Il le regarda s'écarter d'un bond, amusé. Avait-il peur d'un nouveau baiser ? Qu'il se rassure, le brun ne comptait pas passer sa vie à lui faire des "smack" comme disent les français. Les doigts du voleur glissèrent donc sur la peau de l'avant bras d'Aoi alors que celui-ci reprenait une posture un peu plus digne. Sheikhan en profita pour récupérer son paquet de clopes, écoutant les dires du garçon d'une oreille distraite. Il alluma sa cigarette et rangea briquet et paquet dans une poche, levant enfin les yeux vers le fils de Nihya.

"Je me contrefous de ce que ta chère mère a pu te raconter. La seule chose que je vois, c'est que tu as tué un homme dont tu ne savait rien."

Et probablement même pas l'explication de son départ. Après tout, Aoi aurait fait quoi si, à 12 ans, il était père d'un môme ? Sheikhan trouvait surtout la mère idiote d'avoir garder l'enfant, foutant du même coup sa vie en l'air et lui offrant une vie sans père. Il fallait voir jusqu'où ça menait, ce genre d'imbécilités. Il n'y avait vraiment que les femmes pour vouloir des mômes sans pouvoir bien les élever !

Nihya avait sûrement du être surpris de voir son fils débarquer pour commencer. Sheikhan s'imagina un instant à sa place, faisant face à une fille, sa fille, qu'il n'avait jamais pris la peine de connaître. Non, il ne le voudrait sans doute pas plus parce qu'elle était juste devant ses yeux, mais était-ce là un drame ? Avec la vie qu'ils menaient, élever un enfant, c'était dangereux, mais si en plus on n'en voulait pas...

"Tu crois vraiment que tu aurais été plus heureux en vivant près de lui ? Près d'un homme dont le seul ami d'enfance qu'il ait eu s'appelait danger ? Je ne sais pas où tu as vécu, mais si tu crois vraiment ça, dis-toi que tu as été chanceux d'avoir à peu près la paix, d'avoir pu te construire loin des emmerdes qu'il vivait."

Le voleur avant envie de lui crier : ouvre les yeux ! Il n'en fit pourtant rien et se contenta de tirer une latte sur sa clope, les yeux rivés dans ceux d'Aoi. Il ne chercherait pas à lui épargner la vérité. Il y avait bien peu de chances qu'Aoi soit aussi sain d'esprit (enfin, c'était relatif) s'il avait vécu avec Nihya de présent.

Ce n'était pas Sheikhan qui lui reprochait de ressembler à Nihya en tout cas. La seule véritable chose pour laquelle il lui en voulait, c'était parce qu'il l'avait tué. Et justement, c'était ça le plus surprenant, il lui ressemblait sans l'avoir connu et semblait pourtant ne pas comprendre son père. Pourtant, ils avaient le même mode de pensées, c'en était que plus drôle... même s'il n'avait pas le cœur à rire de ça.

"Oh... Et tu l'as tué au lieu de persévérer ? Charmant..."

C'est que si Sheikhan avait fait ça, Ni' serait mort depuis bien plus longtemps encore. Il soupira, tira ensuite sur sa clope et expira la fumée en la regardant sans vraiment la voir.

Nihya avait-il été un jour avenant ? Quelque soit le domaine, Sheikhan ne se souvenait pas l'avoir vu ainsi. Pour se mettre ensemble, c'était déjà le brun qui avait fait le gros du travail. Il l'avait eu à l'usure, tant et si bien qu'il avait eu le temps d'en tomber amoureux. D'ailleurs, il était tombé amoureux d'un sacré emmerdeur qui ne faisait jamais les choses dans le bon sens. Qu'il n'ait pas été avenant avec Aoi, ça se comprenait donc, vu comme ça. Et puis... Savait-il au moins qu'il avait un fils ? C'est que le brun ne lui avait jamais parlé de sa famille. Même quand il avait appris l'existence de Tsukiyo, il n'en avais pas touché un mot à son amant. Pourquoi faire ? Nihya ne lui avait jamais demandé s'il avait une famille. D'ailleurs, de fait, Sheikhan ne savait pas grand chose de la famille de son mec. Tout ce qu'il savait se résumait à un fiston et une frangine, deux emmerdeurs patentés, mais ça, c'était de famille.

"Il savait que tu existais au moins ?"