Le regard fixé droit devant elle, Tenver avançait doucement. En marchant près d'elle, les passants évitaient de la toucher ou même de la regarder. La jeune fille marchait d'un pas lent, sans vraiment savoir où elle allait. Elle s'était, en quelque sorte, perdue, bien sûr. Tenver ne savait même pas où elle se trouvait, depuis le milieu de l'après-midi, elle errait sans but dans la ville. Ça se voyait, certaines personnes avaient remarquées qu'elle tournait en rond sans s'en rendre compte, mais son attitude hautaine et froide et son accoutrement n'arrangeaient pas les choses, personnes n'osaient l'aborder. Le soleil tombait, et de plus en plus de monde s'accumulaient dans les rues, les bars et les restaurants s'animaient. Une ambiance de relâchement et de secrets dévoilés s'installait dans l'air. Les jeunes sortaient, se soulaient, les femmes célibataires s'amusaient entre amis, et les hommes en profitaient pour tromper leur femme. La jeune anglaise était une exception, elle ne sortait pas se souler, quoique l'envie n'était pas loin, elle ne s'amusait pas avec des amis, ils étaient inexistants, et elle n'avait, malheureusement pour elle, personne à tromper. La nuit était tombée rapidement et maintenant, seule la lune et les lampadaires éclairaient la rue surpeuplée et Tenver se remercia intérieurement d'être si différente pour que les gens lui laissent le passage libre, sans même la frôler. Le manque de luminosité ne faisait qu'accroitre la gêne des personnes par rapport à elle. En effet, la jeune fille, habillée complètement de noir, avec des cheveux d'une couleur quelque peu "exceptionnelle" et son teint de peau très développé niveau pâleur, avait encore plus l'air d'une morte vivante que d'une fille de dix-huit ans. Elle qui aurait voulut se fondre dans la masse, ne pouvait qu’admirer avec un sourire, le recule des autres. La nuit allait passer très lentement, et elle allait encore ne pas dormir. Depuis trois jours, il lui était impossible de fermer l'œil, elle n\'avait pas encore, par chance extrême, de cernes qui lui barraient le visage, mais son maintient, moins droit, trahissait un véritable manque de sommeil.

Tenver était plongée dans ses pensées, et ne devait, qu’'aux passants qui l'évitaient, la chance de ne se prendre personne de pleine face et de rester debout. Elle s'arrêta brusquement, d’un seul coup, sans avoir donné un seul signe pour montrer qu’elle le ferait. Elle tourna la tête vers la boutique illuminée d\'une lumière jaune à as droite. C'était un magasin qui donnait directement sur la rue. L'homme qui semblait être le détenteur de ce bâtiment était appuyé sur le côté et fixait Tenver avec perplexité. La jeune fille leva les yeux, son regard rencontra celui de l'homme et celui-ci eu un mouvement de recul. L'anglaise passa une main dans ses cheveux et son visage se contracta d'un seul coup, elle pinça les lèvres et son énervement était maintenant visible. Tenver baissa la tête, cela faisait quatre fois qu’elle passait devant ce gars. Elle commençait vraiment à croire qu’elle ne retrouverait plus son chemin parmi tout ces gens et toutes ces rues entremêlées. Quelle poisse d’avoir un sens de l’orientation aussi peu développé, voire inexistant. Depuis qu’elle était toute petite, elle se perdait dans sa propre rue. Quelle idée stupide aussi de construire des rues entrelacées comme cela, comment voulaient-ils qu’elle ne se perde pas au moins une fois ? En même temps, la jeune fille n’était jamais allée, depuis son énième venue au Japon, dans les rues. Et qu’y faisait-elle d’ailleurs ? Tenver avait voulut s’aventurer un peu plus loin que d’habitude par simple ennuie et curiosité. Avec ses insomnies, elle n’avait plus envie de rien faire à part de marcher tout le jour, sans endroits précis où se poser. Elle avait de la chance, au moins, elle portait ses lentilles, elle voyait tout parfaitement, les détails en prime. Elle ne les avait pas retirées depuis environ trois jours et ses yeux la démangeaient de temps en temps. Tenver se fichait totalement de ses yeux. S’ils avaient été normaux, elle les aurait tout aussi bien ignorés, mais puisqu’ils étaient si « chiants », elle ne les supportait pas. Qu’ils se débrouillent tous seuls.

Bien décidée à retrouver son chemin, elle leva un pied et la tête, prête à avancer tant qu’il le faudra. Son geste se figea, et tous les muscles de son corps se stoppèrent dans leur mouvement. Tenver resta un moment ainsi, le regard fixé droit devant elle, les yeux bien qui froids, comportaient une faible lueur de surprise et la bouche de la jeune fille était entrouverte. Ce qu’elle venait de voir lui retourna l’estomac. Non loin devant elle, sur le même trottoir, une tête légèrement penchée en avant, avec des cheveux bruns, une droiture qu’elle avait apprise à connaître par cœur malgré elle. Un sourire sur les lèvres, elle se remit en route, à deux mètres juste derrière Majoren sans que celle-ci la sente. En la suivant peut-être qu’elle lui permettrait de retrouver son chemin. Tout en marchant à l’allure de la brune, Tenver détaillait son dos. Elle était plus grande qu’elle, de pas beaucoup. Ses cheveux étaient moins voyants que les siens. Toute son attitude était comme blasée, elle se fichait même des personnes qui lui adressaient un mot d’excuse pour l’avoir bousculée. Elle, elle se faisait bousculer, mais pas Tenver. Bien que la jeune anglaise était plus petite, plus maigre, les passants qui, après avoir frôlés Majoren, évitaient de faire de même avec la fille encore plus bizarre qui suivait. S’être basé sur l’allure de marche de la brune lui semblait excessif, et elle avait l’impression d’avancer à une vitesse vingt fois supérieure à la sienne. Au bout d’un certain temps, elle se rendit compte que Majoren ne semblait pas vouloir rentrer. Elle tourna dans un cul de sac et l’anglaise ne put s’empêcher de continuer à la suivre. Un sourire s’installa sur son visage, lui donnant l’air hautaine et détestable alors que l’autre se rendait compte de sa présence.

[ Je manquais un peu d'inspi sur ce coup là, désolée T-T]


Depuis toute sa marche, longue qu'elle avait été, la brune assise sur le sol s'était sentie observée, épiée, voir même suivie, ce qui est normal, étant donné que dans la rue, on il y avait forcément des gens, et que, qui plus est, elle n'était pas l'inconnue du coin, et pas mal la connaissaient déjà de vue si ce n'était de réputation. Enfin, réputation qui n'était pas glorieuse en fait. Aussi l'apparition de cette Tenver au bout de la ruelle n'était pas tellement surprenante, quoique la Majoren aurait pensé que sa soit disant camarade de classe aurait tout fait pour l'éviter, comme elle même. Peut être ne lui avait-elle pas fait tellement mauvaise impression, mais qu'importe, car la jeune fille n'avait que faire de l'impression qu'elle donnait à qui que ce soit. Et encore moins à cette fille là qu'elle avait détestée dès qu'elle l'avait rencontrée. Ce n'était de la faute ni de l'une, ni de l'autre, mais plutôt des deux. Majoren n'avait pas été dans un bon jour, et l'autre était absolument infecte, ce qui n'avait fait que renforcer l'intéret que Majoren lui avait porté au premier abord, intéret qui disparaissait maintenant. Elle avait envie qu'elle parte, un point c'est tout. La japonaise pouvait sentir de l'autre bout de la ruelle son regard hautain, méprisant et insupportable. Une enfant gâtée parmis les autres, en fait. Mais elle dégageait une aura différente qui la rendait encore plus insupportable, et elle devait le savoir et en être fière. A quoi bon être content de cela, franchement. Elle avait l'air de vouloir être ignorée, mais être ignoré n'est pas être détesté, ces deux choses là sont tellement différentes. Enfin, Majoren ne ferait pas une thèse mentale sur ce qu'elle avait pu analyser de cette fille, car il n'y avait rien d'intéressant et de gratifiant à cela, bien au contraire, c'était plutôt ennuyeux. Le regard de la brune se tourna à nouveau vers le bout de la ruelle ou la fille aux cheveux rouges se tenait encore et ne bougeait pas, son regard bleu n'ayant pas changé d'une goutte. La demoiselle aux cheveux noirs "comme l'enfer" faillit lui envoyer une réplique violente afin de la faire partir et rester seule avec son atmosphère nocturne et solitaire, mais elle tenta de jouer la diplomatie du mieux qu'elle pouvait tandis qu'une lutte faisait rage en elle, entre le bien et le mal, mais bien entendu, le mal avait l'avantage. Avant de devenir totalement mauvaise, elle lui envoya, d'une voix plutôt peu forte mais audible tout de même, car elle n'aimait pas forcer sur sa voix.

- T'es paumée, t'as besoin d'une grande personne pour te ramener ? Tu comptes faire quoi là, me regarder faire ce que j'ai à faire toute la nuit ? Sinon casses-toi, je fais pas de spectacles, désolée.

Bien sûr, elle était loin d'être désolée, mais son programme de la nuit n'était certainement pas quelque chose d'amusant. Peut être drogue, sûrement errance, voire alcool et qui sait, amusement autrement que seule. Fascinée quand même un peu par cette personne que beaucoup évitaient sûrement dans les rues, elle ne partirait pas la première, tout comme elle n'avait pas cédé lors de leur première rencontre. Ce serait Tenver qui partirait la première, ou alors elles resteraient toutes deux ici. Dans tous les cas, Majoren ne craquerait pas, ça, jamais. Et personne ne lui ferait changer d'avis. La jeune brune détourna la tête, la secouant un instant pour chasser toutes les pensées futiles qui se battaient en duel, et balança la tête en arrière, afin de mieux observer le ciel, ou plutôt se perdre dans la faible lueur qui éclairait la ruelle. Elle respirait profondément cette odeur de liberté qui lui avait manqué tandis qu'elle s'était forcée à aller dans cet internat. C'était beaucoup trop pour elle, elle aurait pu faire une crise en plein c ... cours. Car un seul cours lui donnait la nausée. Elle ne comprenait d'ailleurs pas ces gens qui arrivaient à passer une journée entière à écouter un débile débiter des choses inutiles.

Depuis quelques temps, ni le sommeil ni la faim ne l'avait atteinte, et grand bien lui faisait. Elle n'avait pas à cotoyer des gens au réfectoire, ou en ville, quelque part où elle achèterait à manger, ni même un vieillard aigri qui la chasserait, ou plutôt tenterait de la chasser de son muret parce qu'elle dormait dessus. Ces vieux ... Après ces quelques rapides réflexions, elle tourna à nouveau la tête vers la fille aux cheveux rouges qui était toujours là, et elle la fixa intensément, comme pour l'inciter à lui répondre. Si elle comptait rester plantée ici, certes, mais il lui fallait une raison, ou Majoren allait lui en trouver une, de raison, pour rester immobile.

Debout, elle fixait Majoren d’un air supérieur. Cette fille était pire que lourde à toujours la prendre pour une gamine. Elle avait du être traumatisée plus jeune pour s’en prendre à elle comme elle le faisait. Mais au fond, Tenver s’en fichait royalement, que la fille l’u traitée autrement, cela ne lui aurait pas fait plus de peine ou même plus plaisir, elle importait peu. Son regard passa de sa tête à ses pieds, elle la dévisagea tranquillement, sans aucune arrière pensée comme quoi ce qu’elle faisait était malpoli. Elle constata avec un sourire satisfait, qui lui donnait un air hautain, que la jeune fille n’avait pas changé pour un sou depuis leur fructueuse rencontre sur les toits de l’école, deux ou trois jours plutôt. Elle regretta tout de suite d’être partit alors qu’elles échangeaient quelques politesses ce jour-là. Peut-être l’affrontement aurait été intéressant, de toute façon, et à vue d’œil, on ne devait pas en attendre moins de la brune. Mais Majoren l’avait plus qu’énervée et elle n’avait pas voulut la frapper par cause de ne jamais sortir du combat, il aurait duré, duré, duré, sans jamais qu’une des deux filles ne prennent l’avantage. Ce genre de duel était irritant et Tenver préférait les éviter à tout prix. Elle ne vivait plus pour se battre. La jeune anglaise haussa un sourcil, et son sourire disparu immédiatement. Elle ne partirait pas cette fois-ci, l’énervement qu’elle avait ressentit quelques instants avant d’apercevoir Majoren l’avait quitté, elle espérait beaucoup de ce nouvel échange. Elle n’avait pas suivit la brune juste pour qu’elle l’aide inconsciemment à sortir de ce merdier, non, elle voulait la suivre par simple plaisir. Observer cette fille, qui lui ressemblait à la fois beaucoup, mais qui se différenciait d’elle par pas mal de points, était proche de l’amusement et de l’émerveillement pour Tenver. Aux faibles rayons de la lune, ses cheveux reflétaient des éclats couleur sang qui convenait parfaitement à l’ambiance tendue du moment. L’anglaise s’avança lentement, les yeux comme figés sur ceux de la jeune fille en face d’elle assise contre le mur. Le bruit de ses chaussures brisait le silence qui s’était installé entre les deux jeunes et que seulement le bruit des passants de l’autre côté de la rue venait défier. Elle fit encore quelques pas et arrivée juste devant Majoren, elle s’accroupit en face d’elle.

« Arrête de te prendre pour une adulte… on a presque le même âge… t’es chiante avec ça… »

Sa voix était lente. Tenver haussa les épaules et son regard froid vint soutenir celui de Majoren sans ciller, comme d’ordinaire. La jeune fille avait prononcé ses mots en anglais, elle savait pertinemment qu’elle la comprenait sans avoir besoin de faire trop d’effort. Elle resta accroupie devant la fille, les bras ballants près de ses genoux qui frôlaient son menton. Ses magnifiques yeux bleus envoyaient des piques constamment, elle le savait, mais n’avait jamais voulut changer son regard. Le fait que les autres ai peur d’elle ou ai du recul quand elle les regardait, lui plaisait. Elle ne savait pas pourquoi, mais savoir que des personnes « normales » la craignaient la faisait jubiler, elle adorait ça. Son sourire réapparu et elle croisa les bras sur ses genoux, cachant la partie inférieure de son visage. Des mèches rouges se posèrent sur ses rotules, devant ses yeux, mais elle ne fit aucun geste pour les retirer. Elle avait l’air vraiment haïssable, et elle-même ne savait et n’avait aucune envie de savoir comment Majoren faisait pour la supporter. Si elle avait eu une autre « elle » en face, elle lui aurait surement balancé à la tête des insultes que peu pouvait supporter et l’aurait frappée. Tenver parcouru avec ses yeux le visage fin de son interlocutrice. Elle la trouva belle, sans pour autant être une beauté. Elle était quelque peu quelconque, mais ses yeux gris qui semblaient sans arrêt être ailleurs captaient l’intérêt de Tenver. Le seul regard qu’elle trouvait semblable à celui de la brune était le sien, et elle en avait vu rarement d’aussi tenace.

Les cheveux de Tenver se baladaient tranquillement sur son crâne, le vent n’était pas fort, mais une légère brise suffisait pour les faire virevolter. Sa couleur extravagante était moins voyante dans le noir, et se rapprochait de plus en plus du noir. Elle n’en paraissait pas pour le moins très bizarre, et les quelques personnes qui osaient jeter un coup d’œil dans le cul de sac tournaient vivement la tête et continuait leur chemin. Les deux filles sortaient de l’ordinaire, c’est tout ce qu’on pouvait dire.

[Désolé Majoren, j'ai pas mal d'autre topic à continuer sur d'autres forums et aussi celui avec Sheikhan alors je n'ai pas fait très long ^^"]

[ Aucun problème ]

La taille à peine supérieure, presque invisible de Majoren n'avait évidemment pas suffi à lui donner l'impression d'être plus âgé et plus mûre que cette Tenver. Bien sûr, autre chose jouait. Déjà, si cette fille avait voulu être seule et tranquille sur le toit où elles s'étaient rencontrées, elle ne lui aurait pas adressé la parole, et la brune voyait cela comme un manque de stratégie pur et simple, car, oui, Majoren voyait les relations sociales comme une sorte de bataille. Il en avait toujours été ainsi pour elle. Comment le voir, si ce n'était ainsi, lorsqu'on ne vivait que dans le monde de la violence, qu'elle soit verbale ou physique ? N'importe qui qui aurait passé des années à apprendre à se défendre en se faisant frapper par on ne sait quel bras droit d'un chef de gang ou par ce chef de gang lui même aborderait la vie ainsi, c'était évident. La japonaise avait été d'une humeur massacrante le jour de leur rencontre, qui plus est, et elle avait eu l'impression, pourtant presque illogique, lorsqu'elle avait vu cette fille qui devait être dans sa classe en temps normal, de voir son frère. Ce frère là, oui, celui qui avait pourri sa jeunesse, son enfance, et qui lui avait infligé sa présence au point de transformer sa haine des enfants en une phobie, une terreur inexplicable. Une pulsion avait failli la pousser à l'attraper par les cheveux et lui hurler pourquoi elle était là, et qu'il fallait qu'il/elle retourne vivre chez papa-maman. Mais elle avait bien fait, il faut l'admettre, de se retourner à ce moment là, pour lui parler. Ainsi elle avait pu voir que c'était une fille et qu'elle n'avait strictement aucun rapport avec son frère. Réflexion faite, ça n'avait été sûrement que l'aura qu'elle dégageait, ou une sorte de "flashback" qu'elle avait eue car elle avait du récupérer son frère sur le toit de son collège bien souvent, lorsqu'il faisait des caprices d'enfant gâté. Et ce regard qu'il avait, elle l'avait retrouvé en Tenver, à la seule différence qu'au lieu d'être gris clair, il était bleu, ce qui le faisait ressortir d'autant plus. Heureusement que cet air d'enfant gâté était devenu froid par la suite, car Majoren aurait pu carrément péter un câble, et qui sait ce qu'elle aurait fait. Elle aurait pu pleurer comme la frapper, ou même la balancer dans le vide. Mais finalement, la brune avait su se maitriser, ce qui était pour elle un grand changement. Deux ou trois mois auparavant, elle l'aurait fait. Elle devenait faible, trop faible. Et c'était ce qu'elle se disait à chaque fois, sans arriver à y remédier, quoique ça avait du bon, car les deux seuls amis qu'elle avait n'étaient pas inintéressants, au contraire, elle avait fait une bonne pioche.

La fille qui retenait maintenant sa plus grande attention de par sa présence s'était accroupie devant lui et lui faisait encore des reproches, comme si elle avait encore besoin de cela. Des reproches, elle s'en faisait déjà toute seule, sans y remédier car ça ne servait à rien. Alors un de plus un de moins, où était la différence ? La seule chose qui changeait était qu'il venait de quelqu'un d'autre. Quel changement !

- Je le sais, mais je peux pas m'empêcher de me fier à mes impressions premières. Je t'ai vue comme une gamine gâtée, voilà tout. Je cesserai d'être chiante quand tu m'épargneras ce regard, toi aussi t'es chiantes, et tu le sais.

Elle prendre cela pour des excuses. Ca y est, c'était foutu, elle avait parlé, un peu trop sans doute. Elle la verrait comme n'importe quelle fille, mais peut être qu'elle était ainsi, finalement ? Personne ne le savait, et surtout pas elle. Mais Majoren ne comptait pas s'excuser, et elle pensait que Tenver aurait assez de jugeote pour le savoir. Elle avait du la sonder, en quelques sortes, vu comme elle la dévisageait constamment. La brune se trouvait un peu pathétique, encore un peu, et elle lui déballait sa vie, mais où va le monde ? A présent, leurs deux regards étaient plongés l'un dans l'autre, puisque Majoren avait fixé ses yeux gris métalliques sur ceux, bleus, de la jeune fille aux cheveux rouges. La japonaise s'y voyait, elle se retrouvait dans ces yeux là. Un mélange d'émotions diverses et variées, tournant toutes autour de la haine, la colère et le tout masqué par l'indifférence, oui, elles étaient presque les mêmes à ce niveau là. Et n'importe qui qui les aurait croisées et observées plus de deux secondes auraient eu la même réaction. Sans aucun doute, il fallait que ces deux là se rencontrent un jour où l'autre, que ce soit en bons ou en mauvais termes, après tout qu'importe Et la brune jubilait presque à l'idée de la découvrir un peu plus. Non pas qu'elle l'intéresse plus que cela, quoique, si. Mais elle aimait apprendre ce qu'elle ne savait pas, surtout sur la "race humaine".

Elle lui avait balancé des commentaires pour le moins pas très agréables, même si, elle s’en fichait totalement, et il suffisait que Tenver lui dise d’arrêter pour qu’elle stoppe presque immédiatement et qu’elle lui explique pourquoi elle réagissait comme ça. Vraiment intrigante cette fille. L’anglaise esquissa un sourire alors qu’elle lui reprochait d’avoir un regard énervant. Ce regard lourd, pesant, hautain, elle l’avait toujours eu, enfin, aussi loin qu’elle s’en souvienne. Comme ses yeux sortaient de l’ordinaire au niveau de leur couleur, elle aimait jouer avec son regard. Elle le savait intense et pénétrant, mais elle s’en amusait. Quoique lui reproche cette fille, elle ne changerait pas, encore moins pour elle, qui avait presque la même lueur insolente et détestable dans ses pupilles grises. A quoi bon de toute façon, elle ne se voyait absolument pas aborder un regard respectueux et sympathique et encore moins, comme la plupart des jeunes filles maintenant, un air niais. Ce regard était pour ainsi dire, la seule chose qu’elle appréciait vraiment. Elle avait apprit à jouer avec, à le rendre insoutenable et exceptionnel. Tenver était vraiment fière de ses yeux, même si, quand elle ne mettait pas ses lunettes ou ses lentilles, elle se mettait à les insulter et à les détester du plus profond de son être. Elle faisait passer son plus clair et son plus commun était d’âme ; le détachement. Une expression et une attitude qui émanait d’elle comme si elle n’était pas vraiment ici, comme si elle était sans arrêt « ailleurs ». Ou comme si elle valait mieux que ça pour être là. Comme si les personnes qui l’entouraient à ce moment là ne la méritaient pas. Mais ce soir, elle était bien présente, parfaitement consciente de tout, elle ne voulait rien rater de cette entrevue avec Majoren. Comme si la brune captait toute son attention. Elle retenait le moindre de ses mots, le moindre de ses gestes, les imprimant chacun dans sa mémoire sans s’en rendre compte. Peu de gens arrivaient à retenir l’anglaise comme cela. Son regard n’en était pas moins froid, mais elle se passionnait étrangement pour cette fille.

« Désolée pour toi, mais sur ce point là, je peux pas faire autrement… »

Un instant, elle se trouva pathétique. Comment pouvait-on s’intéresser à une fille comme Majoren ? Elle n’avait, à part son regard aussi troublant que le sien, pas grand-chose à vanter. Elle ressemblait beaucoup à une fille ordinaire. Mais c’était justement ce regard qui faisait toute la différence. Tenver plissa les yeux et fixa plus intensément les iris gris de la jeune japonaise. Les bras croisés devant le visage, elle se doutait que Majoren ne pouvait pas voir grand-chose, elle. Peut importe, au moins, elle avait l’opportunité de la détailler. Mais son regard ne quitta pas les yeux de la jeune fille, elle n’avait pas envie de la regarder encore une fois, seul ses yeux l’intéressaient aujourd’hui. Derrière ses bras, Tenver grimaça, elle se trouvait ridicule, mais elle ne pouvait pas faire autrement à part fixer son interlocutrice. Ceci-dit, elle commençait à en avoir marre de cette méfiance perpétuelle et de ce défi entre les regards des deux jeunes filles. En même temps, vu l’aura de défiance qui émanait des deux filles, on les imaginait mal se sourire et se parler comme on parle à n’importe qui. L’anglaise aimait bien ce genre d’atmosphère, comme une tension électrique qui pourrait éclater à tout moment. Rare était les gens qui dégageaient une telle tension, s’en était presque palpable.

« T’es stressée ? »

Question stupide. Pire que stupide, inutile. Mais Tenver ne pouvait pas faire autrement, la question était sur le bout de ses lèvres, elle n’avait pas pu s’empêcher de la lui poser. L’anglaise décroisa les bras et se laissa tomber lourdement sur le sol, sans aucune délicatesse. Elle épousseta sa robe bien qu’elle fut maintenant assise et ramena ses jambes sous sa robe.

[ Pardon pour ce post pourrave >.<]

La japonaise n'avait pas pensé revoir la fille aux cheveux rouges qui avait su l'énerver suffisamment pour attirer son attention, et elle ne s'en était pas tellement mal portée. Mais malgré tout, elle avait repensé à cette fille là plusieurs fois, en voyant quelqu'un aux cheveux rouges, au hasard, où en pensant, tout simplement, n'ayant rien d'autre à faire. Habituellement, elle pensait aux rares amis qu'elle avait, qui étaient au nombre de deux, ou bien elle réfléchissait à son futur, inexistant qui plus est. L'ambiance était plutôt sombre, et ne l'aurait jamais été sans la présence de cet élément vivant, et quelque part, ça se compensait. Quelqu'un de quasi insupportable qui apportait un environnement qui plaisait à Majoren, voilà qui pouvait transformer le mépris de la jeune fille brune en indifférence, et peut être, lors d'un moment d'égarement sans doute, en intérêt. C'était sans doute la fatigue de ne pas avoir dormi depuis trois jours qui apportait cet égarement sans doute passager. Ceci dit, à la voir, on aurait jamais pu se douter qu'elle ne dormait pas, aucune cerne ne venait barrer son visage. Lorsque c'était le cas, elle ne sortait pas, jugeant que la côte d'alerte était atteinte depuis un bon moment, et en général, l'apparition de ces cernes était accompagné d'une difficulté à se déplacer plutôt sympathique dans son genre. La brune était ailleurs, se demandant comment elle en était arrivée à venir dans cette ruelle, pile à ce moment là. Encore une fois elle n'était pas allée en cours, méchante. A force, elle se ferait remarquer ... par son absence, mais qu'importe, rien ne valait la peine d'y aller, si ce n'était peut être croiser une tête connue et appréciée parmis la foule, mais justement, le problème, c'était bien ça : la foule. Trop de monde tue le monde, et Majoren ne supportait pas d'être entourée de moutons. C'était sans doute le cas de Tenver aussi, elle avait aussi une raison pour ne jamais se rendre en cours, mais après tout, est-ce que cela lui importait vraiment ? La seule chose qui fit sortir Majoren de son "absence" fut la voix de Tenver qui se fit entendre. En poussant vraiment la réflexion très loin, on aurait pu croire à des excuses, mais encore aurait-il fallu qu'on soie naïf, ce qui n'était pas le cas de la brune, malheureusement.

La jeune fille brune commençait à se sentir lasse de maintenir ce "lien" qui les unissait par les yeux, afin d'échanger sans doute quelques émotions masquées, mais le briser, fermer les yeux ou faire quoi que ce soit qui cassent ce lien aurait été une preuve de pure et simple faiblesse. C'est pourquoi Majoren ne fit rien, et se laissa observer de cette façon insupportable voir odieuse. Elle ne devait pas perdre la face contre cette fille, franchement, et puis, il faudrait qu'elle parte, ce qu'elle ne ferait sous aucun prétexte. Ce fut après quelques instants d'observation intensive que la fille aux cheveux rouges parla à nouveau. Majoren avait raison, dans le fond, ce n'était que rarement elle qui posait les questions, alors cette Tenver la "cherchait", en bien ou en mal, même si la seconde option paraissait la plus probable. Bien qu'elle ne la connaisse pas, la japonaise savait que la jeune fille qui lui faisait face n'était pas du genre à changer son caractère d'une seconde à l'autre, sautant du coq à l'âne. C'était quelque chose qui la rassurait en quelques sortes, les lunatiques approfondis, elle en avait marre. La question de Tenver était inutile, futile et si on poussait le tout, presque vide de tout sens. A quoi bon poser ce genre de question à ce moment là, et surtout à elle ? Majoren n'était jamais stressée, toujours indifférente, et les seules fois où elle perdait le contrôle d'elle même, c'était dans des situation extrêmes, généralement, elle était en colère plus qu'autre chose.

- Stressée, moi ? Jamais. Pourquoi, tu l'es toi ?

Majoren ne put s'empêcher d'esquisser un sourire moqueur, mais pas trop, elle n'était pas d'humeur à se forcer à montrer un quelconque sentiment, le naturel est toujours le plus fort, quoi qu'on en dise, et quoi qu'on fasse, après tout. Alors ce sourire disparut après quelques infimes secondes.

L’heure tardive de la soirée commençait à prendre le dessus sur le moral de Tenver. Voila presque trois jours qu’elle n’arrivait pas à fermer l’œil et, bien qu’elle ai réussi à tenir jusque là, elle commençait à ressentir une fatigue pesante. Mais, juste pour évaluer en quelque sorte Majoren, elle se devait de rester parfaitement éveillée et aux aguets, ne relâchant à aucun moment son attention. Peu de chose et de personne réussissaient à retenir son attention à un tel point, elle félicita la jeune fille d’être comme elle était. La japonaise aurait été autrement, aurait eu un autre regard ou une quelconque autre attitude, elle ne l’aurait même pas remarquée et lui aurait encore moins adressé la parole. La vie, l’existence de filles banales lui importaient peu, elle se fichait de tout, sauf d’elle-même. Narcissique ? A peine, Tenver aimait prendre soin de son apparence, mais pas au point de se regarder dans toutes les vitrines pour se recoiffer ou voir si elle était bien habillée. Elle se savait toujours parfaitement bien habillée, de son point de vue, et qu’en a sa coiffure, elle en faisait n’importe quoi. La preuve avec sa couleur assez excentrique, qui sortait vraiment de l’ordinaire. Elle les avait voulut bleus à l’origine, mais finalement, elle avait opté pour le rouge qui se mariait mieux à ses robes d’un autre temps, d’une autre époque. Les personnes qui l’entouraient avaient continuellement des difficultés à s’adapter à son style bizarre. Des cheveux rouges avec des robes noires à volant qu’on ne voyait qu’a la télé, on met du temps à s’y habituer. Elle s’était fait renvoyer de deux établissements pour son look qui « incitait les élèves à en faire autant ». Pas le moins du monde, elle se fichait totalement de ces ectoplasmes. Si ils voulaient la copier, et bien, qu’ils fassent, mais ils n’arriveraient jamais à avoir la même classe que Tenver.

Peu de chose arrivait à la toucher, à transpercer cette armure qui la protégeait de tout, des affronts, des insultes, des commérages, et plein de chose stupides dont l’être humain à besoin de se servir pour réussir à blesser quelqu’un. Mais parfois, une insulte n’est pas nécessaire, un mot, un regard bien placé et tout dérape pour celui qui est concerné. Même un changement brutal d’attitude ou de comportement que ce soit en bien ou en mal peu toucher profondément une personne. Tenver, elle, arrivait parfaitement à faire face. Seules les surprises, bonnes ou mauvaises, la rendait complètement incontrôlable. Elle ne supportait pas de ne pas être au courant de quelque chose d’important qui la concerne. Les changements d’humeur chez la jeune anglais étaient fréquents, elle était impossible à gérer. On ne pouvait rien prévoir par rapport à son caractère. Bien que toujours froides, elle pouvait passer de l’indifférence la plus totale à l’énervement brusque sans raison apparente. Une jeune fille sur laquelle on ne pouvait pas se reposer, s’appuyer. Voila surement pourquoi elle n’avait pas d’amis proches. Enfin, elle, elle ne loupait rien, c’était plutôt ceux qui l’évitaient à tout prix qui manquaient quelque chose ou quelqu’un d’important. Tenver n’avait jamais eu l’idée et surtout l’envie de s’intéresser à quelqu’un. Mais cette jeune japonaise juste en face d’elle méritait bien toute l’attention du monde. Pour d’autres personnes, elle aurait surement été détestable, tout comme Tenver, mais l’anglaise la trouvait plus qu’intéressante à présent, et elle ne la laisserait surement pas s’enfuir même si elle en avait l’intention.

« Tu plaisante… comment pourrais-je être stressée si je ne sais même pas ce qu’on ressent lorsque qu’on l’est ? »

C’était vrai, elle n’avait jamais ressentit de stress à l’état pur. Elle l’avait seulement vu ou aperçu sur les autres, mais sur elle, aucunement. Le stress des examens ? Elle les avait passé de justesse, mais sans être anxieuse. Tenver était venue les mains dans les poches, sans vraiment se soucier du reste à part de ce qu’elle allait faire une fois que les cours serraient terminés pour la journée. Elle ne savait absolument pas ce que signifiait être stressé. Il y avait d’autre chose comme ça aussi, par exemple, la fierté lorsqu’on a réussi quelque chose de difficile, ou encore, la joie lorsque l’on retrouve quelqu’un que l’on n’a pas vu depuis très longtemps. Elle n’en savait rien, rien de tout cela. Et elle n’avait aucune envie de les ressentir. Elle trouvait ça puéril, pathétique et misérable, comme une preuve de faiblesse.

[ Niéhéhéhé :twisted: ]

Le doute n'était à présent plus possible, Majoren en avait marre, elle s'ennuyait ferme, maintenant. Se regarder dans le blanc des yeux n'avait rien de particulièrement palpitant, surtout quand ça dure des minutes entières sans interruption. Les rares fois où elle agissait, c'était uniquement lorsqu'elle se rendait en cours et qu'un professeur l'interrogeait, alors qu'elle, elle ne voulait que rester tranquille et faire semblant d'écouter. Autant dire que c'était très rare car, pour peur que son humeur soit telle qu'elle se force à aller en cours, les professeurs ne cherchent même pas à lui faire dire quoi que ce soit. En bref, l'ennui la gagnait. Et que les yeux de la personne qui lui faisait face soient d'un bleu impressionnant et très profonds ou marrons et emplis de naïveté, rien n'aurait changé cela. Ce regard auquel elle avait droit était l'un des plus intéressants, mais après facile cinq minutes à s'observer, il y a prescription. De plus, ça n'avait aucun but, et ça ne servait à rien, aucune des deux n'était stressée, alors sans doute son interlocutrice s'ennuyait aussi. Lorsqu'on ne peut pas se réjouir du stress de la personne opposée, il n'y a aucun intérêt à ce genre de joutes oculaires. Les rues étaient de moins en moins peuplées, et le peu de personnes qui étaient encore là n'étaient certainement pas à proximité de cette ruelle sombre. Il y vaisait de plus en plus noir, des nuages masquaient la lune. Depuis la rue que rejoignait ce cul de sac, on ne voyait rien, à part peut être un reflet rouge, éclairé par le peu de lumière qui osait s'aventurer dans le coin. Un bruit retentit, mais aucune des deux ne bougèrent, un chat mal nourri mais malgré tout assez rapide passait en courant, et fit tomber une poubelle.

Très peu de temps après que Majoren eut posé sa question, Tenver lui répondit, à vrai dire, elle n'avait pas l'air d'être le genre de fille à faire attention à ce qu'elle disait pour ne pas vexer. C'était tant mieux, et voilà un point commun. Majoren avait oublié ce qu'était le stress, elle ne l'avait ressenti que une ou deux fois, lorsqu'elle commençait à s'occuper de son frère, et qu'il disparaissait de sa vue, elle ressentait la peur qu'aurait ressentie n'importe quelle mère, mais le problème est que ce rôle ne lui allait pas, à elle, petite fille qui savait parler correctement seulement depuis un an. Depuis, elle était devenue qu'un corps ne ressentait que les émotions les plus perverties de ce monde. Certaines, elle les avait découvertes en arrivant à l'école, lorsqu'elle était plutôt fatiguée, et que, par chance ou malchance, quelqu'un n'était pas loin et lui faisait découvrir la tristesse ou la joie, voire même la compassion. Peu de personne avaient réussi, mais il y en avait au moins un, et c'était déjà ça. La soirée devenait de plus en plus intéressante, au fur et à mesure qu'elle découvrait un peu plus son interlocutrice, qui s'avérait être plus proche d'elle qu'elle ne le pensait, en fin de compte. Peut-être n'était-elle pas si gamine que ce qu'elle avait laissé paraître au premier abord, mais cela n'empêcherait pas Majoren de la regarder ainsi. Ca lui manquerait, de toutes façons tout comme son regard hautain manquerait à Majoren si elle arrêtait. Elle la prendrait pour quelqu'un de trop sympathique et qui fait attention aux autres, chose dont le contraire avait attiré son attention. Sans doute perdrait-elle une grande partie de son intérêt si elle se pliait aux désirs de la brune.

Le silence devenait pesant, et l'ennui aussi, Majoren ferma les yeux un instant, réfléchissant puissamment. Que pourrait-elle faire, à part s'en aller, franchement, il n'y avait rien de passionnant, qui ne pourrait choquer la fille aux cheveux rouges. Fumer ? Non, ça ne supprimait pas l'ennui, et elle n'en ressentait pas le besoin, grand bien lui fasse, elle ne détruirait pas ses poumons maintenant. De toutes façons, ce n'était pas plus mal, et ça faisait depuis quelques temps qu'elle n'avait plus fumé, ça ne lui manquait pas. Boire ? A quoi bon, l'alcool rend les gens pathétique, et là encore, elle n'en ressentait pas le besoin. En plus, elle n'en avait pas. Que faire mon dieu, que faire ? Elle n'avait pas son Mp3, elle n'en avait pas besoin. Rien d'intéressant à l'horizon. Et elle n'engagerait pas la conversation, c'était certain. Ce fut tout de même après quelques secondes, formant bientôt une minute qu'elle sut ce qu'elle ferait, ça l'amuserait peut être un peu, faute de plaire à Tenver. Tout le monde devine, n'est-ce pas. C'était vicieux, mais amusant. En plus, cette fille était imprévisible, elle pourrait l'empaler sur un morceau de verre comme l'embrasser à son tour. Etait-elle joueuse ? Peut être. Elle s'approcha silencieusement, à genoux maintenant pour être à sa hauteur, vu qu'elle était assise,et approcha son visage du sien avec une vitesse qui ne ressemblait pas à de la précipitation, mais plus à de l'habitude. Lorsque ses lèvres se posèrent sur celle de la fille aux cheveux rouges, elle faillit avoir un sourire moqueur, mais elle s'en garda bien, son expression était donc tout simplement indifférente, et, les yeux fermés, elle gardait ce sourire en elle, masqué. Elle ne la touchait pas, comme pour montrer que, pour l'instant du moins, ce n'était qu'un jeu. Mais les règles, personne ne les connaissait, pas même Majoren, et c'était cela qui le rendait d'autant plus excitant. L'ennui n'était plus. La brune avait du mal à tenir droite, et écraser la tête de Tenver contre le mur de derrière n'était pas judicieux, aussi, elle s'appuya sur sa main gauche, qu'elle posa sur le sol, de l'autre côté de sa soit disant camarade de classe. Tout ça avait l'air sincère, d'apparence.

L’anglaise se demandait bien se que pourrait faire Majoren. Elle-même n’avait aucune envie d’engager une quelconque conversation ou encore esquisser un geste qui permettrait aux deux jeunes filles de se parler. De toute façon, elle ne se voyait pas échanger des politesses ou quelques mots sympathiques à son égard. L’envie n’y était pas donc elle ne ferait aucun effort. Bien que l’ennui et l’attente d’une possibilité se faisait ressentir, Tenver ne voulait pas laisser la brune, elle souhaitait voir laquelle des deux céderait la première. Elle avait quand même un doute, la patience n’était pas une des qualités et elle s’était déjà grandement étonnée d’avoir réussi à rester aussi près de Majoren sans faire un geste qui trahirait son agacement, qui ne tarderait pas à arriver, ou dire un mot ou une phrase avec le plus grand des dédains. Mais la jeune anglaise désirait par-dessus tout tenir et rester, elle voulait vraiment que ce soit la brune qui débute ne serait-ce qu’une bride de conversation. Peut-être l’avait-elle suivit jusqu’ici pour ne pas continuer à tourner en rond, mais maintenant, il en était tout autre. Peu importe qu’elle se perde une énième fois, son attention était rivée sur la fille brune en face d’elle, et elle essayait de se convaincre que cela continuerait assez longtemps pour que Majoren s’avoue vaincue, Mais plus le temps passait sans qu’aucune des deux ne fassent un geste ou ne dise un mot, plus ses pensées tentaient de la faire fléchir. A présent, Tenver luttait de toutes ses forces pour qu’aucun mot ne sorte de sa bouche ou que ses membres ne fassent un geste. Contre toute attente, au même moment où elle cédait à son envie de parler, ce fut Majoren qui prit le dessus et les lèvres de la brune vinrent toucher les siennes.

Sous le choc, l’anglaise écarquilla ses yeux bleus de stupeur. Elle avait imaginé que Majoren aurait pu faire un autre geste, mais celui-là, elle ne s’y attendait absolument pas. Ses pensées étant ailleurs, elle ne l’avait même pas vu approcher et maintenant, elles étaient encore plus loin. Elle aurait voulut, plus qu’à tout autre moment, faire un geste, s’écarter de la japonaise pour reprendre ses esprits. Mais son corps refusait de lui obéir, son cerveau était focalisé sur Majoren, et elle n’arrivait à rien. Pour la première fois depuis très longtemps, elle n’arrivait pas à gérer une situation qui sortait de l’ordinaire ni de la faire basculer à son propre avantage. Elle qui détestait les surprises, elle ne pouvait pas dire que celle-ci était désagréable. Tenver ferma les yeux pour chasser cette pensée, elle avait été prise de vitesse, ça elle ne pouvait pas le nie, mais au point de rester figée comme une statue alors que la brune l’embrassait, ça frôlait le risible. La jeune fille avait l’impression que ce baiser durait inlassablement alors que cela faisait à peine quelques secondes que Majoren l’avait approchée. Comment pouvait-elle se laisser toucher comme cela ? Et par cette fille en plus ? Non pas qu’elle la dégoûtait, loin de là, mais elle trouvait qu’elle était bien entreprenante. Elle devait se pourtant savoir, à vue d’œil, que Tenver aurait peut-être mal réagit. Qu’elle lui aurait enfoncé son poing dans le visage, l’aurait insultée de tous les noms possibles ou lui aurait brisé le genou (réf). Mais elle avait quand même osé. Enfin de compte, cette fille ne prenait tout ça que pour un jeu. Mais si elle l’amusait tellement, autant le faire à deux.

Retrouvant toutes ses facultés, Tenver décala son visage de celui de Majoren. De très peu, pour que la brune puisse sentir son souffle sur sa figure. Elle avait rapidement retrouvé son regard, froid, dédaigneux, et hautain qui faisait tout son charme. Un sourire joueur et amusé s’étalait sur ses lèvres. Elle refusait de s’arrêter là, si la japonaise voulait jouer, autant continuer franchement, et aller jusqu’au bout. A présent, peu de chose l’intéressait, voir même rien du tout à part de rendre la monnaie de sa pièce à la fille en face d’elle. Son sourire disparut aussi vite qu’il était apparut, Tenver se rapprocha encore plus de visage de Majoren. Elle passa une main derrière la tête de la jeune fille et plongea ses doigts sans ses cheveux noirs. L’anglaise avança son visage et juste au moment où ses lèvres étaient censées rentrer en contacte avec celles de la brune, elle la fit basculer en arrière, par terre. A genoux près d’elle, la tête à deux centimètres de celle de la jeune fille, elle posa ses mains de chaque côté et la regarda avec une lueur enjouée dans ses magnifiques iris bleues. A aucun moment elle ne cligna des yeux, ne sourit ou bougea. Ses cheveux rouges caressaient le front de Majoren, elle ferma les yeux et lentement, très lentement, elle parcouru les deux centimètres, tout en fixant les yeux de la jeune fille. Pour la deuxième fois, ses lèvres rencontrèrent celles de la brune. Son baiser dura plus longtemps, fut plus ferme que le premier. Puis, au bout de quelques instants, elle se redressa et s’assit. Son sourire revint, mais elle fixait Majoren plus durement. Tenver s’appuya conter le mur et tapota ses lèvres avec son index en laissant échapper un bruit de contentement quelque peu provocant.

Quelle situation pour le moins bizarre. Les deux filles ne se connaissaient di d’Eve ni d’Adam, si on ne comptait pas cette fameuse rencontre sur les toits de l’école le jour de l’anniversaire de Tenver. A part son nom et le fait qu’elle soit dans la même classe qu’elle, Tenver ne savait pas grand-chose de la brune. Et voila qu’elles s’embrassaient pour rompre leur ennui. Si tout le monde faisait la même chose, on verrait ça partout. Mais l’anglaise savait bien qu’elle n’aurait embrassé personne de cette façon, sur un coup de tête, à part Majoren. Il fallait oser, et elle avait tout à fait le profil pour. On ne pouvait pas en attendre moins. A présent, il n’était même plus question d’ennui. Elle s’amusait comme elle ne s’était pas amusée depuis longtemps, et à croire qu’embrasser Majoren était pire qu’intéressant, car elle n’arrivait plus à penser à autre chose. Quelqu’un aurait put l’appeler en regardant dans la petite ruelle sombre, elle ne l’aurait même pas entendu. Elle trouvait cette fille de plus en plus intéressante, de plus en plus passionnante. Peu de personne aurait trompé leur agacement de cette manière, s’en était presque exceptionnel. Embrasser une fille qu’on connaît à peine, voir pas du tout, dans une ruelle à la tombée de la nuit, n’était-ce pas une situation qui arrivait peu de fois ? Elle n’aurait pas réagit mieux en étant bourrée. Bien que là, elle avait totalement conscience de ce qu’elle faisait. Et elle était sûre de ne pas du tout le regretter. Tenver aurait été sous l’emprise de l’alcool, elle aurait été surement beaucoup plus loin. Là encore, elle n’aurait eu aucun regret, mais elle détestait par-dessus tout ne pas avoir pleine conscience de ses actes, ne pas se contrôler, agir par instinct. C’était une chose qu’elle méprisait. Et c’était pour cela qu’elle évitait de boire la plupart du temps. Cette soirée devenait vraiment bizarre. D’une atmosphère tendue, presque insoutenable et insupportable, on était passé à une ambiance qui reposait sur un jeu interdit, sur un jeu à demi tabou. Mais, apparemment, ces deux jeune filles prenaient un certain plaisir, presque sadique, à y jouer. L’anglaise se fichait totalement du reste, la rue pouvait s’enflammer, ou la Terre explosé, elle n’aurait donné sa place à personne. Même pour tout l’or du monde. Avoir rencontré cette fille était une aubaine, et cela la sortait de sa torpeur habituelle. Effectivement, sa vie n’était pas très mouvementée ces derniers temps, rarement pimentée, mais là, elle avait ce qu’elle voulait. Majoren aussi semblait ne plus s’ennuyer et heureusement, s’amuser c’est bien, mais à deux, c’est toujours mieux. La soirée prenait vraiment une tournure qui sortait de l’ordinaire. On ne voyait pas tout les jours et dans tout les coins de rues une fille aux cheveux rouges, habillée plus qu’exceptionnellement, embrasser une autre dans une ruelle assombrie. Quel parfait fantasme pour certains. Tenver regarda Majoren se rapprocher d’elle, devinant tout de suite ce qu’elle allait faire. C’est un jeu où l’on joue chacun notre tour. Elle voulut lui répondre, mais la brune fut plus rapide. Elles s’embrassèrent pour la troisième fois et Tenver sentait bien que ce ne serait pas tout. Elle mit rapidement fin à ce baiser, remarquant que c’était toujours elle qui le faisait, et s’appuya encore contre le mur, un sourire espiègle sur les lèvres.

« Je te le fais pas dire…c’est mieux qu’avant… »

Pas besoin de faire un dessin, il n’y avait rien de comparable. Peu de chose aurait réussi à détrôner l’intérêt de cette soirée, voir même rien du tout. Son caractère était toujours bien présent, mais difficile à utiliser lorsque l’on embrasse quelqu’un. L’anglaise tourna la tête et fixa sa main où une bague noire représentant une rose était assez difficile à distinguer avec le manque de luminosité. Aurait-elle put avoir une autre réaction alors que la brune l’embrassait pour la première fois ? Aurait-elle put la repousser violemment ou partir ? Sûrement, ses réactions n’étaient aucunement devinables à l’avance, et prendre l’autre à son propre jeu étant beaucoup mieux. La jeune fille redressa la tête. Ses yeux brillaient d’un amusement à moitié caché, et son sourire était tel qu’il la rendait presque perverse. Elle passa une main dans ses cheveux, histoire de les remettre en place après que la main de la jeune japonaise soit passée. Tenver laissa retomber son bras le long de son corps et cligna des yeux. Elle approcha sa tête mais n’embrassa pas Majoren. Ses lèvres frôlèrent juste celles de la brune sans y rester.

Tenver ne put s’empêcher d’éclater de rire lorsqu’elle entendit la brune se plaindre qu’elle commençait à s’ennuyer. Ce n’était en rien un rire sincère et naturel, mais plutôt un de ceux dont on a l’impression que la personne qui rigole se moque de vous. Peut-être était-ce le rire à titré de l’anglaise, qui sait, elle ne rigolait pas souvent. Quand elle rigolait, c’était plutôt pour faire comprendre à quelqu’un qu’il n’avait aucune importance et ce qu’il venait de dire encore moins. Mais là, cet éclat de rire, bien que faux, était sortit tout seul, sans qu’elle puisse y rajouter une note plus agréable. Chose qu’elle n’aurait absolument pas faite. Non pas que Majoren ne lui inspirait aucun intérêt, au contraire, il lui semblait qu’elle avait rigolé presque sincèrement. Bien qu’en entendant son rire, on avait plutôt envie de la baffer. Ce genre de jeux, il était vrai, était intéressant aux premiers abords. Qui ne se serait pas plus dans cette situation, peu de personne dans tout les cas. L’anglaise se sentait vraiment à l’aise, cela était peut-être étrange à dire, mais véritablement, cette fille lui permettait d’être, en quelque sorte, elle-même. Pas besoin de cacher les faux semblants et de jouer le rôle de quelqu’un d’autre, non. Sans aucun doute, cette fille lui plaisait. Indiscutablement, Tenver n’avait envie d’être à aucun endroit sauf celui-là. Et elle n’aurait échangé sa place pour rien au monde. Ses yeux bleus brillaient de contentement et un sourire espiègle vint prendre sa place sur ses lèvres à présent libres. Il était difficile de cerner ce que voulait la brune, un coup elle l’envoyait paître, ce qui ne la touchait pas plus que ça. A un autre moment elle l’embrassait sans retenue, et voila maintenant qu’elle disait s’ennuyer de sa présence et que leur petit jeu devenait répétitif. Elle aurait aimé voir le regard de certains, voir leur réaction, s’il trouvait cela étrange ou banal. La société ne changeait pas en un instant, mais la jeune fille aurait tout de même été amusée de voir la tête des passants. Elle qui aimait le regard des autres sur elle, elle ne se gênait pas pour ressentir cette présence à tout moment. Même dans le plus insolite.

« Mademoiselle est très vite ennuyée… »

Très lentement et avec une attitude supérieure, Tenver se leva et épousseta sa robe machinalement. Son regard chercha automatiquement son interlocutrice et s’arrêta sur sa nuque. Il était vrai qu’elle trouvait que Majoren exagérait un peu en lui disant que l’ennuie la gagnait. Mais cela, et elle s’en doutait, rajouterait sûrement plus de piquant à la situation. Oui, cette fille avait de l’imagination et il était sûr qu’elle avait déjà vécu ce genre de situation. Cela était devinable, elle agissait comme si elle savait les mouvements qu’elle allait faire avant même qu’elle y pense. L’anglaise était quelque peu plus réservé, si seulement ce mot convenait, et répondait gestuellement selon ce que l’autre faisait avant. Elle ne passait pas sa vie à embrasser des filles étranges dans un coin de rue. Non, elle préférait se faire remarquer pour d’autres choses, d’autres « activités ». Même si embrasser des filles, elle préférait par rapport aux garçons. Mais seulement un certain genre de filles, celles que l’on ne croise pas tout les jours dans la rue, celle dont on a peur ou dont on craint les réactions. Les demoiselles mystérieuses, oui, ça c’était ça tasse de thé. Et malheureusement pour Tenver, des comme ça, il en existait pas énormément.

« Je crois que bien des choses ont une fin… »

Oui, elle trouvait que cela était allé assez loin aujourd’hui. Il fallait toujours en garder pour un autre jour, pour une autre rencontre, qui, dans ce cas là, était imminente. Elle savait très bien qu’elles se reverraient. Aucun doute là-dessus. La jeune fille s’approcha de la brune rapidement et déposa un léger baiser sur son cou. Tenver se retourna, puis, plongeant un main dans sa poche, elle se dirigea vers la rue d’où s’émanait une légère lumière plus frappante que dans la petite ruelle. Faisant dos à Majoren, elle leva une main, sans la regarder et commença à avancer lentement. Sachant éperdument qu’elle allait se perdre.

« On se reverra… »