bruit. Le violon était toujours là, fidèle. Seul être à toujours rester avec elle, seul être qui ne l'abandonnerait jamais. Elle prit son archet dans sa main droite, posa le violon sur son épaule et se leva. Debout dans la lueur blafarde de la lune qui traversait les fenêtres de la salle abandonnée, à côté du piano, on aurait dit un fantôme. Elle jeta un coup d’œil aux étoiles qui brillaient faiblement. Et doucement, elle commença à jouer. Une mélopée sortit du coffre de son instrument, doucement mais sûrement. Le morceau était un peu triste, presque nostalgique. Il semblait lui dire de laisser ses larmes couler, de soulager ce qu'elle pouvait avoir sur le cœur. Des paroles avaient été écrites pour une partie de chant, mais jamais elle n'avait pu se résoudre à utiliser sa voix. Elle finirait en sanglot si elle tentait de chanter ce qu'elle ressentait.
Et puis, petit à petit, la mélodie se libérait, s'envolait vers le ciel étoilé, plus joyeuse, presque comme une danse lente, se mêlant aux bruits de la nuit. Elle se mit à esquisser quelques pas, bougeant avec sa musique, donnant vie à ses notes, aux sons que le violon lui procuraient, comme un soulagement. Et son cœur, petit à petit, se vidait de toute cette tristesse, de tout ce que son esprit pouvait provoquer. Il n'y avait plus ni bonheur ni peine, mais au moins, si Hoshi revenait, son écrin serait propre.
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Tranquillement, elle abaissa son violon. Ses poumons s'emplirent d'air et ses mains commencèrent à trembler. C'était éprouvant de jouer ses sentiments. Mais c'était ce qu'elle appelait de la "vraie musique". Ce que personne ne devait entendre. La raison pour laquelle elle pensait que son violon avait une âme. La musique est un cri du cœur, et son cœur était si sombre qu'elle ne voulait pas que quiconque puisse l'entrevoir.
Un bruit de course. Une personne, dans le couloir. Qui courait vers sa salle.
Elle se sentit soudainement seule, très seule. Elle avait l'impression de tomber, sachant pertinemment que seule la punition l'attendait pour être restée si tard dans le bâtiment sans autorisation. Elle chercha maintes excuses, mais seule la vérité pourrait lui épargner le châtiment qui lui était réservé. Mais jamais elle ne dirait la vérité sur ces moments-là, quand elle s'installait, seule, pour faire chanter son violon. Jamais elle n'avouerait que la perte de ses souvenirs l'avait installé dans un état de mal-être insupportable. Elle s'était promis, en entrant à Ginkgo Gakuen, que jamais personne ne découvrirait son existence, ou plutôt l'existence d'un autre Hoshi. Elle pria pour que la personne coure autre part, n'ouvre pas la porte, oublie qu'elle avait entendu jouer un violon...
Mais la porte s'ouvrit.

[HJ: Désolée du style, ça fait (très) longtemps que je n'ai pas écrit, c'est un peu dur de m'y remettre. Je ferai mieux la prochaine fois, c'est promis! ><]

Mais comment faisait-il pour se retrouver dans de galère pareilles? Pourquoi diable est-ce qu'il finissait toujours dans des situations que n'importe quel être humain normal s’évertuerait a éviter comme la peste? A croire que Kaï était devenu un véritable aimant a problème depuis qu'il avait mis le pieds a Ginkgo, comme si tout les traquenards du coin, tout les emmerdes possibles et imaginables, lui étaient réservés officiellement pour son plus grand malheur. Et tout ca parce que monsieur était incapable de dire "non" ou d'envoyer simplement chier les gens de manière royale. Tout ca a cause de cette foutue épreuve de courage! Kaï n'était certes pas le plus courageux de ses camarades, et ce n'était un secret pour personne, même s'il tentait parfois vainement de le cacher derrière de faux airs de caïd... ce qui ne lui collait pas du tout a la peau, c'est évident. Durant l'épreuve de courage, Kaï avait fait particulièrement attention a ne pas crier et a ne pas geindre comme il le faisait souvent quand il se retrouvait dans une situation flippante.. c'est a dire pratiquement tout le temps! Les camarades de classe avec qui il était l'avaient d'ailleurs félicité pour ses efforts... mais avaient insisté sur le fait que c'était parce que c'était une épreuve de courage organisé et qu'il n'y avait aucuns risques, mais qu'en dehors de cet encadrement Kaï serait surement déjà partit en courant! Ce a quoi le jeune homme c'était empressé de répondre avec vigueur qu'ils se trompaient et qu'il saurait rester calme dans n'importe quelles conditions. Hum.. a bien y réfléchir maintenant.. c'était peut être pas une bonne idée d'avoir ouvert sa gueule.

Voila ce qui se passa par la suite: on le mit au défi de passer une nuit entière dans le bâtiment, seul, et jusqu'a ce que les cours ne commencent. Outre le fait que ca ne lui disait vraiment rien de rester dans un grand bâtiment tout seul toute la nuit, Kaï se doutait qu'il aurait beaucoup de mal a dormir et qu'il serait donc dans un état pitoyable le lendemain. Mais sous les regards insistants de ses camarades, il finit par accepter. S'il réussissait plus personne ne douterais de son courage et il n'aurait plus a supporter les railleries de ses camarades. Et pourtant Kaï n'était pas la tête de turc de sa classe, loin de là. Il était même apprécié, ca devait être pour cette raison que ses camarades se permettaient de le taquiner un peu. Les filles le trouvaient mignon quand il boudait, les garçons aimaient bien l'entendre donner des excuses foireuses... et au final Kaï se sentait bien dans cette ambiance. Il n'avait pas de raisons de se plaindre. Il avait des amis, qu'il taquinait tout autant lui aussi quand il en avait l'occasion, il avait une passion, il avait une vie pour le moins banale mais qui lui plaisait très bien comme ca. Alors pourquoi avoir besoin de prouver quoi que se soit?!

La fin des cours sonna, Kaï discuta quelques minutes avec un de ses camarades qui lui donna de quoi tenir une partie de la nuit: des magazines, des mangas, des chips, une bouteille de coca, quelques gateaux, une lampe torche et une petite console de jeu portable. Rajoutez a ca le mp3 que Kaï ne quittait jamais. Il devrait bien réussir a tenir jusqu'au lendemain matin! Il n'y avait plus qu'a se cacher! Ses camarades lui avaient parlé d'un placard a l'étage, que le concierge n'utilisait plus que comme débarras. Il s'y rendit donc avec la plus grande discrétion... et il attendit... longtemps... très longtemps. Il attendit l'oreille coll a la porte, attentif au moindre bruit. Et puis finalement il finit par se laisser tomber au sol, adossé au mur, il vissa ses écouteurs dans ses oreilles et ferma les yeux. Quelle idée.. vraiment quelle idée d'avoir dit oui....

.....

Kaï rouvrit les yeux, il s'était endormi... pourquoi s'était-il réveillé? La musique dans son mp3 s'était éteinte: plus de batterie. Un de ses écouteurs pendait le long de son épaule, s'étant délogé de son oreille. C'est là qu'il l'entendit, un bruit qui ne devrait pas être ici, qui n'avait rien a faire ici. Il tendit l'oreille, la plaquant contre la porte. D'ici on aurait dit... une musique... mais il était incapable de dire de quel instrument ca pouvait bien venir. Il y avait quelqu'un dans l'école? Le gardien peut être....Il jouait de la musique le gardien? Et si c'était un fantôme? ... ... ... Kaï fut parcouru d'un léger frisson et se remit debout. Mais non, impossible, les fantômes ca n'existe pas! Il devait y avoir quelqu'un d'autre... forcément. Partagé entre l'envie d'aller voir ce qui se passait et l'envie de rester sagement ici, bien caché.... il finit par tourner lentement la poignée du placard et passa sa tête dans l'entre baillement. Personne.. mais la musique résonnait. Il mit un pieds dehors, son sac sur l'épaule, rangeant son mp3 qui était devenu inutile maintenant et se mit en marche. C'était bizarre l'école de nuit, tout semblait différent, comme si les petits détails prenaient toutes leurs importances dans la pénombre. Kaï avait l'impression de ne plus rien reconnaitre avec exactitude... parfois il doutait même de ne pas voir une porte a la bonne place, ou une chaise qui aurait bougé, ou un autre détail qui faisait tache dans le décor. Il prit confiance et continua de marcher. Quand tout a coup il y eut un bruit derrière lui! Clair! Net! Claquant! Comme une porte qui se ferme avec brutalité!

Le jeune homme sursauta vivement et regard derrière lui.. rien... et pourtant il ne se sentait pas seul, pas a l'aise! Il se mit a courir, instinct de survie sans doute, dans l'esprit d'un adolescent a l'imagination un peu trop débordante! Il courait a en perdre a haleine comme si sa vie en dépendait! On était jamais sur de rien! Ca pouvait être le gardien comme un prof... comme autre chose aussi. Instinctivement il suivait la musique, comme s'il était persuadé que cette mélodie allait le protéger. Il arriva devant une porte qu'il ouvrit a la volée en y entrant vivement, refermant la porte derrière lui et s'en éloignant de quelques pas, reprenant difficilement son souffle. Il posa son sac a terre et mit ses mains sur ses genoux, se courbant un peu pour respirer de nouveau calmement. Quand il se redressa se fut pour observer la pièce.. pas bien grande, pas une salle de cours... une réserve sans doute, ou un autre entrepot, un débarras. Il observa dans tout les coin jusqu'a ce que son regard se pose sur une forme difficilement reconnaissable mais qui avait vaguyement l'apparence d'un... être humain? Kaï fit un pas en arrière en sursautant! Mais où est-ce qu'il était tombé!!!

"Y ... Y a quelqu'un?"

Fit-il d'une voix qu'il voulait sans faille mais qui tremblait légèrement. On était loin du type de mec courageux a toutes épreuves... navrant.

La porte s'était refermée rapidement. Cachée derrière le piano, elle tremblait de peur à l’idée de se faire punir par un professeur. Surtout pas ça. Elle ne voulait pas se faire renvoyer à Tokyo. Elle ne voulait plus de sa « famille » qui la regardait avec des yeux émus, l’air de dire « oh, pauvre petite, elle est orpheline de mère et n’a plus de mémoire, il faut l’aider ». Alors qu’ils ne cherchaient même pas à savoir qui elle était, si sa situation lui déplaisait réellement, si vivre avec eux était la meilleure des choses pour elle… Elle ne voulait pas revivre tout ça. Elle ne voulait pas non plus que son cas soit exposé à toute l’école, que tout le monde la juge sans même la connaître. C’était trop dur déjà de cacher sa situation en temps normal, sans qu’elle n’y rajoute encore d’autres détails.
Une respiration haletante, le bruit sourd d’un objet qui tombe au sol, une forme humaine contre la porte. Se décalant pour mieux voir, la jeune fille crut reconnaître un de ses senpais. Il avait le visage déformé par la course qu’il venait de faire, et puis il y avait quelque chose d’autre… De la peur ? Pourquoi aurait-il peur ? A moins qu’il ne soit lui aussi en faute… Ce qui impliquait qu’il n’y avait aucun risque à se montrer.
Elle reposa rapidement son violon dans sa boîte, se leva et tentant de sourire, s’avança timidement. Il avait dû la voir, maintenant. Il semblait avoir de plus en plus peur. Elle n’était pas un fantôme, pourtant. Mais sous la lumière grise de la lune, ses cheveux dénoués et sa peau claire semblait inquiéter le jeune homme.

"Euh… Oui, il y a quelqu’un… Je suis désolée si je t’ai fait peur…"

Maintenant, il fallait qu’elle dise quelque chose. Surtout, dévier la conversation le plus loin possible du violon. Il ne fallait pas qu’il apprenne qu’elle s’enfermait la nuit dans l’école pour jouer de son instrument : il la prendrait pour folle, et elle ne saurait pas s’expliquer sur ses « motivations ». Elle tenta de prendre son air le plus innocent et triste possible, les yeux larmoyants et la voix tremblante. Elle voulait le convaincre qu’elle n’avait pas choisi d’être là, sans pour autant le dire explicitement. Mais surtout, surtout, elle voulait masquer son violon.

"Dis… Tu ne vas pas me dénoncer ? S’il-te-plaît…"

Elle avait fait un pas de plus, les mains jointes sur la poitrine. Elle tentait de jouer au maximum son rôle de « Première année un peu perdue », même si ce n’était pas très crédible et qu’elle n’était pas très douée pour la comédie.
Mais qui ne tente rien n’a rien, n’est-ce pas ?

C'est dingue a quel point notre cerveau peut imaginer tout un tas de conneries quand on se retrouve dans une situation inhabituelle. On entend des choses qui ne sont pas là, on voit des choses qui n'existent pas et on se fait des scénarios pourris sur des choses qui n'arriveront jamais. Kaï commençait a se demander s'il n'avait pas rêvé sur la possible présence d'une personne dans la pièce. Après tout son imagination lui jouait peut être des tours.. mais finallement non il n'avait pas rêvé, il y avait bien quelqu'un ici avec lui. Il en fut persuadé quand il entendit la petite voix fluette s'élever de derrière le piano. Une jeune fille... mais sa voix ne lui rappelait rien, ce n'était donc pas une fille de sa classe. Heureusement d'ailleurs, il aurait eu du mal a expliquer sa présence ici a une de ses camarades. Kaï se sentait un peu mieux, soulagé de voir qu'elle n'avait rien a voir avec un fantome ou avec un monstre quelconque. Il sourit légèrement, essayant de se calmer un peu. Décidemment il n'aimait vraiment pas se retrouver dans ce genre de situations!

"Ho heu... c'est pas grave... "

Fit-il avant de s'avancer un peu vers elle, histoire de voir s'il la reconnaissait. En étant un peu plus proche il était évident qu'il n'avait jamais vu la jeune fille de sa vie. Peut être qu'il avait du la croiser dans les couloirs mais il n'y avait pas fait attention. Elle avait l'air un peu perdue elle aussi, complètement démoralisée elle en avait presque les larmes aux yeux. Rien de mieux pour mettre Kaï encore plus mal a l'aise. Il n'était pas très doué avec la gente féminine et encore moins quand il en avait une au bord des larmes juste devant lui. Il se racla un peu la gorge en hochant doucement la tête.

"Heu... non.. évidemment que non. Hum... qu'est ce que tu fais ici toi?"

Fit-il en se penchant un peu sur le côté pour regarder derrière elle. Il n'y avait rien, personne d'autre. C'est bizarre.

"C'est toi qui jouait de la musique? ... J'ai entendu une musique tout a l'heure, c'est ce qui m'a conduit ici..."

Il reporta son regard sur la jeune fille en souriant un peu. Le fait de ne plus être tout seul le calmais un peu et lui donnait un peu plus d'assurance. Juste un peu..

"Y en a d'autres avec toi ou t'es toute seule?"

Elle n'était décidément pas douée pour jouer la comédie. Ses yeux étaient à peine humides et sa voix ne semblait vraiment pas trembler de peur. Mais le jeune homme semblait avoir complètement cru l'illusion. Mais quand même, elle n'aimait vraiment pas ça. Pourquoi devait-elle mentir pour justifier sa présence ici? Après tout, jouer du violon n'était pas un crime, et peut-être que cette personne comprendrait... Mais il se pouvait également qu'il ne comprenne pas, se moque d'elle et le répande dans toute l'école...
C'était déjà arrivé. Elle avait tenté de se confier à une fille. Une fille qui se prétendait son amie. Et qui avait trahi son secret à tout le collège. Elle avait dû passer le dernier mois de cours entourée par les ricanements et les railleries de ses camarades...
Dans le doute, il fallait garder ça secret. Ne jamais se fier aux gens. Plus une personne est faible, plus elle profite des faiblesses des autres, elle l'avait appris à ses dépends. Ne jamais accorder le bénéfice du doute était devenu une sorte de credo. Elle mentirait donc.

Elle regarda attentivement le jeune homme: il était franchement plus grand qu'elle, c'était presque effrayant! Elle aurait pu passer pour une enfant de primaire, avec sa voix aigüe et son mètre 40... Certains garçons étaient plus sensibles que d'autres quand on jouait avec la corde "grand frère", mais à son air perdu, elle se dit qu'il avait peut-être plus besoin d'un point stable. Il fallait donc au mieux éviter de jouer la pauvre petite fille perdue: il semblait encore plus perdue que cette petite fille. Une personne avec de l'assurance serait une véritable bouée pour lui, mais elle avait malheureusement pris la mauvaise piste dès le départ et ne pouvait que partiellement corriger le tir.

Maintenant, il fallait qu'elle réponde à la fameuse question... Qu'est-ce qu'elle faisait là? Mais voyons, c'était simple, elle avait décidé de s'enfermer dans le lycée pour son plaisir! Héhé, ça ne passerait jamais... Elle aurait pu lui dire que les filles de sa chambre l'avaient jetée dehors, ou encore qu'on l'avait forcée à rester dans le bâtiment pour une sorte de test de courage... Mais franchement, aucune des excuses qui ne lui venait à l'esprit lui semblait plausible. Et puisqu'elle ne trouvait toujours pas d'excuse valable, elle allait être malpolie. Et lui retourner sa question. Mais avant, écarter tout soupçon de sa personne. La musique ne venait pas d'elle, il fallait l'en convaincre. Ce serait sûrement un peu compliqué (vive les fantômes violonistes et les senpais peureux!) mais elle devrait y arriver. Non, elle devait y arriver.

"Non, j'ai été attirée par la musique également... Et je ne suis plus seule, puisque tu m'as trouvée. Mais sinon, il n'y a personne d'autre... Enfin, je ne crois pas. Et toi, senpai? Pourquoi es-tu là?"

Du pied, elle chercha à glisser discrètement l'étui de son violon sous le piano pour ne pas qu'il le voit. La disparition du violon crédibiliserait ses dires et l'aiderait à mener le jeune homme en bateau, même si cela ne la réjouissait pas vraiment. Même si elle espérait en secret pouvoir se confier à quelqu'un... Et même si elle espérait pouvoir trouver un ami... Et quel meilleur ami que celui avec qui on a partagé des émotions fortes telles que la peur d'un fantôme? Mais jamais elle ne pourrait s'avouer ces espérances, comme jamais elle ne s'avouerait qu'elle préférerait ne jamais voir Hoshi revenir et continuer de vivre, elle...
Elle s'avança à deux-trois pas du jeune homme, les bras le long du corps, décontractée. Elle essayait de se donner un air faussement assuré, comme si la seule raison de son jeu avait été de convaincre son senpai de ne pas la dénoncer.

Il ne s'attendait pas a trouver quelqu'un d'autre avec lui a cette heure et surtout pas ici. Surtout que la jeune fille n'avait pas l'air d'être le genre de personne a transgresser les règlements pour son bon plaisir mais il pouvait toujours se tromper. Pendant un bref moment il avait même cru qu'elle était dans le coup. Que ses camarades de classe avaient demandés a la jeune fille de lui faire peur pendant la nuit... mais en y réfléchissant bien ce n'était pas leur genre de faire des choses pareilles. Ils n'auraient jamais demandé ca a une fille, encore moins une première année. Ils auraient fait ça eux même pour avoir le plaisir de voir la tronche apeuré de Kaï. Il poussa un léger soupire, ca commençait a devenir agaçant tout ça. La seule chose qu'il voulait maintenant c'était un bon lit chaud, et rien de plus! Etre tranquillement enroulé dans sa couette, bien au chaud, la tête sur son oreiller.. et dormir! Parce que mine de rien, ici, impossible de trouver un endroit convenable pour dormir, pas de lit, pas d'endroit suffisamment chauffé... c'était un vrai calvaire.

La jeune fille s'était un peu rapproché de lui, Kaï baissa de nouveau son regard vers elle et lui sourit gentiment. Ils étaient dans la même galère apparemment. Elle avait été attirée ici par la musique.. ha donc il devait bien y avoir quelqu'un d'autre ici. La musique ne s'était jouée toute seule quand même et s'il y avait la jeune fille ici, pourquoi pas une autre personne dans l'école qui faisait les noctambules? Suffisait de le trouver maintenant, ou alors il finirait bien par revenir ici qui sait. Il hésita a répondre a la question de la jeune fille... et puis au final il se dit qu'il n'avait pas besoin de mentir pour quelque chose d'aussi idiot. Il haussa donc les épaules.

"Pour un pari... Mes amis ont pariés que je ne tiendrais pas une nuit tout seul dans l'école... j'essais de leur prouver le contraire. Quoi que si j'avais su... j'aurais refusé."

Fit-il en soupirant et en se passant la main sur la nuque. Il regarda de nouveau la salle. Salle de musique, il la connaissait bien, il passait souvent ici pour s'entrainer un peu au piano. Il chantait rarement.. il n'aimait pas qu'on l'entende chanter pour la bonne et simple raison qu'il était timide. Autant avait-il de l'assurance a revendre sur un terrain de basket mais devant un micro et juste avec sa voix, il n'arrivait a chanter que quand il était seul. Un petit secret qu'il gardait fièrement depuis qu'il était arrivé a Ginkgo. Il s'avanca un peu dans la pièce, fixant le piano, caressant les touches de l'instrument avant de venir s'installer sur le banc qui lui faisait face.

"Ce n'était pas le son d'un piano... la musique... elle venait d'un autre instrument. Je saurais pas dire lequel. C'est quand même bizarre qu'il n'y ai personne... "

Fit-il en souriant a la jeune fille.

"Tu sais, tu ferais mieux de rentrer te coucher... moi je suis obligé de rester ici, mais toi tu devrais peut être retourner avec les autres. Si je me fais attraper je dirais que j'étais seul."

Il posa ses mains sur les touches du piano... et appuya en douceur. Ses doigts s'agitant machinalement pour entamer une mélodie (https://www.youtube.com/watch?v=m2GGhm9No0k&feature=related). Avec un peu de chance la personne qui avait joué plus tôt reviendrait... ou pas.

Un pari... Quelle idée! C'était bien un truc de mec, ça, que de dire aux autres qu'on était infaillible, qu'on avait jamais peur etc... Elle ne comprenait vraiment pas pourquoi les gens cherchaient toujours à se mettre en valeur en faisant semblant, plutôt que d'accepter leurs défauts et leurs peurs et d'apprendre à les dépasser. Et puis surtout... Un homme qui n'a peur de rien et est toujours fort et viril, c'est pas drôle... Enfin, c'est ce qu'elle pensait: un homme qui ne montre aux autres aucun de ses défauts n'est pas intéressant, car les irrégularités qui rendent les humains si intéressants sont justement tous leurs défauts. Si l'homme était bon, séduisant en toute occasion (même au lendemain d'une soire bien arrosée ou après un marathon de 40 km), toujours courageux, sachant tout faire (cuisine, ménage, lessive et autre), quel intérêt y aurait-il d'y ajouter une femme pour leur apprendre la vie quotidienne et les encourager à se surpasser? L'intérêt d'une relation est que chacun apporte sa petite contribution à la construction de l'autre, et ainsi chacun grandit au contact de son entourage. Et c'est parce qu'on a des défauts qu'on est capable de toujours s'améliorer et d'améliorer les autres au fil des rencontres.

Elle s'était encore laissée embarquée dans le fil de ses pensées. Revenant sur Terre, elle constata que le jeune homme s'était approché du piano. Son sang se figea à l'idée qu'il trouva le violon à peine glissé dessous. Mais il en fit le tour sans trop regarder avant de s'y asseoir. Un musicien. A cette pensée, elle eut une poussée d'amitié pour cette personne dont elle ne connaissait même pas le nom. Mais un musicien ne pouvait pas être mauvais, n'est-ce pas? Après tout, la musique élève l'âme et l'esprit dans un ciel pur de toute haine, et les musiciens, les vrais, ceux qui ont déjà rencontré le sentiment apaisant du Paradis en jouant, ne peuvent haïr leurs semblables mais seulement leur souhaiter de connaître un jour le bonheur d'être en paix quelques instants. Et si cette personne était réellement un musicien, alors il devait aspirer à parler avec sa musique, il devait chercher à communiquer l'inexprimable et à rendre à son auditoire tout ce qu'il éprouvait avec sa musique.

Il lui proposa de rentrer. Pourquoi rentrer? Il effleurait doucement les touches du piano avec se doigts. Il allait jouer. Pourquoi rentrer maintenant alors qu'elle allait savoir qui était ce garçon? Curieuse sur sa musique, elle voulait écouter le cœur du jeune homme et lire son âme. Elle voulait écouter ce que quelqu'un d'autre qu'elle pouvait jouer avec un instrument. Car c'était là son plus gros défaut de violoniste et de musicienne: elle n'écoutait que très peu les autres. Il y avait tellement de soit-disant bons musiciens qui jouaient des mélodies vides de sens que ça la faisait vomir. Oui, ils avaient de la technique, ce qu'elle ne pouvait prétendre. Mais il n'avaient pas de musique, et c'était pour la jeune fille le plus important. Elle ne voulait pas écouter des personnes qui n'aimaient pas leur métier pour autre chose que l'argent qu'il leur rapportait.

Les premières notes résonnèrent doucement dans la pièce. Elle ferma les yeux, s'abandonnant à la douce mélodie. "La musique est la médecine de l'âme" disait-on. Et écouter une personne jouer était très agréable si on savait en saisir les fragments de Beau. Machinalement, ses lèvres se fermèrent et elle commença à fredonner à l'unisson avec le piano. C'était rare qu'elle joue ou chante avec une autre personne (très exactement la seconde fois depuis son amnésie), et cela réchauffait le cœur plus qu'elle ne le pensait. Elle comprit assez rapidement la forme du morceau et s'autorisa à chanter en contrepartie. Ses notes différaient maintenant totalement du piano, et même si il y avait des erreurs cela donnait une profondeur particulière à la mélodie. Cet exercice était difficile à maîtriser et elle ne savait pas quand elle avait compris l'intérêt du contrechant, mais elle aimait vraiment le faire, elle avait l'impression d'apporter véritablement quelque chose à la musique, et non pas simplement d'interpréter une partition.
Mais le son s'amenuisa et le piano s'arrêta. Retour sur Terre. Un peu déçu d'une fin aussi rapide, elle rouvrit les yeux. Avec une seule idée en tête.

"Joue encore."

La musique s'élevait dans les airs comme un douce complainte. Kaï regardait ses doigts aller et venir sur le clavier, effleurant les touches en douceur avec une souplesse liée a l'habitude. Le jeune homme fredonnait la mélodie du bout de ses lèvres alors qu'il la faisait hurler du bout de ses doigts. Il se laissait emporter sans vraiment savoir si la jeune fille allait apprécier de se retrouver avec cet air dans la tête. Il allait d'ailleurs arrêter de jouer pour ne pas la déranger d'avantage quand il entendit une voix qui n'était pas la sienne qui venait se poser en douceur sur la mélodie. Le jeune homme releva lentement les yeux pour les poser sur l'inconnue qui venait de se mettre a chanter. Kai resta un moment a la fixer, continuant de jouer machinalement comme si ses doigts avaient une volonté propre. Il finit par sourire légèrement et reposa de nouveau ses yeux sur le clavier, jouant avec un peu plus de conviction pour motiver d'avantage la jeune fille a chanter. Elle avait une belle voix, une voix qui alait bien avec la musique qu'il jouait. Une voix que Kai aimait bien en tout cas, alors il continua de jouer. S'il n'avait pas aimé peut être qu'il aurait écourté le morceau mais pas là. Au contraire ille fit durer quelques minutes de plus pour entendre encore un peu la voix de la jeune fille. Et quand enfin la mélodie s'arrêta, Kai en fut presque déçu...

Il soupira légèrement alors que le silence retombait. Dommage... il aimait bien ce genre de moment où il pouvait partager quelque chose avec quelqu'un.. autre que quelques passe de ballons et quelques tirs au panier. C'est sans doute pour ca qu'il fut véritablement ravi quand la jeune fille lui demanda de jouer de nouveau. Kai sourit un peu plus et hocha la tête d'un air entendu. Réfléchissant un moment a la mélodie qu'il pouvait entamer, une mélodie qui irait bien avec la voix de la jeune fille... Et il la trouva. Cette vieille chanson ( https://www.youtube.com/watch?v=kUzBQbajbvQ ) qu'il avait longtemps oubliée dans le méandre de es souvenirs. Il avait un peu peur de ne plus s'en souvenir... mais quand il commença a poser les premières notes, le reste suivit de lui même et c'est presque instinctivement que ses doigts reprirent possession du clavier pour prolonger la mélodie sur laquelle il espérait bien entendre de nouveau la voix mélodieuse de la jeune fille. De nouveau il fit en sorte de faire durer un peu la musique pour en profiter au maximum et quand il posa les dernières notes sur le piano en soupira longuement. Ca faisait longtemps que ca ne lui était pas arrivé.

Il reposa son regard sur la demoiselle, souriant paisiblement, apaisé par ce petit moment musical qu'ils avaient partagé a deux. Il s'étira légèrement, levant les bras, se cambrant un peu avant de se détendre de nouveau. Il commençait a fatiguer un peu, il fait dire qu'il devait être tard maintenant. Demain il aurait vraiment du mal a tenir toute la journée sans s'endormir sur son bureau. Au pire des cas il pourrait toujours simuler une petite maladie et retourner a sa chambre pour rattraper son retard de sommeil... mais n'étant pas un bon acteur dans l'âme il avait toutes les chances de se faire chopper et d'avoir des problèmes. Inutile d'y songer. Il regarda la jeune fille et se rendit compte qu'il n'avait même pas prit le temps de se présenter! Il se leva du banc et s'inclina légèrement devant elle.

"Ha! J'oubliais... Je m'appel Kaedo! Kaï Kaedo, deuxième année, ravi de faire ta connaissance."

Fit-il en se redressant, sa massant la nuque pour montrer sa gène. C'était vraiment un endroit inhabituel pour rencontrer des gens... surtout a cette heure là.

"Tu... tu as une très jolie voix.. vraiment..."

A sa plus grande joie, le pianiste élargit son sourire et se remit à jouer. Dès les premières notes, ses yeux brillèrent. Du fin fond des méandres obscurs de sa mémoire lui revenait la mélodie. Sans comprendre pourquoi, elle sut qu'elle ne devait pas chanter avec le piano. A la fois surprise par les étrangetés du cerveau humain et ravie de connaître ce que jouait le garçon, elle ferma les yeux pour saisir le thème du piano, et sans même s'en rendre compte commença à fredonner une mélodie par-dessus. Ce n'était pas un contre-chant, ce n'était pas un accompagnement du piano. Non, c'était plutôt un air qu'accompagnait le piano.
Elle se rendit soudainement compte de ce qu'elle chantait, et surprise elle faillit s'arrêter. Mais elle ne voulait pas briser la bulle que son senpai avait créé, elle ne voulait pas arrêter les instants si particuliers où deux musiques se mêlent pour former un seul son. Alors, refermant ses yeux, elle s'abandonna à son inconscient qui lui dictait discrètement les notes à chanter. Partie explorer l'imaginaire que le morceau lui inspirait, elle chantait, pas très fort, mais assez pour donner du corps aux sons qui emplissaient la salle. Le vieux piano un peu poussiéreux sonnait encore bien, et l'ensemble faisait frissonner la jeune fille.

Du violon. L'envie la prit soudainement. Elle voulait en jouer. Elle ne désirait plus que sentir le rond de la corde sous la pulpe de ses doigts, elle se voyait déjà positionner ses doigts sur l'archet et l'archet sur une des cordes de son instrument. Son cœur était empli d'envie de violon et elle devait se faire violence pour ne pas plonger sous le piano et en ressortir avec son instrument.
Elle se retint jusqu'à la fin du morceau, mais elle avait plus de mal à savoir ce qu'elle devait chanter. L'exercice devenant ardu, elle fut presque soulagée quand le piano s'arrêta. Un peu anxieuse, elle le regarda s'étirer, sans savoir trop quoi dire. Si elle lui demandait de jouer avec son violon, il comprendrait qu'elle lui avait menti et n'apprécierait sûrement pas. En même temps, l'envie se faisait de plus en plus forte. Elle avait découvert un musicien, chanté avec lui, elle voulait maintenant jouer avec lui, mais une parole l'en empêchait. Quel pouvoir que celui du mensonge! Elle regrettait maintenant, de ne pas lui avoir dit la vérité...

Le jeune homme s'était levé, et s'inclina pour se présenter. Elle avait donc vu juste, c'était effectivement un de ses senpais. Kai... Le coquillage? C'était trop mignon! Tout comme son geste pour se masser la nuque: il ne semblait pas très à l'aise, mais calmée par les deux morceaux qu'ils avaient interprétés, elle trouvait ça mignon. Elle ne put s'empêcher d'élargir son sourire, avant de se présenter à son tour.

"Je suis Takana Hoshi, en première année. Enchantée, Kaedo-senpai."

Puis le compliment vint. Pas très assuré, mais il semblait sincère, et elle ne le supportait pas. Pas qu'elle n'aimait pas ça, loin de là, mais elle ne comprenait qu'on pouvait la féliciter sur quelque chose que Hoshi avait construit. Tout comme le violon. Elle ne comprenait pas qu'on lui dise qu'elle jouait bien, parce que pour elle, c'était un don de naissance. Elle n'avait jamais vécu sans. Son violon, sa voix, ses notes à l'école, tout ça elle le devait à Hoshi, et elle refusait en bloc tous les compliments qu'on pouvait lui faire. Simplement, elle ne voulait pas voler une gloire que seule Hoshi méritait et qui devait pouvoir la recevoir à son retour.
Elle fit donc sa réponse habituelle à ce senpai qui ne manquerait pas de poser des questions. Mais elle ne supportait pas de voler des compliments à une autre.

"Merci, mais... Je n'ai aucun mérite. Vraiment. Alors, plutôt que me dire ça, dis-toi plutôt que ton jeu au piano est très beau, tu as du beaucoup travailler pour l'acquérir!"

Elle espérait détourner toutes les interrogations de cette manière, même si elle était parfaitement consciente que cela ne suffirait pas.

Il resta immobile face a la jeune fille, mémorisant son nom. Hoshi Takana... ca ne lui disait rien, et avec sa mémoire pour le moins séléctive, même s'il avait déjà entendu parler d'elle, il ne s'en rappelait plus aujourd'hui. Il faut dire que Kai avait toujours eu un peu de mal a retenir le nom des gens qu'il n'avait pas vu au moins une fois dans sa vie, si bien que même s'il entendait des ragots sur tel ou telle personne... il les oubliait aussi vite qu'il les avait entendu. D'un certain côté ce n'était pas plus mal comme ca, ca lui évitait d'avoir des préjugés a la con sur les gens... et vu qu'il ne s'interessait pas non plus au "on dit", il était tranquille. Le voila donc en face d'une jeune fille inconnue au bataillon de sa mémoire et qui semblait avoir le même intérêt que lui pour la musique, du moins pour le chant. S'il avait eu suffisament de courage, ce qui n'ets pas le cas, peut être qu'il se serait mit a chanter avec la jeune fille mais il avait garder ses lèvres scellées. Son secret était bien gardé, personne ne devait savoir qu'il lui arrivait de temps en temps de pousser la chansonnette. Pourquoi? Parce qu'il était basketteur, pas chanteur, et qu'il ne tenait pas a se faire chambrer dans les vestiaires par ses petits camarades , tout ca parce qu'il avait une petite attirance pour le chant. Déjà qu'il évitait de dire qu'il jouait du piano... on est jamais trop prudent.

Ce qui surprit plus le jeune homme c'était le fait que la jeune fille ne semble pas se rendre compte de son talent. Elle refusait le compliment, mettant ca sur le compte du jeu de piano. Mais il n'en était rien, elle chantait bien et c'était là la stricte vérité. Kai fut un peu déçu que la jeune fille ne semble pas l'accepter et baissa un peu les yeux quelques secondes avant de la regarder de nouveau pour finalement regarder le piano. Il n'était pas très doué pour les compliments, et pas très doué non plus pour les relations sociales... la plupart du temps il évitait de parler avec les filles puisque ca ne lui avait jamais rien apporté de bon. Il venait d'en avoir la preuve une fois de plus: les filles c'est vraiment trop compliqué. Il soupira légèrement et finit par hausser les épaules.

"J'ai commencé jeune. J'aimais pas trop ca au début mais a force d'en faire, j'ai finis par m'y habitué..."

Fit-il en souriant légèrement alors qu'il regardait de nouveau la jeune fille en face de lui. Il se retint d'insister une fois d eplus sur sa voix et préféra donc garder le silence quelques secondes de plus avant de secouer un peu la tête.

"Tu fais partit du club de musique?"

Finit-il par demander alors qu'il se rasseyait sur le petit banc devant le piano. Il attendait la réponse de la jeune fille alors que son regard fut attiré par quelque chose qui de toute évidence n'avait rien a faire là. Une boite sous le piano. Assez grande. Il se baissa et l'attrapa avec précaution, voyant qu'elle était assez lourde, elle était peut être aussi fragile.

"Ha? Qu'est ce que ca fait là ca? ... On dirait un étui a violon... C'est a toi?"

Fit-il en le lui tendant, au cas où ca lui appartiendrait.

Kaedo-senpai ne posa aucune question et ne fit aucune remarque sur son esquive du compliment. Ce qui ne voulait pas dire qu'il n'en pensait pas moins, mais cela laissait du répit à la jeune fille, et lui permettait de constater que vraisemblablement, c'était un garçon bien. Enfin, par "bien" elle entendait selon ses propres critères, c'est-à-dire qu'il ne posait pas trop de question, n'était pas trop curieux et ne cherchait pas à retourner le couteau dans la plaie dès qu'il voyait une faille chez une personne. Ce qui était déjà énorme, vu la tendance humaine à faire le mal. Mais ce n'était pas non plus pour ça qu'elle pouvait lui faire confiance.

La question sur le club de musique ne la surprit pas, elle se doutait qu'elle finirait par tomber. Et puis ce n'était pas une question grave, son côté musicien n'était un secret pour personne. Par contre, ce qui l'étonnait, c'était que Kaedo-senpai n'y soit pas, lui. Elle aurait bien aimé jouer avec lui à d'autres moments que la nuit. Mais si elle ne l'avait jamais entendu, c'est donc qu'il ne devait pas raffoler du piano. Ou alors qu'il était trop timide pour en jouer...
Elle élimina rapidement l'hypothèse de la timidité: il était grand, et même s'il ne semblait pas très sûr de lui dans l'obscurité, il ne devait pas manquer de confiance en lui.

Mais alors qu'elle évaluait une fois de plus les centimètres qui marquaient leur différence de taille (il devait bien y en avoir 30... voire même 35...), elle se rendit compte qu'elle ne lui avait pas répondu et que lui s'était rassis. Au piano. Et qu'il était en train de plonger le bras sous l'instrument.
Il n'y avait qu'une seule chose sous ce piano. Et c'était la seule chose qui ne devait pas être découverte. Elle paniqua, se demanda si la fuite était une bonne solution, ou s'il valait mieux jouer l'étonnée, mentir une fois encore, ou même dire la vérité, ou ne rien dire, ou s'enfuir, une fois encore. Toutes les possibilités défilaient dans sa tête sans s'arrêter, sans qu'une ne paraisse plus intéressante qu'une autre, sans réussir à se décider. Et comme il regardait l'étui, elle savait qu'il finirait par savoir. Un violon n'atterrit pas sous un piano sans une bonne raison, et il n'y avait personne d'autre dans le lycée.
Et une vérité la frappa: si elle affirmait que le violon ne lui appartenait pas, le garçon le ramènerait aux objets trouvés. Et elle ne pourrait pas le récupérer sans que personne ne soit au courant.

Elle soupesa deux solutions: dire la vérité, que le violon lui appartenait, que c'était elle qui en avait joué s'il insistait, ou bien lui dire qu'elle ne savait pas ce qu'il faisait là et abandonner son compagnon. Sauf qu'abandonner son violon, elle s'en savait incapable: c'était la seule personne qui avait toujours été là pour elle, qui l'avait soulagée de tout ce qu'elle pouvait porter sur son cœur, qui avait créé toutes ces musiques avec elle, qui portait son âme à bout de bras. Le seul qui n'ait jamais posé de question sur la différence qui s'était opéré lors de l'accident. Le seul chez qui le silence était de la paix et le son de la douceur. Alors abandonner son violon voulait dire abandonner ce qui ne l'avait jamais abandonnée, et elle ne pouvait s'y résoudre.
Alors quand Kaedo-senpai lui tendit son instrument, elle le prit dans ses bras et fuyant le regard du jeune homme, elle lui répondit.

"Oui... C'est le mien..."

Et maintenant, elle savait qu'elle ne pouvait plus fuir nulle part. Si l'envie lui en prenait, le deuxième année pouvait dire à toute l'école qu'elle restait dans le bâtiment Showa la nuit pour jouer de son violon. Elle espérait qu'il respecterait son silence et ne poserait aucune question, même si elle s'en doutait, personne ne resterait silencieux face à une personne qui porte un violon comme un nourrisson. Elle savait que son silence ne faisait qu'appeler des questions. Elle le savait, et pourtant elle ne pouvait se résoudre à prononcer un mot de plus.
Et même si elle avait voulu prononcer une parole, une boule s'était formée au fond de sa gorge, l'empêchant d'ouvrir la bouche. L'anxiété et l'angoisse avaient formé un nœud dans le fond de sa gorge, un nœud qui grossissait à chaque instant, un nœud qui poussait une larme ou deux au bord de ses paupières, même si elle leur interdisait de couler, même si elle faisait de son mieux pour que son stress ne se voit pas. Elle savait qu'aux prochains mots de son senpai, les larmes couleraient sûrement, et ce n'était pas sa volonté qui l'en empêcherait.
Alors elle attendait.

La jeune fille prit délicatement la boite qui contenait le violon.. et même si elle n'avait pas répondu a sa question, Kai aurait deviné tout de suite qu'il était a elle. Il n'y avait qu'a voir la façon dont elle le tenait contre elle et la peur qu'il avait lu dans ses yeux quand il le lui avait tendu. Il la regardait là, immobile, ne sachant pas trop quoi dire en la voyant comme ca. Elle semblait.. perdue... bien loin de la jeune fille qu'il avait vu quelques temps plus tot. Elle venait de se refermer devant lui comme une huitre, enfermant a jamais la perle de sa personnalité qu'il avait cru entre voir quelques instants. Et face a elle il se trouvait un jeune homme, toujours assis sur le banc du piano qui la fixait, sans comprendre. Elle lui avait mentit... elle lui avait mentit depuis le début et voila qu'il avait tout découvert. Tout ca pour... un violon? Il poussa un léger soupire en se mettant debout, avançant d'un pas vers elle. Il la fixa toujours en silence essayant de réunir tout son courage pour enfin réussir a parler, se calmant un peu.

"La musique.... c'était toi..."

Fit-il au bout d'un moment. Ce n'était plus une question mais bien une affirmation. Il regardait l'étui du violon maintenant. Oui maintenant c'était clair, la mélodie, elle venait d'un violon, de ce violon là... et celle qui jouait c'était celle qui se trouvait en face de lui maintenant. Il l'observa de nouveau, croisant vaguement son regard où il devinait quelques larmes se cacher. Il soupira de nouveau.

"Tu as mentis..."

Finit-il par dire dans un souffle... avant de sourire légèrement. Relevant les yeux vers elle, souriant sereinement. Il leva une main qu'il vint poser sur la joue de la demoiselle, effleurant sa peau du bout de son pouce.

"Il a l'air important pour toi, ce violon, hum? ... Alors ca ne fais rien, je comprends. Après tout on ne se connait pas... et puis tout le monde a ses secrets. C'est pas grave... d'accord?"


[désolé c'ets court, pardon pour le retard]

Jamais elle n'aurait cru que les quelques mots du jeune homme lui ferait tant de mal. Mine de rien, elle s'était attachée au pianiste qui l'avait si agréablement accompagnée. Mais le fait était là. Oui elle avait menti. Elle s'en voulait, surtout qu'elle n'était pas prête à en assumer les conséquences. Et tout d'un coup, comme pour la punir de ses mensonges, les larmes qu'elle réussissait tant bien que mal à retenir coulèrent d'un seul coup, roulant rapidement sur ses joues, perlant sur la commissure de ses lèvres, donnant un goût salé à ses excuses.
Excuses qui s'interrompirent net à l'instant où elle sentit une main s'approcher de son visage. Le contact n'était pas son fort, mais... Le geste était plein de bonnes intentions et de réconfort. Elle n'écoutait pas les paroles de son senpai, le bruit sourd du sang battant à ses tempes l'en empêchait. Mais elle sentit à son sourire que le mensonge était pardonné.
Le seule pensée qui lui vint était que le pardon était une chose vraiment douce. La douceur de la main d'un inconnu pouvait calmer toutes ses craintes, et le réchauffement que cela avait provoqué au fond de son coeur était très agréable. Elle ne connaissait pas ce geste que font les mères aux enfants qui avouent leurs fautes, ce geste simple qui pouvait accomplir tant de miracles. Et miracle il y eut.
La jeune fille posa son violon, prit la main de son senpai, et avec toute la tristesse qu'avait provoquée la découverte du violon et toute la douceur qu'il lui avait apporté, elle lui sourit.

"Je suis désolée... Je ne voulais pas mentir, mais... Je ne pouvais pas savoir si tu comprendrais... Merci beaucoup de ne pas m'en vouloir... De ne pas m'avoir crié dessus... De ne pas t'être énervé... Tu es quelqu'un de gentil. Vraiment."

Elle ne savait pas quoi lui dire. Comment exprimer un tel soulagement, un tel réconfort alors qu'on ne connait pas ces sentiments? Depuis l'accident, elle avait vécu dans un monde où tous la rejetaient, personne ne l'acceptait. Ils attendaient d'elle des choses qu'elle n'était pas capable de leur donner, mais en attendant le retour de Hoshi, elle faisait de son mieux pour les satisfaire. Après tout c'était des personnes que Hoshi aimait. Alors elle tentait de garder son rôle. Constamment. Toujours sur la déensive, comme pour s'excuser de ne pas avoir été celle qu'ils voulaient. Toujours dans la recherche du meilleur, sans s'arrêter, parce que Hoshi était "la meilleure, la plus belle de toutes les étoiles". Jamais un instant de repos, jamais une personne pour la laisser vivre comme elle le souhaitait.
Et soudainement, un senpai, une personne dont elle ne connaissait que le nom, un inconnu, presque. Uun senpai lui caresse la joue et son monde se bouleverse. Elle est perdue, à nouveau. Mais c'est agréable, comme perte.

[HRP: Pas grave, tant que tu réponds. :) Par contre, je suis désolée pour les éventuelles fautes de frappe, je suis sur mon portable, donc c'est un peu compliqué.]

Il ne savait pas vraiment comment il avait fait pour trouver le courage de faire un geste pareil. Lui qui d'habitude gardait une certaine distance avec les gens, voila qu'il se mettait a consoler une jeune fille qu'il ne connaissait pas. Il s'était déjà retrouvé dans une situation similaire, plusieurs fois même, quand il avait refusé les déclarations de quelques jeunes filles qui avaient finies en larmes devant lui. Il avait a ce moment là, gardé ses mains dans ses poches et avait baissé les yeux, géné, pour finalement s'excuser et s'en aller.Alors pourquoi diable ne faisait-il pas la même chose avec Hoshi? Pourquoi est-ce qu'il ne la laissait pas en s'excusant? Qu'est ce qui le retenait comme ca... Et puis c'était quoi ce frisson qu'il venait de ressentir quand Hoshi lui prit la main? Kai déglutit doucement sans vraiment savoir ce qu'il devait faire maintenant, ou ce qu'il devait dire. Il regardait Hoshi, mal a l'aise et il finit par sourire tendrement en entendant ses paroles. Gentil.. oui on lui disait souvent qu'il était gentil et parfois même un peu trop gentil.

"Je ne vais pas t'en vouloir parce que tu veux protéger tes secrets.... J'ai les miens aussi, alors je comprends. Parfois il y a des choses qu'on préfère garder pour soi."

Il regarda sa main dans celle de la jeune fille, puis il la regarda de nouveau. Elle avait les yeux qui brillaient un peu, sans doute a cause des larmes. Elle souriait tristement, elle avait l'air un peu perdue. Kai déglutit doucement et sans vraiment savoir pourquoi il se rapprocha un peu d'elle jusqu'a la serrer dans ses bras. Il entoura les frêles épaules de la jeune fille de ses bras, la gardant contre lui en silence. Il avait encore un peu de mal a réaliser son geste, il avait agit sur une pulsion, sans réfléchir. Quand il s'en rendit compte il se sentit incroyablement gêné. Il relacha doucement son étreinte et s'éclaircit un peu la voix.

"Heu... pa... pardon..."

Il finit par la lacher complètement et fit même un pas en arrière en regardant ailleurs. Le sol avait soudain un intérêt fabuleux a ses yeux.

Le noir avait envahi son champ de vision. Elle se sentait vide, épurée de tout sentiment désagréable envers le monde extérieur. Elle ne comprenait pas pourquoi la présence du garçon n'était pas désagréable, alors qu'il venait de la surprendre. Étonnamment, elle n'avait plus peur de lui. Mais elle avait peur du vide qui l'entourait.
Une voix parla. Ce qu'elle disait se voulait gentil et rassurant, mais elle ne pouvait pas entendre. Un silence noir résonnait dans ses oreilles. Elle eut peur un instant de s'évanouir, puis se rassura: ses jambes la tenait encore. Et la main qu'elle tenait la soutiendrait, si effondrement il y avait.
Mais cette main se dégagea. Un sentiment d'effroi l'emplit: si même la personne qui semblait l'accepter avec ses silences la fuyait, que pouvait-elle faire, seule sous la lueur blafarde de la Lune?

Et puis une chaleur se fit sentir. Une chaleur qui partit de ses épaules, pour se propager dans tout son corps, jusqu'à ses orteils, jusque dans le plus petit recoin de son cerveau. Il n'y avait plus de vide, ou du moins ce vide ne semblait plus l'être. Cette douce chaleur venait de le remplacer.
Elle ne comprenait pas pourquoi il l'avait enlacée. Elle ne comprenait pas pourquoi c'était si agréable. Elle ne comprenait pas pourquoi la douceur d'une main posée sur son dos pouvait tant rassurer. Elle ne comprenait plus rien à ce qui se passait, mis à part qu'une personne l'avait prise dans ses bras, fait unique depuis l'accident.

Mais toute belle chose avait une fin, elle avait fini par le comprendre. Les bras s'étaient écartés, la main n'était pas revenue se poser dans la sienne, et Kaedo-senpai s'était reculé, baissant les yeux. Un courant d'air fit frissonner la jeune fille qui voyait à présent clair et se sentait plus calme que quelques instants auparavant, malgré les milliards de questions qui se pressaient.
La voix qui lui était devenue agréable à entendre résonna une fois encore, mais moins claire, moins assurée. Les excuses étaient passées de l'un à l'autre. Et c'était elle à présent qui cherchait des mots pour rassurer son interlocuteur. Mots qui ne semblaient jamais pouvoir franchir la barrière de ses lèvres, ni même atteindre le coeur de celui qui lui faisait face. Un seul mot réussit à sortir, timide et léger, prononcé avec aussi peu de voix que s'il n'avait pas voulu être entendu.

"Merci..."

Un nuage épais masqua la Lune, et le noir envahit la salle de classe. L'ombre l'inquiétait, elle ressemblait trop au vide qui l'envahissait parfois. Sans trop de repères, elle fit un pas en avant, cherchant un appui ou quelque chose qui pourrait la rassurer, lui montrer qu'elle n'était pas à nouveau dans son imaginaire. Ses yeux ne semblaient pas vouloir s'accoutumer à l'obscurité, et ses mains tâtonnaient pour trouver quelque chose de connu. Quelque chose comme une chemise par exemple. A la réflexion, ce quelque chose ressemblait à la chemise de son senpai. A nouveau à la réflexion, ce senpai était ce qu'il y avait de plus rassurant dans la pièce.
Sa petite main se cramponna au bout de chemise qu'elle avait happé, attendant impatiemment que le nuage passe et que la lumière revienne.

Qui aurait cru que Kai aurait pu se trouver si mal après avoir osé faire un geste tendre? Ba.. lui. Il savait d'avance que sa timidité l’empêchait d'avoir ce genre de comportement avec les gens et pourtant malgré tout, ce soir, il avait voulu essayer de faire un pas en avant. Il avait beau avoir apprécié ce sentiment, sentir le corps frêle de la jeune fille contre le sien était loin d'être quelque chose de désagréable, il regrettait même un peu d'y avoir mit fin si vite. A bien y réfléchir il ne s'autorisait pas ce genre de laisser aller avec tout le monde, du moins pas avec ses amis. Alors pourquoi est-ce qu'il avait osé faire une telle chose avec une inconnue? Car c'est bien ce qu'elle était, a part son nom et le fait qu'elle jouait du violon, il ne savait rien de la jeune fille. Il resta longtemps a fixer le sol, immobile, se posant tout un tas de questions qui passaient si vite dans sa tête qu'il n'avait même pas le temps d'y trouver une réponse. Il n'osait même plus relever les yeux pour regarder Hoshi de peur de se prendre une gifle en pleine figure. Et pourtant rien ne se passa... est-ce qu'elle était aussi perplexe que lui? Il osa relever légèrement les yeux pour croiser son regard et il entendit faiblement la voix de la jeune fille dire un remerciement, presque un murmure. Il resta un long moment silencieux, se demandant s'il avait bien entendu ce qu'elle venait de dire ou s'il n'avait tout simplement par rêvé... mais non, elle l'avait bien dit et Kai ne put s'empêcher de sourire légèrement en relevant la tête.

Un petit frisson le parcouru faiblement et il reprit un peu plus d'assurance. Quand la Lune se voila il dévia son regard vers la fenêtre, se demandant ce qui se passait jusqu'a voir l'épais nuage qui passait devant l'astre nocturne. Il n'eut pas le temps de dire quoi que se soit a ce sujet qu'il sentit déjà une main sur sa chemise, qui le retenait, lui interdisant toutes fuites et tout mouvements de recul. Il reposa son regard sur la jeune fille qu'il distinguait a peine dans cette douce obscurité. Il ne voyait d'elle qu'une vague silhouette enveloppée d'ombre, pas très loin de lui et visiblement pas très rassurée. Il hésita un moment, ne sachant pas trop quoi faire sur le moment ni quoi dire... et puis après une courte réfléxion il vint saisir doucement la main libre de la jeune fille qui lui faisait face. Glissant doucement sa main dans la sienne, avec une extrème douceur, il la serra légèrement pour lui faire comprendre qu'il ne la lacherait pas.

"... On ferait mieux de rentrer maintenant... Je te raccompagne jusqu'a ta chambre, si tu veux."

Finit-il par dire d'une voix plus assurée que d'habitude. Aurait-il prit un sursaut de courage? Peut être. Toujours est-il que sur le moment présent, même le plus terrifiant des fantômes n'aurait pas réussit a lui faire peur.

L'obscurité les entourait toujours, le nuage semblait ne jamais vouloir libérer la Lune de sa sombre étreinte. Mais pour la première fois, les ténèbres de la nuit ne l'effrayait pas: elle pouvait sentir la protection qu'offrait ce torse immense sous la chemise qu'elle agrippait. Et puis... Il y avait tous ces gestes que le jeune homme avait fait à son égard, la douceur de sa paume et la chaleur de ses doigts. Justement, la main de son senpai vint prendre à nouveau la sienne, et l'étreignit pour la rassurer. Il ne la fuyait donc pas... Son geste de recul devait être dû à la gêne typiquement japonaise qu'il se devait de marquer devant une inconnue, ou même à une gêne naturelle chez lui. La jeune fille trouvait cet inconnu de plus en plus connu. Elle avait chanté avec son piano, il l'avait prise dans ses bras et rassurée, il avait accepté ses secrets comme aucun autre... Et surtout, elle aimait bien sentir ses bras rassurants autour de ses épaules. Elle n'avait jamais connu une présence comme la sienne.

Il lui proposa de la raccompagner. Soit. Elle se prépara psychologiquement à partir dans le noir, quand une question lui traversa l'esprit: qu'allait dire ses compagnes de chambre? Elle ne les avait jamais vraiment trop approchées, mais les fois précédentes elle s'était débrouillée pour rentrer sans faire de bruit, de sorte que les trois filles ne savaient jamais vraiment à quelle heure elle rentrait. Mais là, la présence du garçon réduisait considérablement sa furtivité. Après avoir tourné en rond pendant quelques secondes sur ce problème, elle se dit qu'après tout, c'était mieux de se faire raccompagner par son gentil senpai en faisant du bruit que de se glisser seule dans le noir de la nuit.

"Je veux bien... Je ne vois rien dans le noir."

Sans penser à l'aveu de faiblesse qu'elle venait de faire, elle qui faisait son possible pour paraître forte, elle réfléchit un petit instant à ce qu'elle oubliait, et ajouta:

" Je récupère mon violon et j'arrive."

Elle lâcha le tissu et se retourna pour récupérer son instrument. Elle fit quelques pas précautionneux sans abandonner la paume chaude du garçon. De sa main libre, elle ferma complètement la boîte où le violon était rangé, en saisit la poignée et se releva. Cette fois encore, elle devait lever la tête pour regarder le visage de son inconnu, qui semblait gigantesque, si haut qu'il en était presque inatteignable. Une pensée vint la turlupiner. Elle sourit, crispée par la pointe d'inquiétude qui venait d'apparaître, tout en sachant qu'il ne pourrait sûrement pas le voir.

"C'est bon, je suis prête. Et, en y repensant... Me raccompagner ne va pas te faire perdre ton pari avec tes amis?"

C'était étrange cette sensation qu'il ressentait en lui. Kai avait l'impression qu'il se passait quelques choses, là, en lui. Ca le réchauffait, il se sentais bien et c'était a chaque fois qu'il posait son regard sur la jeune fille. Est-ce qu'il s'y était attaché plus qu'il ne l'aurait cru? C'était possible ca? De s'attacher a quelqu'un en si peu de temps? Peut être, aucunes idées. Peut être que ca venait juste de l'atmosphère du moment, peut être que c'était du a la nuit, au calme, au fait qu'ils étaient juste tout les deux. Une chose était sûr, c'est que Kaï se refusait a lacher la main de la jeune fille qu'il tenait encore dans la sienne. Il y tenait a cette main, il n'avait aucunes envies de la lacher, pas maintenant, pas tout de suite. Il hocha donc la tête silencieusement quand la jeune fille se décolla un peu de lui pour aller récupérer son violon... mais Kai ne pouvait se résoudre a la lacher, si bien qu'il tenait encore la main de la jeune fille dans la sienne. Kai attendit calmement qu'elle soit prête pour enfin commencer a se mettre en marche. Il s'apprêtait a quitter la salle quand la jeune fille lui fit part d'une question a laquelle il n'avait pas pensé. Le pari! Il avait complètement oublié le pari! S'il quittait les lieux il aurait perdu. S'il partait d'ici il aurait encore droit aux gentilles moqueries de ses camarades de classe sur sa trouille légendaire. Il s'arrêta net et réfléchit un moment... avant que ca lui apparaisse comme une évidence. Il s'en fichait complètement.. mais alors vraiment complètement. Il se fichait des moqueries, n'en avait rien a faire de ce que ses amis pourraient lui dire... Il s'en moquait complètement. Il sourit légèrement et serra un peu plus la main de Hoshi, se penchant au passage pour attraper son sac a dos qu'il passa sur une épaule avant de regarder la jeune fille par dessus son épaule.

"Si... mais je m'en moque... Je... Je veux te raccompagner..."

Finit-il par dire en douceur avant d'ouvrir la porte, jetant un coup d'oeil dans le couloir avant de s'y engager avec Hoshi, tenant toujours la jeune fille par la main, ouvrant la marche pour lui éviter de se prendre les pieds sur une marche dérobée. Il la guida de son mieux jusqu'a l'exterieur où ils furent accueillit par un vent d'air frais qui le fit frissonner légèrement. On voyait bien que la saison avant changé. Il grimaca légèrement en regardant la jeune fille par dessus son épaule et hésita un moment. Au bout d'un temps passé dans le silence, Kai prit son courage a deux mains et lacha la main de la jeune fille... pour venir passer son bras autour de ses épaules, continuant d'avancer.

"... Tu vas attraper froid..."

Finit-il par dire au bout d'un moment, la guidant toujours jusqu'au batiments des chambres.

[TERMINE/ suite dans les dortoirs]