Réapparition [libre]

Invité

Voilà bientôt trois mois que je suis parti et ce pensionnat n'a presque pas changé , se dit Shil' en regardant autour d'elle, comme si elle revenait tout suite de longues vacances et non d'une fugue.
De fait, elle ne serait pas revenue de sitôt si ses parents ne l'avaient pas retrouvée et menacée de la faire revenir chez eux si elle ne retournait pas au pensionnat puis y restait pour de bon. Ils avaient bien sûr essayé de lui faire dire ce qui l'avait poussé à s'enfuir comme ça, sans crier gare mais rien n'y avait fait, elle ne leur avait rien dit. A vrai dire, il n'y avait eu aucune raison logique à son départ. Elle avait juste eu envie de voyager un peu sur un coup de tête, la preuve: elle n'avait rien pris sur elle, pas de brosse à dents, pas de vêtements de rechange, rien. Bien évidemment, quand elle le leur avait dit, ils ne l’avaient pas cru. Elle se souvenait encore du soupir fatigué de sa mère ensuite et de la colère de son père.

" Nous en avons plus qu’assez de tes bêtises, Shilukya, ta mère et moi t’avons envoyé dans cette école en pensant qu’étant donné que c’était ton choix, ta décision d’y entrer, tu ferais moins de bêtises. Mais, il s’avère que ce soit pire. Que veux-tu réellement ? Ceci est ta dernière chance, ma fille, de décider quelque chose par toi-même. Si tu nous déçois une fois de plus, tu seras déshéritée et considères toi comme orpheline. "

A ces mots, sa mère avait bien sûr tenté de faire fléchir son père mais lorsque celui-ci avait décidé quelque chose et l’avait dit sur ce ton ferme et définitif, sa décision était en général irrévocable. Sur le moment, elle avait été trop choquée pour ressentir quoi que ce soit ou même saisir complètement le sens de ces quelques phrases. Elle y avait ensuite passée la nuit, à se torturer la tête pour savoir quoi faire, mais finalement, il lui avait semblé plus simple de retourner à son point de départ, au pensionnat. Après tout, elle n’avait connu là bas qu’une seule personne qui ne lui avait pas laissé un souvenir très agréable et elle voulait faire un dernier essai en faisant son maximum pour assurer cette fois. Son père tint sa promesse et ne lui dit rien quand elle repartit pur le pensionnat.
Maintenant qu'elle y était arrivée, Shil' se demandait si elle avait eu raison de revenir finalement. Elle n’y avait pas pensé au début mais l’année était déjà bien avancée et les gens avaient eu le temps d’apprendre à se connaître alors qu’elle venait de débarquer. Elle se sentait comme une intruse dans ce monde où tous ou presque se connaissaient. Elle se sentait tout à coup anxieuse en montant les marches pour entrer dans le hall.
Elle resta donc plantée dans le hall à regarder le plafond et à se demander quoi faire ensuite parce que là, elle n'avait qu'une envie prendre ses jambes à son coup. Il faut dire qu'au fond, elle reste une fille assez timide alors se retrouver dans un environnement étranger, dans lequel, elle avait de grandes chances de se faire rejeter, était pour elle comme une épreuve insurmontable. Elle attendait donc l'âme charitable qui viendrait lui adresser la parole, cette personne sera peut-être son premier ami.
Elle sourit en pensant à la stupidité de cette idée, qui eut tout de même pour effet de la détendre. De toute façon, qui viendrait lui adresser la parole comme ça, sans raison valable ? Les gens n’avaient pas que ça à faire après tout. Mais bon, elle ne désespérait pas de tomber sur la perle rare qui n’aurait rien d’autre à faire que parler à des inconnus. En attendant cette perle rare, elle n’allait tout de même pas prendre racine au milieu du hall à regarder le plafond : elle finirait avec un torticolis. Elle commença donc à regarder les tableaux d’affichage en chantonnant.

Ah ! Enfin quelque chose digne d’intérêt !

Elle venait de voir une affiche que le prochain concert de son chanteur préféré se déroulait à Tokyo dans quelques semaines.

C’est un signe du destin, je devais revenir ici, se dit-elle en riant doucement. A la voir aussi stoïque on ne pourrait pas dire qu'au fond d'elle, elle était en train d'exploser de joie. Seuls ses yeux montraient l'étendue de cette joie intense. Sans cesser de chantonner, elle continua à dévorer des yeux l'affiche.

Invité

L’avion venait tout juste d’atterrir sur la piste. « Welcome to Tokyo ! » clignotait sur l’écran lumineux qui se trouvait à l’entrer de l’aéroport. Tatsuya était vêtu d’un manteau blanc comme neige et avançait jusqu’à un taxi que ses parents avaient réservé. La main sur la bouche, il contempla l’extérieur à travers la vitre teintée. Son esprit était en train de se détendre en se répétant en boucle l’énigme qu’il avait préparé à ses chers cousins qui devaient sûrement être au de son arrivé.

Au bout de quelques minutes, le métis se laissa bercer par la douce mélodie que le chauffeur avait mit dans la voiture. Le voilà plongé dans un monde imaginaire où ses souvenirs ressurgissent. C’est le même cauchemar à chaque sommeil. Il revoyait la scène de l’accident, son coma, son amputation etc…Toujours la même vidéo qui repassait.

- Monsieur ? Monsieur ?

Une voix masculine le sauva de son rêve. Il s’étira dans le véhicule. L’homme lui indiqua l’école de l’index. Tatsuya descendit, prit ses bagages dans le coffre, puis direction l’internat. Un pion était posté là et n’avait pas l’air très amical. Il lui disait qu’il allait prendre ses affaires et les déposer dans sa chambre. Pour cause, son père avait signalé au directeur de son handicap. D’accord il porte une prothèse, mais ce n’était pas une raison pour qu’on porte ses bagages c’était peut-être un ado, mais de là à être au petit soin avec lui, fallait pas exagérer non plus.

Il refusa alors l’aide du surveillant et continua sa route. Il traversa la grande cour en regardant tout autour de lui. Des bancs en bois étaient éparpillés un peu partout. Avec la brume, des minuscules gouttes d’eau étaient dessus. Dans l’ensemble, le concierge de l’établissement s’en fichait visiblement de l’hygiène. A moins que le directeur n’en avait pas encore engagé.

C’était à présent au tour du hall d’aller rendre une petite visite. Le surveillant était d’accord pour ne pas l’aider à prendre les valises, mais il devait au moins avoir sa clé de chambre. Contrairement à l’extérieur, le lieu était bien plus propre. Le sol carrelé brillait avec la fine lumière des lampes. Un peu plus loin, un panneau d’affichage comportant les futurs élections des élèves et la liste des professeurs absents. A côté, il vit une demoiselle qui observait quelque chose.

Par curiosité, il s’approcha de la jeune fille. Il suivait le regard de celle-ci, c’était une affiche de concert. Un chanteur aux cheveux multicolores était au premier du poster. Cela devait sûrement être une de ses idoles. Tatsuya eut un petit sourire à la remarque qu’elle venait de lui dire. Serait-ce sa première victime à subir une de ses énigmes. Il se plaça parallèlement à l’inconnue et lui chuchota à l’oreille :

- Je peu donner des coups à tout le monde. Je suis souvent le bienvenue et il ne se passe pas un seul instant dans le monde sans que quelqu'un me voit. Qui suis-je?

Son sourire se métamorphosa en sourire un peu sadique. Commencer sa journée par une énigme, rien de tel pour débuter les présentations. Il se retourna face à elle. Il lâcha la manche de sa valise mais garda sa béquille de l’autre main.

Invité

Malgré sa surprise quand elle a entendu la VOIX, elle avait pu contrôler ses muscles et ne pas sursauter et même dans la mesure du possible rester quasi impassible. Il faut dire qu’elle tenait beaucoup à sa réputation de « la fille sans peur et forte ». D’ailleurs, on aurait presque cru qu’elle ne l’avait pas entendu si elle n’avait cessé de chantonner et si sa respiration ne s’était un peu accélérée.

_ Si tu as le temps de faire des devinettes alors, tu en as surement assez pour te présenter d’abord non ?, lui souffla-t-elle d’une voix basse sans bouger d’un iota de sa position car elle essayait toujours de retrouver sa contenance.

A vrai dire, elle ne l’avait pas vu venir ! Elle était si bien l’instant d’avant, seule avec miyavi (parce que c’est de lui que parlait l’affiche), qu’elle avait fait abstraction du monde extérieur.
Sentant son self-control revenir à la normale, elle se retourna pour regarder l’inconnu et décider si elle allait ou non lui expliquer le fond de sa pensée de la manière forte. Elle prit tout son temps pour se tourner vers lui en le toisant d’un air énervé. Quelque part au fond de sa tête résonnait une voix qui lui rappelait ses belles résolutions de faire du premier venu son ami (ou à défaut d’être un minimum gentille avec cette personne), une autre lui susurrait qu’elle était pleinement dans son droit en voulant lui dévisser la tête juste pour avoir OSE percer sa bulle de rêve, et une petite dernière l’invitait à préférer le dialogue à toute forme de violence qui de toute façon ne résolvait rien.
Cette dernière la fit sourire très légèrement étant donné que c’était celle de la raison et par conséquence, celle qui avait le moins de raison d’être à cet instant.

Décidément, cette petite entrevue avec papa a fait bien plus de dégâts que je ne l’avait cru !, murmura-t-elle pour elle même en fermant un bref instant ses yeux.

La légère modification de son humeur eut tout de même pour effet de la calmer un peu, en tout cas assez pour prêter plus d’attention au garçon qui se tenait devant elle. Elle trouva détestable cette façon qu’il avait de sourire. Il lui donnait l’impression de la regarder de haut, comme si elle n’était rien d’autre qu’un jouet à ses yeux. Cette pensée, bien qu’énervante, la fascina tout de même. Cela ne lui arrivait pas si souvent que cela de trouver quelqu’un qui suscite autant de réactions en elle-même en à peine quelques minutes A part le sourire si énervant, elle ne prêta pas plus d’attention que nécessaire au reste de sa personne. Bien sûr, elle avait noté ses béquilles mais bon elle se fichait un peu de savoir pourquoi il en avait, il le lui dirait si jamais elle arrivait à le supporter et s’il en avait envie. Elle n’était pas du genre à fourrer son nez dans les affaires des autres, elle avait d’autres occupations bien plus plaisantes. Toujours énervée, pour la forme surtout, elle lui demanda

_ Est ce que je suis censée te traiter d’une manière spéciale à cause de tes béquilles ? Genre porter ton sac ou même te sourire d’un air gêné pour te faire croire que tu vaux la peine que je compatisse pour toi ?, sans même lui laisser le temps de répondre, elle continua, En fait, je m’en fous pas mal de ta réponse, ce qui m’importe en réalité, c’est d’abord de savoir pourquoi tu souris de cette manière et ensuite, donnes moi une seule, bonne raison de ne pas te coller un pain pour m’avoir…

Elle s’arrêta juste avant de dire quelque chose de compromettant comme « pour m’avoir fait peur » ou « pour m’avoir fait sortir d’un si beau rêve » (elle tenait à sa réputation), elle dit plutôt

_ Pour m’avoir parlé sans t’être présenter avant parce que à moins d’être bigleux, il est absolument évident que tu me dois respect et admiration, g-r-i-n-g-a-l-e-t.

Elle lui adressa un sourire franchement radieux cette fois ci, à croire qu’elle lui parlait de tout et de rien, comme si de rien n’était. C’était juste son excuse fumeuse qui la faisait marrer,

* « Admiration » ?, et puis quoi encore ? « Adoration » ? Vraiment, cette entrevue m'a complètement chamboulée! Je ne me reconnais même plus.*

Invité

Exploser de rire devant l’inconnue n’aurait fait qu’attirer la fureur de la demoiselle. Même si l’envie ne lui manquait pas. Sauf qu’à première vue, elle ne lui semblait absolument pas amicale du tout. La première chose qu’il aurait fait serait de retourner en arrière. Or, la phrase qu’elle venait de lui jeter en pleine figure ne lui plaisait guère. Surtout l’instant sur sa béquille, il ouvra sa bouche pour dire un mot, mais il la referma rapidement car elle reprit rapidement la parole. Il attendit qu’elle finisse son discours. Tatsuya n’en croyait pas ses oreilles par ce qu’il venait d’entendre. Plus particulièrement la toute dernière phrase.

Citation :: « Il est absolument évident que tu me dois respect et admiration, gringalet. »

- Je ne vous ai pourtant point, fait une quelconque demande. J’ai une béquille mais je n’ai pas besoin que vous COMPATISSIEZ pour moi, ce serait trop aimable de votre part ! Au moins, je ne bave pas devant…un chanteur…De plus, je ne vois pas ce que vous pouvez avoir de plus que les autres pour que je vous respect et admiration, dit-il en faisant une grimace et la regarda de haut en bas. Je veux bien avec le respect, mais pas d’admiration. A moins que vous portez du sang royal…

*Et puis quoi encore ? Tu ne veux pas que je me prosterne à tes pieds, non ? Tsss…*

La colère commençait à monter cela se ressentait dans le son de sa voix, mais ça ne l’empêchait pas de se contrôler. Il n’aimait pas prendre cela au quart de tour, mais elle avait pousser le bouchon un peu trop loin à son égard. Qui était-elle pour qu’elle demande qu’on l’admire ? Il respira un bon coup pour à nouveau faire face à la jeune fille.

- Tatsuya Tomohisa et vous ? Et excusez moi pour ma devinette…La prochaine fois je tournerai sept fois ma langue dans ma bouche avant d’en poser une. Puis aussi désolée de vous avoir interrompu…

Il passa sa main dans ses cheveux et fixa l’étudiante, puis se tourna de nouveau vers le chanteur. Il était assez grand sur l’affiche, brun avec des mèches colorées. Il prenait appuie sur sa béquille en posant sa main sous son menton et observa l’affiche comme un personne qui admirerait une œuvre d’art. Il essayait de comprendre la manière dont la photo a été prise. Tatsuya pouvait le parler sans problème, par contre pour le lire et écrire, ce n’était pas gagné. Il tenta de lire l’écriture japonaise. Comme il avait du mal à comprendre pourquoi autant de jeunes filles en pinçait pour des groupes ou des célébrités qui sont, pour lui, des personnes comme n’importe qui. Il décida alors de lui demander ce qu’elle pouvait bien le trouver.

- Si je puis me permettre…mais qu’est-ce que vous lui trouvez ?

Ce serait un bon débat pour connaître l’avis d’une fille qui est intéressée par cet artiste. Encore faut-il qu’elle veuille bien lui répondre au lieu de détourner la conversation.

Invité

Elle se calma au fur et à mesure que le gamin parlait. Il faut aussi dire qu’elle se rendait compte du ridicule de sa réaction. Elle se contenta de répondre distraitement à sa question, en regardant les affiches.

Mon nom est Shilukya Van Hells. Je suis en troisième année et comme toi je viens d’arriver dans ce pensionnat alors je ne connais personne.

Elle eut un petit sourire en le regardant du coin de l’œil et continua :

A vrai dire, j’avais décidé d’être amicale avec la première personne à m’adresser la parole alors j’aimerais qu’on reprenne tout à zéro, maintenant que les présentations sont faites. Je suis désolée de m’être comportée de cette manière. S’il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour me racheter, n’hésite pas à me le faire savoir.

Elle fit une pause pour voir sa réaction, après tout c’était son mea culpa qu’elle faisait là alors autant le faire bien.

Et pour ton information, je ne bavais pas devant sa photo *elle désigna l’affiche*, j’étais juste…en pleine extase. Qui plus est, je ne compatis pas pour toi à propos de ta jambe, je pourrais même dire que je m’en fiche étant donné qu’on se connaît à peine, c’était juste une pique basse et méchante.

Elle commença par déambuler au hasard le long du mur en regardant un peu partout, la tête dans les nuages mais toujours consciente de la présence de Tatsuya, quand elle saisit sa question au vol.

Au fait, tu peux me tutoyer, j’ai l’impression d’être une vieille peau quand tu me donnes du « vous ». Bref, c’est un guitariste génial à mon avis avec un style éclectique, un look que j’adore….

Il lui vint à l’esprit que le concert de miyavi était dans pas longtemps (certes ce serait pendant la semaine et les élèves n’auraient théoriquement pas le droit de sortir… mais qu’importe. Après tout, on vit qu’une fois, aussi y assisterait-elle à n’importe quel prix). Elle s’arrêta pile devant lui, le scruta des pieds à la tête sans rien dire avec une mine pensive. Puis, marquant une hésitation d’à peine plus d’un quart de seconde, elle lui demanda s’il lui serait possible de l’y accompagner…

Après tout, quel est le meilleur moyen pour savoir ce que vaut cet artiste si ce n’est de le découvrir toi-même, continua-t-elle en riant.

En plus, cela lui donnait l’occasion de faire d’une pierre deux coups, s’excuser et se racheter. Et, sans se départir de son sourire joyeux, elle ajouta :

Mais je te préviens, tu n’as absolument pas le droit de dire qu’il est mauvais (sinon tu auras droit à mon poing dans la gueule) mais comme je suis magnanime, je t’accorde le droit de ne pas l’aimer et de le dire.

Elle s’assit contre le mur à côté de lui en attendant sa réponse en espérant vivement qu’il dirait oui. Dans le cas contraire, tant pis, elle avait d’autres options.

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